Juste après avoir libéré, dans la nuit de mardi à mercredi 30 octobre, un nouveau contingent de vingt-six détenus palestiniens dans le cadre des délicates négociations de paix en cours sous l'égide des Etats-Unis, le gouvernement de Benyamin Nétanyahou a donné son feu vert à de nouveaux programmes de colonisation à Jérusalem-Est.
Dans un communiqué, le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a aussitôt condamné cette décision, estimant qu'elle "détruit le processus de paix et est un message à la communauté internationale qu'Israël est un pays qui ne respecte pas le droit international". M. Abbas a réaffirmé dans un communiqué publié par l'agence officielle palestinienne WAFA que "toutes les activités de colonisation sont illégales".
Une façon de calmer la colère des formations d'extrême droite et ultranationalistes qui, a l'instar de Naftali Bennett, ministre de l'économie et du commerce et chef du parti nationaliste religieux Habayit Hayehoudi ("la maison juive"), se sont déchaînés contre la "libération des meurtriers", faisant tanguer la coalition gouvernementale.
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"UNE DÉCISION LES PLUS DIFFICILE QUE J'AI EU À PRENDRE"
Israël avait accepté la libération de 104 prisonniers palestiniens, en plusieurs fois, en fonction des progrès des négociations, deux jours avant la reprise des pourparlers de paix israélo-palestiniens le 30 juillet.
Dans la nuit de mardi à mercredi, un groupe de vingt et un détenus a quitté la prison israélienne d'Ofer, près de Jérusalem, avant d'être accueillis par le président palestinien Mahmoud Abbas et leurs familles au siège de l'Autorité palestinienne à Ramallah, en Cisjordanie. Au même moment, cinq autres prisonniers étaient remis en liberté à Gaza, au milieu de scènes d'allégresse.
Dix-neuf des Palestiniens libérés appartiennent au parti nationaliste Fatah du président Abbas, quatre au Front populaire de libération de la Palestine (gauche) et trois au mouvement islamiste Hamas. A l'exception d'un, tous ces anciens prisonniers ont été condamnés à des peines de prison à vie pour le meurtre d'Israéliens, selon le service pénitentiaire israélien.
"Libérer ces prisonniers est une des décisions les plus difficiles que j'ai eu à prendre. Elle est injuste car ces terroristes sont relâchés avant d'avoir purgé leur peine. Mon cœur est avec les familles en deuil", a affirmé le premier ministre, Benyamin Nétanyahou. Deux mille Israéliens étaient venus protester contre leur libération, devant la prison d'Ofer.
1 500 NOUVEAUX LOGEMENTS
Quelques heures à peine après la libération des prisonniers, la radio militaire annonçait qu'Israël allait construire 1 500 logements dans le quartier de colonisation de Ramat Shlomo à Jérusalem-Est. Un haut responsable gouvernemental israélien a ensuite confirmé que Benyamin Nétanyahou avait bien donné son feu vert à quatre plans de construction à Jérusalem-Est, ainsi qu'à des agrandissements de maison, à la construction d'un centre touristique et archéologique juste à l'extérieur des remparts de la vieille ville et à un parc national sur les pentes du mont Scopus.
Israël "veut gagner du temps pour renforcer sa politique de colonisation et imposer une nouvelle réalité sur le terrain. Une telle position est de nature à miner les négociations de paix et détruire toute possibilité d'établir un Etat palestinien viable", a accusé le négociateur Yasser Abed Rabbo.
Le 21 octobre, le secrétaire d'Etat américain John Kerry, qui a imposé un black-out médiatique sur les pourparlers de paix auxquels il avait ramené les deux parties fin juillet, affirmait que les négociations s'intensifiaient, faisant état de treize rencontres. Mais un haut dirigeant de l'Organisation de libération de la Palestine a déclaré mardi que les pourparlers n'avaient "pas fait de progrès tangible", en déplorant que "l'actuelle position de négociation israélienne soit la pire depuis plus de vingt ans".
Les dirigeants palestiniens ont nié fermement avoir accepté la construction de nouveaux logements dans les colonies juives en échange de la libération des prisonniers. Les négociateurs palestiniens affirment que la poursuite de la colonisation, condamnée par la communauté internationale et qui a déjà causé l'interruption des précédents pourparlers en septembre 2010, "détruit le processus de paix".
M. Abbas a par ailleurs assuré qu'il n'y aurait pas d'accord de paix tant qu'un seul Palestinien serait encore emprisonné dans les geôles d'Israël.
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