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Nétanyahou fait enrager son gouvernement

Le premier ministre israélien, ­Benyamin Nétanyahou, lors d'une réunion ministérielle qui s'est tenue à Tel-Aviv, le 10 août. BAZ RATNER/AFP

Hostiles au moindre cessez-le-feu avec le Hamas, les durs du cabinet israélien se sentent sur la touche et se disent manipulés par les responsables de l'armée.

Après l'entrée en vigueur lundi de la trêve des combats à Gaza, Benyamin Nétanyahou se prépare désormais à ferrailler sur le front intérieur. Un vent de fronde souffle en effet parmi les ministres mécontents d'avoir appris par la presse la conclusion d'un accord sur un cessez-le-feu de 72 heures. Le triumvirat composé de Benyamin Nétanyahou, du ministre de la Défense, Moshé Yaalon, et du général chef d'état-major Beni Gantz donne le sentiment de mettre systématiquement les autres membres du gouvernement devant les faits accomplis, aussi bien durant la guerre que pour les négociations indirectes avec le Hamas, qui ont repris lundi au Caire.

Cette contestation est menée par les «faucons» du gouvernement hostiles au moindre cessez-le-feu avec le Hamas. «La plupart du temps, je suis tenu informé par les médias qui m'annoncent à l'avance ce qui va nous être dit au gouvernement», déplore, amer, Uzi Landau, le ministre du Tourisme, l'un des «durs» de la coalition. Gilad Erdan, le ministre des Communications, bien que membre du cabinet de sécurité restreint, un forum de huit ministres censé pendre les décisions stratégiques, estime lui aussi être laissé dans le brouillard. «Je ne me sens pas suffisamment informé de ce qui se passe durant les négociations au Caire», reconnaît Gilad Erdan. Ce proche de Benyamin Nétanyahou redoute que des «arrangements» soient conclus avec le Hamas par l'entremise des Égyptiens, quitte ensuite à ce que les ministres soient convoqués pour les entériner, sans avoir les moyens de les modifier.

Un constat partagé par Ilil Shahar, commentatrice politique de la radio militaire. «Aucune discussion sérieuse n'a eu lieu au sein du cabinet sur ce qu'Israël peut proposer au Hamas et obtenir en échange», constate-t-elle. Dan Margalit, un éditorialiste favorable à Benyamin Nétanyahou, estime en revanche que les ministres contestataires comme Avigdor Lieberman, le patron de la diplomatie, «qui ont osé critiquer publiquement le chef du gouvernement en pleine guerre, n'ont pas de leçon de morale à donner, ni à venir se plaindre». Hanan Cristal, un commentateur de la radio publique, affirme pour sa part que, dans les situations de «conflit armé, il n'est pas possible de convoquer et de consulter le cabinet de sécurité à tout bout de champ».

Benyamin Nétanyahou a justifié le manque de concertation par les craintes de «fuites». Ce genre d'indiscrétion s'est d'ailleurs produit la semaine dernière lorsqu'un des membres du cabinet de sécurité a révélé à un journaliste la teneur d'un rapport confidentiel de l'armée concernant des projections sur les pertes très élevées de soldats que ne manquerait pas de provoquer une réoccupation totale de la bande de Gaza pour faire tomber le pouvoir des islamistes du Hamas. À cet argument, Uzi Landau réplique qu'il ne faut pas hésiter dans ce cas à passer «tous les ministres au détecteur de mensonges».

Rapport de force au sein de la coalition

Autre motif de grogne: des ministres se plaignent d'être manipulés par les responsables de l'armée qui se sont arrogé un «monopole» sur les informations présentées durant les réunions du gouvernement. Les ministres n'ont pratiquement jamais eu en main des documents militaires qu'ils auraient pu amender. La plupart du temps, ils ont dû se contenter de réagir uniquement sur la base de comptes rendus oraux d'officiers des services de renseignements militaires ou de cadres du Shin Bet, le service de sécurité intérieure.

Pour Yuval Bagno, du quotidien Maariv, l'attitude de Benyamin Nétanyahou tient aussi au rapport de force au sein de la coalition. Les partisans d'une escalade militaire contre le Hamas n'ont cessé de se renforcer, encouragés par une opinion publique, elle aussi, de plus en plus tentée par cette option militaire. Résultat: le premier ministre, qui redoute de se voir forcer la main, a préféré court-circuiter ses ministres plutôt que de se voir mis en minorité.

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