Luzon: "Si avoir confiance en soi c'est être arrogant, alors oui je le suis"
Guy Luzon se livre en exclusivité pour la DH à trois jours du match le plus important de sa carrière de coach. Rêves de titre, attitude sur la touche, critiques au pays, cas Batshuayi et avenir: l'Israélien se confie tous azimuts.
- Publié le 09-05-2014 à 06h00
- Mis à jour le 09-05-2014 à 08h13

Guy Luzon se livre en exclusivité pour la DH à trois jours du match le plus important de sa carrière de coach. Dimanche face au Club Bruges, Guy Luzon et les Liégeois disputeront un match qui les rapprochera, ou non, du titre. Avant cette rencontre quasiment décisive pour l'attribution des lauriers nationaux, le coach israélien s'est confié.
Guy, en quoi le succès contre Zulte était-il si important ?
"Il nous a apporté de la confiance supplémentaire. On devait renouer avec la victoire et retrouver notre place de leader que nous avons occupée pendant 99 % de la saison."
Anderlecht qui s'impose à Bruges, cela vous a-t-il surpris ?
"Pas du tout. En PO1 , le niveau des équipes est équivalent."
Le match de dimanche est le plus important de la saison.
"On pouvait en dire de même du match contre Zulte ou du suivant à Lokeren."
Sauf que dimanche, le titre peut se rapprocher.
"On aura fait un pas supplémentaire vers le titre mais il en restera deux de plus à effectuer. Mais je suis d'accord qu'en cas de victoire, nous ferions un grand pas en avant."
Qui mérite le plus d'être sacré et pourquoi ?
"Le Standard ! Nous avons occupé la première place quasiment toute la saison et nous avons la meilleure équipe."
D'accord de dire que le champion sera un petit champion ?
"Non ! Qu'est qu'un petit champion ? Je n'ai jamais entendu cette expression. Un champion est toujours un grand champion."
Louper le titre serait une terrible déception.
"Je ne pense pas à ce cas de figure. Je suis quelqu'un d'optimiste."
Que vous inspire la photo au-dessus de votre tête (illustration de la fête à Sclessin après le titre de 2008) ?
"Elle me donne des frissons et de l'envie. J'aimerais bien connaître cela en vrai !"
Quelle sera votre part de mérite en cas de titre ?
"Je n'aime pas parler de moi. Le mérite en reviendra en premier aux joueurs et au club. Moi, je ne suis qu'une part de la machine. Rien de plus."
Sentez-vous déjà l'odeur de la Ligue des Champions ?
"Si on gagne dimanche, je commencerai à la sentir."
C'est un objectif pour vous ?
"Pour tous les acteurs du foot, que ce soit les joueurs, les dirigeants ou même vous, les journalistes, la Ligue des Champions, c'est un must !"
Le match de dimanche est-il le plus important de votre carrière ?
"Ce sera un des plus importants !"
"Je ne suis pas arrogant!"
Véritable passionné, Guy Luzon vit ses matches à 200 %, ce qui l'amène parfois à déraper. C'était notamment le cas lorsqu'il a évoqué l'arbitrage. Depuis son arrivée, sa personnalité intrigue les observateurs. Ainsi, de nombreuses étiquettes lui ont été collées sur le dos dont celle d'un coach arrogant, ce que ce dernier a du mal à comprendre.
"En quoi suis-je arrogant ? Donnez-moi des preuves qui prouvent mon arrogance. Il n'y en a pas. Si avoir confiance en soi c'est être arrogant, alors oui, je le suis ! Je n'ai jamais prétendu être le meilleur coach du monde. Je ne comprends pas pourquoi on m'affuble de ce terme d'arrogant !"
Lorsqu'on évoque le qualificatif passionné, Guy Luzon retrouve son calme.
"Oui, cela me correspond mieux. Je vis pour ma passion. C'est sur un terrain de football que je me sens le mieux. Oui, je suis capable d'appeler quelqu'un à minuit pour parler football. Depuis le début de ma carrière, je n'ai jamais eu l'impression, lorsque je me levais le matin, d'aller travailler. Je vis de ma passion. C'est un hobby plus qu'un travail. Tant que j'aurai l'énergie d'être sur un terrain, je le ferai."
Souvent qualifié de Crazy One , l'Israélien est-il vraiment fou ? "Je suis fou de la victoire" , précise-t-il avec ce petit sourire qui le caractérise.
Il y a peu , Guy Luzon a décidé de ne plus évoquer l'arbitrage après l'avoir tout de même copieusement critiqué. Le coach du Standard aurait-il aimé être à la place des hommes en noir ?
"Moi, arbitre ? Je n'y ai jamais pensé ! Cela n'a jamais été un de mes objectifs. Être arbitre, c'est un rude métier." Le corps arbitral devrait-il être aidé par les nouvelles technologies ? "C'est à la Fédération de répondre."
Enfin, lorsqu'on lui demande quelle a été sa meilleure décision cette saison, Luzon répond cash : "Être resté moi-même." Et à l'inverse, la pire ? "Quand tu prends 1.000 décisions sur l'année, tu fais des erreurs. J'évalue toujours mon travail dans le but de m'améliorer. Je me remets toujours en question."
"Je ne sais pas rester tranquille"
Dès les premiers matches amicaux de l'été dernier, le coaching, pour le moins actif, de Guy Luzon a surpris tout le monde. Sur la touche, le mentor des Rouches se donne autant que ses joueurs sur le terrain. "Je n'y réfléchis pas. Je réagis à l'instinct. Cela vient certainement de mon énorme envie de gagner."
Sa gestuelle est tellement imposante qu'on peut se demander si ses joueurs comprennent toutes les consignes pendant le match.
"Rassurez-vous, ils comprennent bien tout. S'ils ne comprenaient pas, on n'en serait pas là."
Rester assis sur son petit banc de touche pendant 90 minutes, Guy Luzon en serait incapable. "Je ne sais pas rester tranquille. Si je reste assis, je ne prends pas de plaisir et cela ne rime à rien. C'est uniquement en prenant du plaisir dans votre travail que vous pouvez avoir du succès."
Nul n'est prophète en son pays
Dans son pays natal, Luzon a toujours été considéré comme pistonné. Lors de son passage à Petach Tikwa, où il a entraîné les jeunes avant de s'occuper de l'équipe première, les médias trouvaient l'explication à sa nomination dans son lien de parenté avec le président qui n'était autre que son oncle, Amos Luzon.
Lorsqu'il a pris la tête des U21 israéliens, les médias ont également pointé du doigt son lien de parenté avec le président de la fédération, son oncle, Avi Luzon. "Je me suis d'abord dit que je devais réaliser des résultats. Lorsque j'y parvenais, cela faisait de la peine à mes détracteurs. Je veux bien qu'ils continuent à parler sur moi si j'obtiens toujours les résultats escomptés."
Migrer vers la Belgique et le Standard était un moyen de prouver à ses détracteurs qu'il était capable de réussir en dehors de ses frontières ?
"Un entraîneur doit toujours prouver. J'ai toujours été sous le feu des projecteurs. Je cherche d'abord à me prouver des choses à moi-même et pas aux autres."
C'est chez lui que le coach du Standard a appris à se méfier de la presse.
"Je n'ai jamais été un homme de discours. Est-ce plus simple de collaborer avec vous plutôt que la presse israélienne ? Oui."
S'il est accompagné en Belgique par sa femme Dana et ses enfants Ariel et Elia, son pays natal d lui manque.
"C'est certain. Ce qui me manque le plus, c'est ma famille. J'ai la chance d'avoir une très grande famille. Si je pouvais délocaliser le Standard en Israël, ce serait parfait (rires) !"
Quid des leçons de français ?
"J'apprends mais pendant les PO1 , c'est entre parenthèses. Je promets de m'exprimer en français la saison prochaine."
"Michy n'est pas protégé"
Pointé du doigt pour son manque d'altruisme et son inefficacité, Michy Batshuayi a réagi positivement vendredi dernier contre Zulte.
Aux yeux de certains, le Standardman est surprotégé par son coach.
"Je ne suis pas d'accord avec cette analyse. Michy est un brave gars qui possède un potentiel incroyable. Bien évidemment qu'il commet des erreurs dans certains matches mais cela ne fait pas de lui un mauvais garçon. Il est jeune et encore perfectible. Il doit encore apprendre. Quand tu es un bon joueur, comme Michy, toute l'attention est concentrée sur toi, tu es sous le feu des projecteurs. C'est ça, la vie d'un talent. Quand les médias parlent de toi, c'est que tu existes. C'est positif."
Lorsqu'on lui demande si la perte de vitesse d'Ezekiel est due au travail qu'il a fourni pour Batshuayi, une fois de plus, Luzon répond : "Non, je ne suis pas d'accord."
À l'approche de l'annonce de la sélection des 23 de Marc Wilmots, le nom de Michy Batshuayi revient avec insistance pour pallier l'absence de Benteke.
"Ce n'est pas ma décision, elle revient à Marc Wilmots" , rétorque Luzon. Mais que ferait ce dernier s'il était sélectionneur ? "Ce n'est pas loyal de ma part de répondre à cette question. Ce n'est pas mon job."
Les Diables, Luzon les porte en haute estime.
"La Belgique a une superbe équipe dont le potentiel est énorme. Les Diables peuvent s'attendre à de très bons résultats car ils figurent parmi les meilleurs joueurs au monde."
Dans le cadre des éliminatoires de l' Euro 2016 , nos Diables rencontreront Israël.
"C'est un match que j'attends bien qu'à mes yeux, il n'y ait pas photo entre les deux pays. Mon pays s'inclinera à deux reprises face au vôtre."
Après avoir coaché les U21 , Guy Luzon rêve-t-il de prendre les rênes de l'équipe A ?
"Rêver, c'est un grand mot. Quand j'ai débuté ma carrière, c'était un de mes objectifs. L'est-ce encore aujourd'hui ? À court terme, je n'y pense pas. Peut-être quand je serai plus vieux !"
Quid en cas de départ de Duchâtelet ?
Juste avant le début des playoffs 1, Roland Duchâtelet a prolongé de deux ans le contrat de Guy Luzon. Un timing qui en a surpris plus d'un.
"Après plusieurs mois, j'étais heureux à Liège et le président était satisfait de mon boulot. C'était donc logique de signer un nouveau contrat, peu importe le timing."
Ce nouveau contrat met-il davantage de pression sur ses épaules ?
"Non, un coach a toujours la pression. Je sais quelles sont les attentes envers moi."
En rachetant Alcorcon, Charlton et Carl Zeiss Iena, Roland Duchâtelet s'est constitué une véritable galaxie.
"C'est une très bonne chose de pouvoir prêter nos joueurs à des clubs satellites. Cela leur permet de se développer et à nous, de garder un œil attentif sur leur évolution."
Si les joueurs sont susceptibles de passer d'un club de la galaxie Duchâtelet à un autre, cela pourrait-il être le cas pour Luzon ? "Dans la vie, on ne sait jamais ce qui peut se passer. Pour le moment, je suis au Standard et je m'y sens bien."
Mais le futur de l'Israélien semble tout de même être lié à celui du président qui a annoncé vouloir vendre le club.
"C'est un plaisir de travailler avec un président aussi fantastique. Si on continue notre collaboration, j'en serais très heureux."
Mais quid en cas de départ de Duchâtelet ? "C'est hypothétique. On ne sait pas ce qu'il va se passer. Je sais juste que je serai encore le coach du Standard les deux prochaines saisons."