Israël et le Hezbollah enterrent la hache de guerre
Israël et le Hezbollah ont enterré jeudi la hache de guerre dont la milice libanaise avait fait usage la veille. Israël a indiqué avoir reçu un message du Hezbollah, via la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), selon lequel "de leur point de vue, l’incident est terminé".
- Publié le 29-01-2015 à 19h32
- Mis à jour le 30-01-2015 à 12h39
Israël et le Hezbollah ont enterré jeudi la hache de guerre dont la milice libanaise avait fait usage la veille. Israël a indiqué avoir reçu un message du Hezbollah, via la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), selon lequel "de leur point de vue, l’incident est terminé". Un ministre libanais a quant à lui fait état d’assurances transmises par de"grands pays" selon lesquelles "Israël ne cherchera pas l’escalade militaire". Un bémol aux propos du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou qui avait prévenu la veille que les responsables de cette attaque allaient "payer le prix", citant nommément l’Iran, soutien notoire du Hezbollah.
Mercredi, des miliciens de l’organisation chiite avaient tiré plusieurs missiles antichars contre un convoi militaire israélien, blessant sept soldats et tuant deux jeunes recrues de Tsahal venues se familiariser - ironie du sort - avec cette zone de tensions que constitue la frontière israélo-libanaise. Le Hezbollah a déclaré avoir mené cette attaque en représailles à la mort de six de ses combattants et d’un général iranien durant un raid aérien attribué à Israël, le 18 janvier sur le plateau du Golan.
"Le Hezbollah se devait de répondre sous peine de passer pour des mollassons", affirme la politologue Aurélie Daher, chercheur spécialiste du Liban et du chiisme moyen-oriental et auteur du livre "Le Hezbollah. Mobilisation et pouvoir" (Puf, 2014). "Il existe une sorte de guerre psychologique entre le Hezbollah et Israël depuis la guerre de l’été 2006. Israël se vante en effet d’avoir depuis ‘maté’ le Hezbollah, en avançant pour preuve le fait que le Hezbollah, depuis 2006, n’a plus jamais repris l’initiative dans les accrochages qui l’opposent à l’armée israélienne, et se contente de répondre quand il est attaqué. Le Hezbollah répond à cela qu’il ‘se réserve le droit de choisir le moment et le format des représailles, mais Israël ne doit pas penser que l’organisation est intimidée par Israël’".
Sécuriser ses approvisionnements
La réplique de la milice chiite libanaise s’envisage aussi en termes de popularité et de crédibilité interne. "Les violations israéliennes de la souveraineté libanaise sont nombreuses : les incursions de l’armée israélienne en territoire libanais sont quotidiennes, les tirs en provenance de la frontière israélienne et l’enlèvement de civils libanais en territoire libanais sont réguliers. Le Hezbollah se devait donc de prouver à la population libanaise, et en particulier à ses sympathisants, qu’il était toujours apte à remplir le rôle de protecteur des frontières du pays qu’il s’est assigné", explique Mme Daher.
Reste qu’aucune des parties n’a intérêt aujourd’hui à une escalade militaire. "Le Hezbollah, en répondant sur son territoire, en territoire libanais et occupé par Israël, recadre l’affrontement en le replaçant dans le cadre habituel de ses face à face avec Israël, donnant à comprendre que pour lui, il s’agit de ‘business as usual’ et qu’il ne souhaite pas l’escalade. Israël, de son côté, est en pleine campagne électorale, et les risques de devoir gérer des répercussions politiques contrariantes pour Benjamin Netanyahou en cas de guerre à grande échelle avec le Liban sont réels" , souligne Aurélie Daher.
Et puis, l’engagement du Hezbollah dans certaines régions de Syrie aux côtés des forces régulières syriennes, prive le "parti de Dieu" d’une partie de ses moyens humains et logistiques. Cette implication n’en reste pas moins essentielle pour sa propre subsistance. "Le but est pour le parti de sécuriser les frontières libanaises et plus particulièrement les frontières qui jouxtent ses zones (la Békaa chiite, le Sud-Liban) en en éloignant les groupes sunnites jihadistes de l’opposition syrienne", poursuit la chercheuse. Ceci lui permet de sécuriser ses approvisionnements en provenance d’Iran, lesquels passent obligatoirement par la Syrie. Ce sont ceux-ci qui lui ont notamment permis d’obtenir les missiles qui ont servi mercredi contre Tsahal.