« Vous observerez donc Mes lois et Mes statuts, parce que l’homme qui les pratique obtient, par eux, la vie » (Vayikra/Lévitique 18,5).

Nous vivons des temps difficiles, mais très précieux. Nous constatons avec un mélange d’effroi et d’admiration la magnificence de notre Créateur. Les piliers de nos certitudes vacillent l’un après l’autre devant un ennemi invisible. Nos sages nous l'ont dit (Sota 49b) : « Sur qui pouvons-nous compter ? Seulement sur notre Père céleste ». Car Hachem nous parle. Il nous interpelle. Il nous sort avec force d’une torpeur interminable pour nous rappeler Sa présence. Il est là et Il dirige le monde à chaque instant. Notre maîtrise de la nature et les progrès de notre civilisation nous ont amenés à oublier cette évidence. Nous nous croyions jusque-là invincibles. En effet, qu’avions-nous à craindre ? Nos armées sont puissantes. Notre économie est dominante. Notre système de santé est moderne et performant (enfin presque). Nos magasins abondent de denrées. Ne vivons-nous pas dans des pays riches et développés ? Et pourtant ! Un « simple » virus déstabilise notre système de santé et assomme notre économie. Il nous cantonne dans nos maisons comme des reclus en temps de guerre. Loin des discours eschatologiques, force est de constater le dévoilement extraordinaire de la Providence divine : « Sur qui pouvons-nous compter ? Seulement sur notre Père céleste. »

Durant cette période, l’effort sanitaire est dans toutes les bouches. Nous devons nous protéger afin de ne pas nous exposer ou exposer les autres au danger. Cela implique de nombreux changements dans nos habitudes quotidiennes. Le confinement et la distance sociale s’installent peu à peu dans notre vie. Ces changements impactent tout particulièrement notre pratique religieuse. « Prenez donc bien garde à vous-mêmes ! », nous disent les rabbins d’une seule et même voix. Car il n’y a rien de plus précieux que la vie.

Vous vivrez par elles

Nos sages discutent dans la Guemara Yoma (85b) du principe de Pikou’ah Néfech (danger de mort). Ils débattent de la source biblique qui nous autorise à transgresser le Chabbath pour sauver une vie. La Halakha retient deux des sept références proposées. Rabbi Chimon ben Menassia dit : « Les enfants d’Israël seront donc fidèles au Chabbath, en l’observant dans toutes leurs générations comme un pacte immuable » (Chemot/Exode 31,16). La Torah nous demande de transgresser un Chabbath afin d’en respecter plusieurs. » Rav Yehouda dit au nom de Chmouel : « Ma référence est plus juste que la vôtre. ‘Tu vivras par elles [les Mitvot]’ et tu ne mourras pas pour elles ». Le désaccord entre Chmouel et de Rabbi Chimon ben Menassia repose sur une conception différente des Mitsvot et de la vie humaine. Ces deux sages discutent en fait de la valeur de la vie. Selon Rabbi Chimon Ben Menassia, la vie ne se justifie que pour l’accomplissement des Mitsvot d’où son interprétation : « Transgresse ce Chabbath pour en respecter d’autres. » En d’autres termes : vis pour faire les Mitsvot ! Mais selon Chmouel, la vie possède une valeur intrinsèque qui dépasse la Mitsva. Nous devons vivre parce que notre vie est précieuse. La grande majorité des décisionnaires retient l’avis de Chmouel. Ils affirment ainsi la valeur suprême de la vie.

Mais qu’est-ce qui donne une telle importance à la vie humaine ? Pourquoi Hachem chérit-Il tant nos vies ?

Nos sages nous enseignent dans les Pirké Avot (3, 14) : « Il (Rabbi Akiva) avait coutume de dire : « Bien-aimé est l’homme pour avoir été créé à l’image [de D.ieu] ; c’est un surcroît d’amour que de lui avoir fait savoir qu’il a été créé à l’image [de D.ieu], car il est dit : ‘Car c’est à l’image de D.ieu qu’Il créa l’homme. Bien-aimé est le peuple d’Israël pour être appelé ‘enfants de D.ieu ; c’est un surcroît d’amour que de leur avoir fait savoir qu’ils sont les enfants de D.ieu, car il est dit : « Vous êtes les enfants de l’Éternel votre D.ieu. Bien-aimé est le peuple d’Israël, car il lui a été accordé un objet précieux ; c’est un surcroît d’amour que de lui avoir fait savoir qu’il lui a été donné un outil précieux, car il est dit : ‘Car c’est un enseignement de valeur que Je vous ai donné ; Ma Torah, ne la délaissez pas’. »

L’homme fut créé à l’image d’Hachem par l’amour d’Hachem comme l’écrit Rav Moché Haïm Luzzato (cf. Dérekh Haim). Sa vie possède de ce fait une importance incommensurable. Nous sommes tous les chéris d’Hachem. Il estime notre vie par-dessus tout. Attention, cela n’est pas un permis de transgresser sans vergogne les Mitsvot de la Torah. Il s’agit juste de prendre conscience de la valeur de la vie. Nous devons vivre parce qu’Hachem nous aime. Il veut que nous vivions. Cette épreuve nous encourage à considérer la valeur de la vie, la nôtre, mais surtout celle de notre entourage. Car la distance sociale, les masques ou le confinement ne sont pas que des mesures de protection personnelle, mais de protection collective. Le monde entier est confronté à la notion de responsabilité collective. Car la problématique de cette pandémie n’est pas tant qui vivra, mais qui tuera par inadvertance ou par nonchalance. Notre respect des directives du ministère de la Santé témoigne de notre appréciation de la vie humaine. Réduisons notre liberté individuelle afin que notre prochain puisse vivre en bonne santé. Soucions-nous des autres et valorisons leur vie. C’est là l’un des principaux défis de cette épreuve.

Qu’Hachem nous aide. Qu’il guérisse tous les malades et mette immédiatement fin à cette épreuve terrible et nous apporte la délivrance dans la joie.