« Et voici les lois que tu placeras devant eux. » (Chémot, 21:1)

La Paracha de cette semaine détaille les lois civiles et économiques. Rachi écrit que les termes « et voici » viennent inclure le sujet précédent à celui dont on va parler (contrairement au mot « voici » qui est exclusif).Ainsi, la Torah relie le chapitre du Don de la Torah à celui des Michpatim[1] pour nous enseigner que ceux-ci furent, tout comme les Dix Commandements, transmis au Mont Sinaï. Pourquoi est-il nécessaire de nous faire passer un tel message, en particulier en ce qui concerne ces préceptes ? En effet, nous savons déjà que toute la Torah fut donnée au Sinaï ![2]

Pour répondre à cette question, il est important de comprendre la différence qui peut exister, aux yeux des gens, entre les obligations Ben Adam Lamakom[3] (entre un homme et D.ieu) et celles Ben Adam La’havéro (ente un homme et son prochain). On peut avoir tendance à considérer les commandements liés à D.ieu comme des lois provenant d’une source divine et les Mitsvot Ben Adam La’havéro, telles que les lois économiques et civiles, comme résultant de l’intellect humain.

En effet, chaque société, peu importe sa croyance religieuse, instaure de telles règles pour maintenir un certain ordre. C’est la raison pour laquelle la Torah jugea fondamental de souligner que de la même manière que les Dix Commandements proviennent de la Sagesse Divine, les lois économiques et civiles ont la même origine, bien qu’elles soient souvent en accord avec la logique humaine.

Rachi, sur ce même verset ajoute que le chapitre des Michpatim jouxte celui de l’Autel pour nous apprendre qu’il faut installer un Sanhédrin[4] à côté du Temple. L’idée est la même. Le Sanhédrin gère tous les désaccords financiers et civils qui surgissent. La Torah met donc l’accent sur le fait que les secteurs qu’il régit ont leur place dans la spiritualité, au même titre que les lois relatives au Temple.

En quoi cet enseignement est-il si important, au point que la Torah y fasse deux allusions dans le premier mot de la Paracha ? En réalité, si quelqu’un considère les lois économiques et civiles d’un point de vue différent des Mitsvot Ben Adam Lamakom, cela aura une grande influence sur son comportement dans ces domaines. Il risque d’agir avec beaucoup de crainte de D.ieu en ce qui concerne les Mitsvot directement liées à Hachem, comme le Chabbat ou la Cacheroute ; il aura une grande soif d’apprendre ces obligations primordiales et n’hésitera pas à poser ses questions à un Rav en cas de doute. En revanche, devant une indécision sur le plan financier, une conduite similaire est moins fréquente. On peut, au moins inconsciemment, s’imaginer que de telles incertitudes ne sont pas régies par la Torah, mais par notre logique, notre réflexion.

Rachi, dans ses deux commentaires, montre que cette approche est très erronée – l’individu doit considérer les Michpatim avec le même regard que les autres commandements de la Torah.

Rav Israël Salanter, initiateur du mouvement de Moussar insistait sur l’importance de travailler sur l’honnêteté. Il répéta à maintes reprises, une veille de Yom Kippour, le précepte de ’Hazal : « Dans un sac plein de fautes, le vol est la première à accuser. » Il réalisa qu’un homme ne peut devenir un véritable serviteur d’Hachem s’il n’améliore que son étude de la Torah, sa prière et son observance du Chabbat. Bien entendu, ces points sont essentiels, mais si on excelle dans ces domaines tout en étant laxiste à l’égard de la propriété ou de l’argent d’autrui, la faille est profonde.

Comme souvent, pour se perfectionner, la première étape est d’apprendre les lois et la Hachkafa qui y ont trait – à savoir le respect dû aux biens d’autrui, l’attention que l’on doit porter aux objets empruntés, l’honnêteté requise dans les affaires et le fait de s’écarter de tout risque de vol.



[1] Il s’agit des lois économiques et civiles.

[2] Brakhot, 5a.

[3] Par exemple, la prière, l’alimentation cachère, les lois de pureté familiale.

[4] Le Tribunal juif Suprême qui existait à l’époque du Temple.