La Haftara de cette semaine est très précisément la continuité de celle de la semaine dernière, issue des premiers chapitres du livre de Jérémie.

Cette Haftara appartient donc aux trois textes de « catastrophe » que nous lisons entre le 17 Tamouz et le 9 Av. Elle fait référence et dénonce le penchant à l’idolâtrie du peuple juif et son inconstance dans le Service divin, alors même qu’Hachem lui a prodigué des bontés innombrables.

Même si cette Haftara n’a pas été choisie directement en raison de son lien avec la Paracha, on peut toutefois identifier au moins un thème commun à nos deux textes. Ces derniers mentionnent explicitement les étapes qui ont précédé l’arrivée du peuple sur la terre d’Israël.

La Haftara nous indique ainsi (Jérémie, 2, 6-7) : « Ils n'ont pas dit : Où est l'Eternel qui nous a fait monter du pays d'Egypte, qui nous a guidés à travers le désert, pays de solitude et de précipices, pays de sécheresse et d'ombres mortelles, pays où nul être humain n'avait passé, où nul fils d'Adam n'a séjourné ? Je vous avais amenés dans un pays de vergers pour jouir de ses fruits et de ses richesses », alors que la Paracha mentionne explicitement sur de nombreux versets les étapes qui ont conduit le peuple juif en Israël.

L’écho de la Haftara

Une des premières phrases de notre Haftara est saisissante, dans la mesure où elle résume en peu de mots l’inconstance du peuple juif et ses conséquences inévitables. Le prophète dit ainsi : « Vayélékhou A’haré Hahévèl Vayéhbalou - Ils ont poursuivi des vanités (des idoles futiles) et sont devenus eux-mêmes sans valeur ».

Le prophète Jérémie nous rappelle ainsi la triste histoire du peuple juif, notamment à l’époque des Juges, dont beaucoup ont succombé aux tentations très fortes à l’époque de l’idolâtrie. Cette faute est d’autant moins excusable que ces générations avaient été témoins des bienfaits de l’Eternel et de grands miracles qui s’étaient déroulés sous leurs yeux. Et pourtant, l’esprit humain n’est pas assez fort pour rester cohérent et graver en lui l’impératif de fidélité à l’Eternel.

La compréhension intellectuelle ne suffit pas si elle n’est pas accompagnée d’une pratique rigoureuse et d’un investissement permanent dans la Torah et le Service divin. Cela ne signifie pas que l’homme doive interrompre toute activité matérielle pour se consacrer à la méditation spirituelle, mais cela signifie que l’homme doit orienter toutes ses activités vers un objectif spirituel.

Le prophète a choisi significativement le terme « Hével », qui signifie « vanité », comme nous le trouvons dans les mots du Roi Salomon (Kohélet, 1, 2) : « Hével Havalim Amar Kohélèt, Hakol Havel - Vanité des vanités, a dit Kohélet, tout est vanité ».

Or, Jérémie nous dit que les Bné Israël poursuivaient des vanités, c’est-à-dire des valeurs vaines, dépourvues de sens, voire contraires à celles de la Torah.

Notre génération comprend parfaitement la séduction que peuvent opérer les valeurs promues par la modernité, alors même qu’elles éloignent l’homme de sa spiritualité et des valeurs de la Torah : le consumérisme, la recherche des plaisirs immédiats, la multiplication des écrans et l’addiction aux nouvelles technologies… Peut-on illustrer d’une meilleure manière ce verset : « Ils courent après des valeurs vaines » ?

Nous constatons ainsi que des générations entières ne comptent plus les heures quotidiennes qu’elles passent devant des écrans à essayer de vivre par procuration des émotions ou des expériences au mieux vaines, au pire destructrices pour leur équilibre émotionnel, psychologique, et social.

C’est précisément ce que le prophète indique en écrivant que la conséquence de rechercher des « valeurs vaines » est de rendre sa propre vie « vaine ». « Vayéhbalou - Ils se sont rendus vains, sans valeur ». Constat terrible, mais ô combien vrai !

Comment peut-on éviter ces cercles vicieux si séduisants ? Pour faire échec aux recherches intellectuelles stériles, aussi bien qu’aux tentations des valeurs concurrentes de la Torah, notre tradition a érigé un axiome comme principe fondamental de la vie : « Naassé Vénichma - Nous ferons et nous comprendrons ». L’homme doit s’efforcer d’agir, et notamment d’accomplir les Mitsvot de la meilleure manière possible afin d’échapper aux risques de la vanité.

S’il fallait choisir, on dirait que l’action doit précéder la réflexion, et même si ce principe est contre-intuitif pour des esprits modernes, il révèle une vérité fondamentale, dont nos Sages nous disent qu’il s’agit d’un secret que seuls les anges connaissent.

Il faut ainsi comprendre que l’homme est déterminé par ses actes, son ressenti émotionnel et non selon sa seule compréhension rationnelle. Si l’homme poursuit des valeurs vaines, alors lui-même finira par rendre sa vie « vaine ».

En revanche, s’il s’efforce d’orienter sa vie selon des valeurs profondes, conformes à la Torah, s’il multiplie les Mitsvot et recherche la sagesse à travers ses lectures, ses actes, ses fréquentations, alors il peut espérer échapper à ces vanités et résolument « choisir la vie ».