La Torah décrit les signes requis pour déterminer les animaux cacher – le fait de ruminer et d’avoir les sabots fendus. Elle énumère certains animaux qui n’en possèdent qu’un seul. Toutefois, les commentateurs soulignent que l’ordre utilisé dans ces versets est difficile à comprendre. On nous cite le Gamal, la Arnévet et le Chafan comme animaux non-cacher. Pour cela, il aurait semblé plus logique de mentionner d’abord l’élément qui pose problème, puis celui qui rend cacher, ou au moins de préciser que ces animaux ne sont pas consommables bien qu’ils aient l’un des signes de Cacheroute[1]. Or la Torah nous proscrit ces bêtes, parce qu’elles ruminent et n’ont pas les sabots fendus. Pourquoi ?

 Rav Issakhar Frand rapporte un Midrach expliquant que la Torah nous enseigne que même lorsque quelque chose n’est pas cacher, il faut tout d’abord évoquer l’élément élogieux qu’il renferme. Même le porc mérite d’avoir ses qualités mises en avant.

Ceci nous apprend une leçon fondamentale dans le domaine du Ben Adam La’havéro en général, et dans celui des critiques et des réprimandes en particulier. Il est parfois nécessaire de blâmer un enfant, un élève, un employé, un ami ou un voisin ; ce Midrach nous montre que même lorsqu’il nous faut véhiculer un message négatif – pointer un aspect « non-cacher » — il faut toujours trouver un point positif ou une qualité à relever en premier lieu.

Pourquoi est-ce si important ? Tout d’abord, en faisant précéder la critique d’un éloge, l’autre est plus à même de l’accepter. Personne n’aime être réprouvé et se faire corriger. De plus, lors d’une remontrance, on ne voit pas forcément que l’autre agit par amour pour son prochain ou par désir sincère de le voir s’améliorer, cela peut sembler être une attaque personnelle (et ce n’est malheureusement pas toujours une simple impression). Par contre, si celui qui fait le reproche peut montrer qu’il se préoccupe véritablement de l’autre et lui trouver des qualités, alors la personne visée acceptera plus facilement la critique, elle ne se tiendra pas sur la défensive et n’éprouvera pas de ressentiment.[2]

Il existe une autre raison quant à l’importance d’introduire la réprobation par la louange. De cette façon, celui qui réprimande ne se concentre pas seulement sur les défauts d’autrui en oubliant ses points forts. Il est d’ailleurs recommandé d’émettre le minimum de critiques et certains experts en ’Hinoukh estiment que chaque commentaire négatif doit être accompagné de quatre paroles positives.

Rav Yé’hiel Spero raconte que lorsqu’il était enfant, sa classe allait parfois jouer au base-ball avec leur professeur. Il criait souvent sur ses camarades qui ne jouaient pas très bien. Un jour, son professeur lui en parla en énumérant tout d’abord plusieurs qualités du jeune Yé’hiel. À la fin de la liste, il déclara que cela ne se faisait pas qu’un enfant si brillant parle à ses amis de la sorte. Rav Spero raconte que plusieurs des éloges n’étaient même pas vrais, mais cette conversation eut un effet magique.

Cet enseignement ne se limite pas aux remontrances. Dès que l’occasion de féliciter autrui se présente (une bonne note, un devoir bien fait, un discours, un examen…), il faut la saisir avant d’émettre un quelconque bémol.

Puissions-nous tous utiliser les paroles positives dans toutes les relations avec nos amis, nos élèves et nos enfants.


[1] Voir Chaaré Aharon, Chemini, 11:4, p. 277 qui rapporte des commentateurs qui expliquent le verset ainsi. Le Kli Yakar propose une approche différente.

[2] On peut trouver des contre-exemples de grands érudits en Torah qui réprimandèrent leurs disciples durement, sans les couvrir de louanges. Dans ces cas, il semblerait que l’amour du Rav pour ses élèves était si fort et manifeste que ceux-ci savaient clairement que leur Rav souhaitait leur bien.