Hachem ne se trompe jamais, il reprend toujours les meilleurs. Peu de temps après la tragique annonce de la mort du Rav Néhémia Lavi qui tentait de sauver des juifs d'un terroriste arabe dans la vieille ville de Jerusalem en Octobre 2015, son compagnon d'étude entra dans le Beith Hamidrach où ils avaient l'habitude d'étudier en 'Havrouta, afin de voir quel avait été le dernier sujet de Limoud du Rav. Souvenirs...

Sur la table du Beth HaMidrach il trouva le livre du Kouzari dans lequel était glissé un marque-page. Lorsqu'il ouvrit le livre à l'endroit du marque-page, il eut la surprise de découvrir plusieurs lignes soulignées au crayon à papier : "Rabbi Akiba se servait des deux mondes, sans dommage, et l'on disait déjà de lui que la Chékhina aurait dû briller sur lui comme sur Moché, mais le temps n'était pas venu. Et il a fait partie des 10 martyrs. Au moment où il était supplicié, il a demandé à ses disciples s'il était l'heure de réciter le Kri'at Chéma, ce à quoi ses élèves se sont exclamés : " Quoi notre Maître, à tel point ?" Il leur répondit "Toute ma vie, j'ai été malheureux de ne pas réaliser "de toute ton âme" ; et maintenant qu'il me prenne mon âme, je ne le réaliserais pas ?". Et Rabbi Akiba a prolongé la prononciation du mot E'had jusqu'à son dernier soupir".

La 'Havrouta (compagnon d'étude) de Rav Lavi rapporta cela à la famille endeuillée, qui s'en émut beaucoup, et cela fut raconté à maintes reprises pendant la semaine de deuil. Tous les propos rapportés sur le Rav Lavi ont permis de comprendre combien les phrases du Kouzari lui correspondaient, pas seulement pour les circonstances de sa mort héroïque en Kiddouch Hachem, mais aussi pour définir la totalité de son être, comme un être qui a voué sa vie à l'étude de la Torah et au rapprochement de ses prochains vers elle.


9 âmes dans un studio

Le Rav Lavi enseignait dans une Yéchiva et était père de sept enfants. La famille vivait dans un appartement d'une seule pièce situé dans la Vieille Ville. Cette pièce était "divisée" par un rideau et tous les membres de la famille y vivaient dans une abnégation baignée de joie. Non seulement cela, mais cela n'empêchait pas de nombreux élèves de rendre fréquemment visite au Rav, et de s'y sentir chez eux.

"Chaque soir, même tard dans la nuit, lorsqu'il avait terminé toutes ses activités, il appelait l'un de ses élèves avec lequel il avait une 'Havrouta privée en vue de le renforcer, raconte l'un de ses proches amis. Il ne délaissait cette 'Havrouta pour rien au monde. Même lorsqu'il partait en Milouim, il maintenait sa 'Havrouta par téléphone aux sons mélodieux de la base militaire. Il appelait aussi chez lui et parlait à chacun de ses sept enfants afin de s'enquérir de ce que chacun avait étudié à la Yéchiva ou au Talmud Torah, pour les interroger et leur parler de Limoud comme s'il était à la maison.


Hachem cueille les plus belles fleurs

Le beau-frère de Rav Lavi témoigne qu'il lui rappelait toujours la figure du Tsaddik de Jérusalem, le Rav Arié Lévine. "Il accueillait des invités en permanence, dit-il d'une voix brisée. Il présentait toujours à sa famille les jeunes qu'il invitait comme "d'excellents amis", même s'il venait de les rencontrer dans la rue depuis à peine deux heures. Il les entretenait avec chaleur, les renforçait, essayait de bien les connaitre comme s'il les fréquentait depuis des années".

A cela s'ajoute une anecdote qui date de ses Milouim, et qui montre qu'il vivait sa Torah dans tous les recoins de son être. Peu avant qu'ils ne soient libérés, on distribua une feuille à tous les appelés, en leur demandant d'indiquer ce qui les dérangeait à l'armée et comment ils pensaient pouvoir l'arranger. L'une des choses que Rav Lavi écrivit concernait sa difficulté avec le Lachone Hara. Pour y remédier, il s'adressa à l'un des officiers qui participaient fréquemment aux périodes où Lavi était présent. Agréablement mais fermement, il lui a demandé d'essayer au moins d'utiliser un langage châtié, car il lui était difficile en tant que Juif pratiquant d'entendre du Lachone Hara. L'officier a tenu compte de ses paroles, et miraculeusement, une atmosphère plus pure et agréable s'est installée grâce à des propos désormais plus mesurés.


Jamais un mot méprisant

Enfin, la veuve de Rav Lavi a elle aussi parlé avec émotion de l'homme exceptionnel qu'elle avait eu le mérite d'avoir à ses côtés. "Il incarnait le Messilat Yécharim, le Sentier de Rectitude (ouvrage de Moussar du Rav Luzatto) dans toutes ses voies. Pendant les 16 années de notre mariage, je peux témoigner devant le Ciel et la Terre que je ne l'ai jamais entendu dire un mot de Lachone Hara sur qui que ce fut. Pas même une fois".
 

Efrat Cohen