« Ils affirmèrent trois choses : Rabbi Eliézer dit : puisse l'honneur de ton prochain t'être aussi cher que le tien ; ne te mets pas facilement en colère, repens-toi la veille de ta mort et réchauffe-toi au feu des Sages… »

QUESTIONS

1. Comment peut-on se repentir la veille de notre mort, sachant que personne ne connaît la date de sa mort ?

2. Si l'idée est de se repentir chaque jour, pourquoi ne pas dire simplement : « Repentez-vous chaque jour de votre vie » ?

3. Ne doit-on pas se repentir de toute manière chaque jour ?

Rabbi Eliézer poursuit en indiquant qu'un individu doit se repentir un jour avant sa mort. La Guémara[1] cite un dialogue entre Rabbi Eliézer et ses élèves par rapport à cette exhortation. Ils lui demandèrent : comment peut-on se repentir la veille de notre mort, on ignore en effet le jour de notre mort ? Il leur répondit qu'à plus forte raison, on est tenu de se repentir chaque jour, car on ignore si ce sera notre dernier jour sur terre.

Les commentateurs se demandent pourquoi Rabbi Eliézer n'a pas simplement indiqué qu'il convient de se repentir chaque jour de sa vie – pourquoi a-t-il affirmé de manière détournée que l'on doit se repentir le jour précédant notre mort, le résultat final est le même : on doit constamment se repentir ?

Rabbi Eliézer réalisa qu'il est naturel pour un individu d'avoir une attitude de complaisance face à la nécessité de faire Téchouva, estimant qu'il vivra longtemps, et n'éprouve aucune peur du jugement qui aura lieu dans le Monde à venir. En conséquence, Rabbi Eliézer fait allusion à l'idée d'une prise de conscience face à l'inconnu de la date de notre mort, et l'introduction d'un sentiment d'urgence dans notre attitude. En vivant cette incertitude de la durée de notre vie, on a plus de chance de se débarrasser de cette attitude complaisante qui nous incite à ignorer les ramifications spirituelles de nos actions.

Il ne s'agit pas simplement d'une belle idée de Hachkafa (perspective juive de la vie) – le Rambam le mentionne dans son ouvrage de Halakha, le Michné Torah[2] :

« Un homme doit toujours se considérer comme s'il était proche de la mort, il mourra peut-être et en conséquence, restera de manière permanente avec ses fautes. De ce fait, il devra se repentir de ses fautes immédiatement et éviter de dire : "lorsque je serai âgé, je me repentirai", car il mourra peut-être avant de prendre de l'âge…»

Comment un individu peut-il cultiver cette attitude de sentir cette proximité potentielle de la mort, ce qui l'aidera en échange à considérer plus sérieusement le repentir ? Un exercice possible qui peut aider l'homme en général, et dans ce domaine en particulier, est d'utiliser son temps plus efficacement et de réfléchir à ce qu'il ferait s'il lui restait un jour à vivre. De nombreuses personnes choisissent d'agir de manière différente que d'habitude, lorsqu'ils sentent une plus grande urgence dans leur vie, que lorsqu'ils voient la mort comme un événement distant. En réalité, on doit s'efforcer de vivre de cette manière chaque jour, car chaque jour de la vie est aussi important que le dernier. Lorsqu'on demanda à un géant en Torah ce qu'il entreprendrait s'il lui restait un jour à vivre, il répondit qu'il se consacrerait aux mêmes occupations qui l'occupent chaque jour.

De même, un autre grand Rav avait l'habitude de faire une marche chaque jour pour des raisons de santé. Le jour de Kippour, il se mit en marche pour sa marche quotidienne, mais un élève lui fit remarquer que ce jour-là n'était peut-être pas adapté à une marche. Le Rav répondit que s'il se promenait chaque jour, c'était ce qu'il convenait de faire, donc Yom Kippour n'était pas une exception à la règle.

Un autre exercice qui peut s'avérer profitable a été mentionné par le Rav Noa'h Weinberg. Il affirmait que si certains sont prêts à mourir pour certaines causes, ils doivent également vivre pour elles ! Par exemple, de nombreux Juifs affirment être prêts à mourir pour le peuple juif, mais ne consacrent aucun moment dans leur vie, à œuvrer en faveur du peuple juif. Ou de nombreux Juifs se déclarent disposés à mourir pour leur religion, mais combien d'entre eux sont-ils prêts à vivre pour elle ?

Il est important de souligner que toutes ces idées ne signifient pas qu'un homme doit développer une vision morbide de la vie, en vivant constamment dans la peur de la mort. Une telle attitude ne produit pas d'actions positives, mais risque plutôt de bloquer la personne. Mais cela signifie qu'un élément de sérieux doit imprégner la vie de chacun, et l'approche d'Essav et de ses descendants - mangeons et vivons, car demain, nous mourrons - doit être bannie. On doit vivre vie pleinement, car « demain, on mourra», et on vivra ensuite dans le monde éternel où l'on récoltera les bénéfices de notre vie productive.

 

[1] Chabbath 153a.

[2] Hilkhot Téchouva 7,2.