60 ans après la Shoah, la Pologne se dote de son musée des juifs

Varsovie, première ville juive d'Europe avant l'Holocauste, entame mardi la construction d'un ambitieux musée de l'histoire des juifs de Pologne qui retracera leur passé millénaire sur cette terre.

AFP
60 ans après la Shoah, la Pologne se dote de son musée des juifs
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Varsovie, première ville juive d'Europe avant l'Holocauste, entame mardi la construction d'un ambitieux musée de l'histoire des juifs de Pologne qui retracera leur passé millénaire sur cette terre.

C'est le directeur fondateur du Musée américain de l'Holocauste à Washington, l'Israélien Jeshajahu (Shaike) Weinberg, lui-même né à Varsovie, qui a eu l'idée au début des années 1990 de créer en Pologne un troisième grand musée, aux côtés du Yad Vashem à Jérusalem et du sien.

La construction, au milieu de l'ancien ghetto érigé par les nazis, devrait durer deux ans et le musée devrait ouvrir en 2010, dix ans après la mort de son initiateur.

Même si sa direction s'efforce de ne pas faire un nouveau musée de l'Holocauste comme à Washington ou à Jérusalem, le contexte historique polonais l'impose, car c'est dans les camps nazis installés en Pologne que furent exterminés la majorité des juifs d'Europe.

"L'Holocauste sera une des huit salles thématiques de l'exposition", a souligné le président de l'Institut historique juif (ZIH), Marian Turski.

"Mais ce musée sera surtout le témoignage de la présence des juifs en Pologne, un témoignage de leur vie et de leur contribution culturelle", a-t-il ajouté.

Les visiteurs découvriront d'abord l'arrivée en Pologne des juifs chassés d'Espagne et de France et le développement d'une présence florissante jusque dans l'entre deux-guerres. En 1939, il y avait environ 3,3 millions de juifs en Pologne dont 400.000 à Varsovie.

En septembre, le musée a commencé la collecte des souvenirs pour la future exposition. Judyta Hajduk, une des cinq historiennes du musée, attendait les dons tous les mercredis et dimanches sur le site du futur musée, en face du monument aux Héros du ghetto de Varsovie.

En dix mois, le résultat est plutôt maigre, une centaine de donateurs ont apporté quelques centaines de pièces, des photos, des documents et de petits objets de toutes sortes.

"Ce n'est pas beaucoup, mais on ne s'attendait pas à beaucoup plus. Forcément, il ne pouvait pas y avoir beaucoup de souvenirs. Les Allemands ont détruit tout le ghetto de Varsovie. Les maisons ont été entièrement rasées", explique Mme Hajduk.

Les maisons, les synagogues et tout le mobilier, les objets de culte, ou les simples objets de la vie quotidienne, ont été systématiquement détruits.

De la Grande synagogue rue Tlomackie à Varsovie, qui pouvait abriter 1.000 personnes, il reste à peine un petit bout de colonne et un seul jeton de vestiaire.

Parmi les dons, des objets très précieux au sens historique, comme deux photos inédites, les seules photos couleur du ghetto de Varsovie incendié.

"Le photographe anonyme a pris ces photos uniques du toit de l'ambassade italienne, jouxtant le ghetto. Craignant d'être arrêté par les Allemands, il les a prises la nuit", explique Judyta Hajduk.

Pour écraser l'insurrection de 1943, les nazis ont mis feu à tout ce quartier de 4 km2 délimité en automne 1940 et où ils avaient enfermé tous les juifs de la capitale et des alentours, soit plus de 500.000 personnes.

300.000 juifs ont été envoyée au camp de la mort de Treblinka (est) dans le cadre du plan nazi d'extermination des juifs. Des dizaines de milliers d'autres avaient péri auparavant, de faim ou de maladie dans le ghetto. Soixante mille personnes sont mortes pendant l'insurrection, ou immédiatement après.

"En général, on sait très peu des personnes à qui ces objets ont appartenu, et encore moins ce qu'elles sont devenues", ajoute-elle.

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