Dans la paracha Nasso (6,2) il est écrit : "כה תברכו את בני ישראל" (Voici comment vous bénirez les enfants d’Israël).

Pour quelle raison la loi juive spécifie-t-elle que l’officiant se doit de dicter mot à mot la bénédiction pontificale aux Cohanim ? Ne serait-il pas plus simple de leur faire réciter ces trois versets par cœur ?

La raison en est la suivante : il est bien connu que la bénédiction ne saurait reposer sur une chose dépourvue de contenu. Un homme ne saurait bénir quiconque si ce n’est qu’il a été lui-même béni auparavant, à la manière de cet épi qui ne donne ses graines que parce que lui- même a d’abord été semé. Voilà pourquoi, ce n’est qu’après avoir reçu la bénédiction divine de la bouche de l’officiant que le Cohen se trouve en mesure de bénir à son tour l’assemblée.

On raconte qu’un jour, à la sortie de Yom Kippour, Rabbi Lévi Its’hak de Bertditchev envoya chercher un agent d’affaires de la ville. Il lui demanda s’il était expert en matière de courtage.

« Oui mon maître, répondit le courtier, c’est ma spécialité et j’ai toujours exercé ce métier.

—  T’est-il déjà arrivé d’être grassement rémunéré pour une transaction importante?

—  Plus d’une fois, répondit l’agent. Au cours de ma vie il m’est arrivé de recevoir des commissions s’élevant à plusieurs centaines de roubles.

—   S’il en est ainsi, lui dit Rabbi Lévi Its’hak, je souhaite qu’en ta qualité d’expert, tu évalues la commission qui me revient de la part du Ciel en contrepartie de mes bons services. Aujourd’hui, je suis intervenu dans une affaire dont les parties étaient le Tout-Puissant et Son peuple Israël et j’ai mené à bien une transaction particulièrement importante. Je savais qu’en notre bas monde les enfants d’Israël se trouvent parfois en possession de certaines marchandises qui manquent totalement dans les mondes supérieurs. Je savais également que se trouvent là- haut des denrées qui nous font défaut. J’ai proposé aux deux parties de procéder au troc de leurs marchandises. Je me suis tourné vers le Tout-Puissant et lui ai dit : il se trouve ici des péchés, des transgressions et des fautes, toutes choses qui sont inconnues dans les cieux élevés. En contrepartie, il se trouve en ta possession des marchandises, tels le pardon, l’absolution et la grâce, qui nous sont absolument nécessaires à nous autres, résidents d’ici-bas. Aussi, je te propose de procéder à un échange donnant-donnant. Après une longue négociation, l’affaire est parvenue à sa conclusion et la transaction a été effectuée. Maintenant, dis-moi s’il te plaît, toi qui connais bien ce genre d’affaires, quelle est ma juste rémunération?

—   Il va de soi que pour parvenir à la conclusion de ce contrat, notre maître a dû déployer des efforts considérables, répliqua le courtier, et il mérite sans aucun doute de recevoir une commission confortable. Cependant, à mon grand regret, je ne me connais guère dans ce genre d’affaires et je ne saurais évaluer son salaire avec exactitude.

—   Je ne cherche pas à m’enrichir, lui dit Rabbi Lévi Itshak, je ne réclame à titre de commission que d’être gratifié d’enfants, de jouir d’une bonne santé et de pouvoir me nourrir à satiété. Toi qui es un expert en matière de courtage, dis-moi si je réclame plus que mon dû.

—   A mon avis, répondit le courtier, notre maître réclame un salaire tout à fait raisonnable. La justice et l’équité commandent que sa demande soit accueillie favorablement.

Le visage de Rabbi Lévi Itshak rayonna de joie :

— Et bien, puisqu’il en est ainsi, je fais don de la totalité de mon salaire au peuple d’Israël »...

De la même manière, les Cohanim reçoivent d’abord la bénédiction du Tout-Puissant de la bouche de l’officiant, puis, après avoir été bénis, ils peuvent à leur tour bénir le peuple juif (D’après un discours du Richon Letsion, le Rav Ovadia Yossef).