« Ordonne aux enfants d’Israël de prendre pour toi de l’huile d’olive pure, pressée pour l’éclairage, pour alimenter la lampe en permanence » (Chémot, 27:20)

La Paracha Tetsavé commence par les instructions d’Hachem à Moché quant à l’huile utilisée pour la Ménora. L’accent est mis sur la nécessité d’une huile parfaitement pure. Pourtant, celle utilisée pour les sacrifices de Min’ha n’est pas soumise à cette obligation. Quelle est la différence entre les deux services ?

Rav Eliahou Méir Kovner[1] explique leur symbolique. La Min’ha est un sacrifice personnel, et représente l’accomplissement des Mitsvot sur le plan individuel. Par contre, la Ménora éclaire le monde et symbolise donc l’influence spirituelle sur autrui. Quand une personne effectue sa propre Avoda, l’idéal, bien évidemment, serait que ses motivations soient les plus pures possible, mais si elles ne le sont pas, cela n’élimine pas l’effet de la Mitsva.[2] En revanche, celui qui agit en faveur des autres doit avoir des intentions parfaites pour réussir. Ainsi, l’huile représente la pureté de notre objectif — qui n’est pas fondamentale dans la Avoda des sacrifices de Min’ha, mais primordiale dans celle de la Ménora.

Cette idée est exprimée dans la Michna de Pirké Avot[3] : « … Ceux qui s’occupent de la communauté[4] doivent le faire en l’honneur du Ciel (Léchem Chamaïm) ; car le mérite de la communauté les aidera et leur vertu demeurera éternellement… »

Rabbénou Yona[5] explique que ces personnes sont plus exposées au Yétser Hara de l’honneur, particulièrement présent et actif quand on agit en public. Le Sforno[6] souligne que ce genre d’occupations est très difficile. Et la Michna nous indique comment surmonter ces défis quand on travaille pour la communauté ; il faut agir Léchem Chamaïm, pour le bien-être de la collectivité — ainsi, la personne pourra bénéficier des mérites des membres de la communauté et de leurs ancêtres.

Rav Steinman insistait sur la difficulté de garder de nobles intentions quand on œuvre pour le Tsibour, étant donné les nombreux éléments qui peuvent facilement influencer l’individu. La première étape est d’être honnête avec soi-même. Avant l’un de ses voyages à l’étranger, il dut choisir entre deux accompagnateurs potentiels. Il leur demanda pourquoi ils voulaient l’escorter — l’un répondit qu’il désirait voir l’incroyable Kevod Hatorah qui se manifesterait à la vue du Rav. L’autre reconnut qu’il souhaitait visiter les différents sites touristiques. Le Rav choisit le deuxième, car il était plus sincère.

Rav Steinman proposait des conseils, pour augmenter la dose de Léchem Chamaïm dans nos actions faites en faveur de la communauté. Il recommanda par exemple à Rav Israël Friedman[7] de « faire assoir » le Yéster Hara à ses côtés avant de commencer à écrire un article et de lui demander : « Pourquoi veux-tu que j’écrive ? Pour la Parnassa ? C’est réussi. Pour le plaisir ? Ça l’est aussi. Pour le pouvoir et l’influence ? Tu as réussi ! C’est bon, tu as reçu tout ce que tu désirais ? Alors serait-ce dérangeant si j’agissais aussi Léchem Chamaïm, si j’avais également l’intention décrire quelque chose qui renforcerait la foi d’un Juif ou sa pratique des Mitsvot ? »

Rav Steinman disait que dans chacune de nos actions, il faut un niveau de « "aussi" Léchem Chamaïm ». De cette façon, l’action ne sera jamais entièrement impure. En s’habituant à réfléchir de la sorte, l’individu aura parfois 1 % de « Léchem Chamaïm » dans ses actes, parfois 2 % et parfois même 10 ou 20 %. L’essentiel étant de ne jamais en être totalement dépourvu.

Les gens qui s’efforcent d’avoir toujours le maximum de pures intentions dans leurs actions, surtout quand elles visent l’ensemble de la communauté, mériteront une grande Siyata Dichmaya (aide divine) pour la réussite de leurs entreprises.


[1] Rapporté dans Michoul’han Gavoa, Tétsavé, p. 187.

[2] Comme l’enseignent ’Hazal, un home doit toujours accomplir les Mitsvot, même si ses motivations ne sont pas Léchem Chamaïm, car cela l’entrainera à les faire, par la suite, pour cette cause.

[3] Avot, 2:2.

[4] On inclut toute personne qui œuvre pour les besoins de la communauté, de la synagogue, ou qui enseigne.

[5] Commentaire sur Avot, 2:2.

[6] Ibid.

[7] Éditeur en chef du journal Yated Nééman, rapporté dans Hamodia, 24 Téveth 5778, p. 24