Un "Hamastan" viable ?

Pour les Palestiniens comme pour les Israéliens, la nouvelle réalité - "Hamastan" à Gaza, "Fatahland" en Cisjordanie - sera un tournant historique. Un tournant qui comportera surtout des inconnues dans l'immédiat. Côté palestinien, l'on admet que l'histoire géopolitique a creusé au fil des ans le fossé socio-économique, culturel et cultuel entre la Cisjordanie, plus bourgeoise, aisée et laïque, et la Bande de Gaza, davantage démunie et pieuse.

RENÉE-ANNE GUTTER CORRESPONDANTE À JÉRUSALEM
Un "Hamastan" viable ?
©AP

Pour les Palestiniens comme pour les Israéliens, la nouvelle réalité - "Hamastan" à Gaza, "Fatahland" en Cisjordanie - sera un tournant historique. Un tournant qui comportera surtout des inconnues dans l'immédiat. Côté palestinien, l'on admet que l'histoire géopolitique a creusé au fil des ans le fossé socio-économique, culturel et cultuel entre la Cisjordanie, plus bourgeoise, aisée et laïque, et la Bande de Gaza, davantage démunie et pieuse. Mais l'instauration de l'Autorité palestinienne et la cause nationale devaient précisément réunifier les deux régions.

A présent, au-delà des difficultés politiques, les deux sociétés vont à nouveau se distancier et cultiver leurs antagonismes. Comme l'a déjà annoncé un porte-parole du Hamas jeudi à Gaza : "Le passé ne reviendra plus, l'ère de justice et pouvoir islamiques est arrivée". Plus prosaïquement, comment le "Hamastan" survivra-t-il, coupé de tout ? Depuis le déclenchement du "putsch" du Hamas, les passages frontaliers sont fermés, tant côté israélien qu'égyptien.

Comment Israël et le Hamas, qui se boycottent mutuellement, vont-ils s'entendre sur l'entrée et la sortie des dizaines de camions de marchandises qui alimentaient jusqu'à présent le commerce quotidien et indispensable des Gazaouis ? Comment s'accorderont-ils sur l'entrée des aides humanitaires qui risquent de devoir s'intensifier (lire ci-contre) ? Comment coordonneront-ils la poursuite de l'approvisionnement en fuel et électricité qu'Israël fournit à Gaza ?

Israël de son côté a mis le Hamas en garde de ne pas profiter de la crise pour reprendre ses attaques contre Israël. Ces attaques ont diminué ces derniers jours. A part cet avertissement, le gouvernement Olmert refuse de faire tout geste militaire qui puisse être interprété comme une ingérence dans la crise palestinienne. Israël ne compte plus autoriser non plus le transfert d'armes arabes aux forces du président Abbas, afin qu'elles ne tombent aux mains du Hamas. Il craint déjà que les documents saisis par le Hamas dans les Q. G. de M. Abbas - documents qui révèlent certains liens sécuritaires avec Israël - ne tombent en mains iraniennes.

Mais au-delà de la prudence militaire, M. Olmert a déjà commencé à réexaminer sa politique à long terme à l'égard de Gaza. Il en parlera la semaine prochaine avec le président Bush. Parmi les mesures possibles : proclamer Gaza "pays ennemi", fermer toutes ses frontières, y compris maritime, abolir l'enveloppe douanière et les accords économiques qui lient les deux marchés. Et autoriser une force internationale. Certains analystes israéliens croient cependant que l'instauration d'un "Hamastan" facilitera les choses pour Israël. Au-lieu du gouvernement à deux têtes qui forçait Israël à ménager ses ripostes, Gaza n'aura plus qu'un seul maître avec lequel Israël pourra décider de traiter ou de faire la guerre.

© La Libre Belgique 2007

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