L'un des grands changements que provoquera la Guéoula sera bien évidemment le retour de la prophétie qui ne sera plus l'apanage d'une minorité, mais dont bénéficiera tout le peuple d'Israël. Comme il est écrit[1] : « Et par la suite, je déverserai Mon esprit sur toute chair et vos fils et vos filles prophétiseront. »

Le Midrach de commenter[2] : « Dieu dit : dans ce monde, seule une élite prophétisa, dans le monde futur, tout Israël seront des prophètes. »

Lorsque l'on parle de prophétie, il faut le prendre au sens large. Ce n'est pas seulement une capacité à voir l'avenir. C'est avant tout une expérience mystique individuelle, une proximité avec la Chékhina, la présence divine.

Prévoir l'avenir, voir des choses qui sont cachées du commun des mortels n'en est qu'une conséquence. A l'époque du Temple, lorsque la Chékhina résidait en Israël, les prophètes étaient nombreux. Il y avait même des « Yéchivot », des écoles de prophétie.

Les livres des prophètes nous sont parvenus parce que leur message et leur vision seront d'actualité jusqu'à la venue du Machia'h. Mais en plus des prophètes mentionnés dans ces livres, les élèves des prophètes pouvaient se compter par milliers. Lorsque le Premier Temple fut détruit, l'esprit Saint (la prophétie) disparut d'Israël[3], même si les derniers prophètes eurent des révélations après la destruction du Temple et la dissimulation de l'arche Sainte. Le ‘Avodat Hakodèch[4] explique que c'est parce qu'ils avaient reçu la prophétie avant la destruction. Toujours est-il que dans les générations suivantes, la prophétie disparut et seul un niveau très « bas » d'esprit saint (Roua’h Hakodèch) put résider sur les grands Tsadikim.

Prophétie pour tout le monde ?

Il est vrai que le Radak[5] pense que la prophétie ne résidera pas sur tout le monde à la fin des temps. L' « esprit » déversé dont il est question, c'est la connaissance de D.ieu, qui sera universelle (toute chair). Par contre, pour ce qui est de prophétiser, on ne parle que de « vos fils et vos filles », c'est à dire pas tout le monde. Abrabanel commente également dans ce sens.

Par contre, la ‘Hassidout[6] considère que l'esprit de prophétie résidera sur tout un chacun. Ce ne sera plus une « option » dépendante des capacités individuelles mais bien un état naturel et normal d'Israël. Ceci est logique lorsque l'on considère que l'avènement du Machia’h permettra à l'essence de l'âme juive, qui est un « 'Helek Eloka Mima’al Mamach[7] » (une partie de D.ieu vraiment), de se dévoiler. D.ieu et son peuple ne feront plus qu'un, il est donc cohérent de penser que tout Israël, chaque individu bénéficiera d'une relation privilégiée avec le Créateur.

Un retour échelonné dans le temps

De la même manière que la prophétie disparut progressivement, elle réapparaîtra peu à peu. Ce niveau de Roua’h Hakodèch dont bénéficiaient les anciens prophètes il y 2500 reviendra d'abord au Tsadikim avant même la Guéoula.

Le Rambam écrit[8] qu'il a reçu de ses maîtres que la prophétie reviendra à la fin du cinquième millénaire et que ce sera l'un des signes que l'on se rapproche des jours du Machia'h. Il certifie même qu'à son époque existait un homme qui était sans nul doute prophète !

De fait, on peut remarquer que le Rambam, qui codifie la prophétie dans son ouvrage de Halakha (le Michné Torah) n'écrit nulle part que la prophétie n'existe plus. Au contraire, il dit clairement que si l'on réunit toutes les conditions présentées dans son livre, alors immédiatement on mérite la prophétie.

D'ailleurs, à cette époque, nos sources attestent que de nombreux Tsadikim bénéficièrent de l'esprit de prophétie[9].

Dans les générations suivantes, de grands dévoilements de Roua'h Hakodèch furent alloués au Ari Hakadoch, et deux siècles plus tard au Baal Chem Tov et à ses élèves à propos desquels le Tséma'h Tsédek écrit qu'ils voyaient d'un « bout du monde à l'autre ». On venait leur poser des questions que l'on ne posait jadis qu'aux prophètes, et leurs extraordinaires réponses ne pouvaient être qu'inspirées par D.ieu[10].

Nous ne pouvons maintenant qu'espérer que très bientôt cet esprit de prophétie ne soit plus seulement le privilège de nos grands Tsadikim mais que nous puissions aussi en profiter et voir la réalisation de la promesse d’Isaïe[11] : « Ton Guide ne se dérobera plus à ton regard, tes yeux pourront voir ton Guide… »

D'après les discours du Rabbi de Loubavitch et le livre "Sodot Haguéoula" (Menahem Brod)". 


[1] Yoël 3.1.

[2] Tanhouma à la fin de la Paracha Béa’alotékha.

[3] Yoma 9b ; Sota 48b.

[4] Partie 4 chapitre 24.

[5] Sur Yoël 3.1.

[6] Emchè'h 'Ayin Beth volume 2 page 936.

[7] Tania Likoutey Amarim chapitre 2.

[8] Lettre au Yémen, chapitre 3.

[9] Comme Rabbi Chmouel HaH'assid, Rabbi Eléazar auteur du Rokéa'h, le Ramban, le Raavad, Rabbi Ezra HaNavi, Rabbi Yéhouda Ha'Hassid. Voir Likoutey Si’hot Tome 2 page 588.

[10] Voir Sefer Ha’hakira page 65a.

[11] 30.20.