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Gilles-William Goldnadel : antisémitisme et islamophobie ne sont pas comparables

FIGAROVOX/CHRONIQUE - Le président du CRIF a déclaré que «juifs et musulmans étaient ensemble victimes du racisme» lors de sa «réconciliation » avec le recteur de la Grande Mosquée de Paris à l'Elysée la semaine dernière. Gilles-William Goldnadel dénonce une dangereuse contrevérité.


Gilles- William Goldnadel est avocat et écrivain. Il est président de l'association France-Israël. Il tient une chronique hebdomadaire sur FigaroVox.


C'était sûr. Promis, craché. Rien ne serait plus jamais comme avant. Le 12 janvier au matin, les nuées pestilentielles de la haine, de l'intolérance, et du terrorisme intellectuel seraient emportées par un ouragan nommé Charlie. Certains, très peu nombreux, demeuraient fort sceptiques.

Le 12 janvier au matin, les nuées pestilentielles de la haine, de l'intolérance, et du terrorisme intellectuel seraient emportées par un ouragan nommé Charlie.

Contre le vent qui soufflait, ils prophétisaient sans plaisir qu'il était douteux qu'un happening satisfait, un festival du consensus mou allant jusqu'à refuser de détester la haine et encore moins de la nommer, une escroquerie émotionnelle aux sentiments, ne fassent autre chose que bien rire les méchants. Ces mauvais prophètes maudissaient le roi et plus encore ses puissants opposants de ne pas avoir saisi l'occasion du malheur pour se libérer des fers que la religion de la préférence pour l'Autre avait posés sur les sujets de France.

La semaine dernière, dans ces mêmes colonnes, je disais que le seul scandale provoqué par les évidences affligeantes prononcées par le représentant censé représenter les juifs français résidait précisément dans le fait qu'elles aient pu faire scandale. Mais un autre habite dans le fait que les déclarations du même, le lendemain, n'aient déclenché, au rebours, aucun commentaire.

Un autre scandale habite dans le fait que les déclarations du même, le lendemain, n'aient déclenché, au rebours, aucun commentaire.

Le président du CRIF s'est en effet rendu à l'Élysée, comme d'autres à Canossa, pour se réconcilier, sous égide présidentielle, avec le très estimable président Boubakeur qui avait cru devoir se sentir insulté par le lieu commun, la banalité, l'observation ingrate de l'identité religieuse des assassins de juifs. Bref, en la circonstance, c'étaient les musulmans qui faisaient figure d'offensés.

On revoyait ainsi se dérouler au même endroit, la même scène qui avait été jouée au lendemain du massacre de Toulouse, et où les acteurs de l'époque avaient lourdement insisté sur le «pas d'amalgame!». Quelques jours après, le grand rabbin de France avait regretté , mais un peu tard, la centralité de cette thématique qui masquait la réalité des responsabilités respectives. Cette fois-ci, le président du Crif s'est senti obligé de déclarer publiquement que «juifs et musulmans étaient ensemble victimes du racisme»… Je comprends bien, et je la souhaite autant qu'un autre, la nécessité de bonnes relations entre les enfants d'Israël et ceux d'Ismaël. Mais pas au prix d'un mensonge au moins par omission pour se faire pardonner une dure vérité.

Il n'existe aucune équivalence actuelle entre la souffrance juive et la souffrance musulmane. Les renvoyer dos à dos est une offense dangereuse à la cruelle vérité.

Il n'existe aucune équivalence actuelle entre la souffrance juive et la souffrance musulmane. Les renvoyer dos à dos est une offense dangereuse à la cruelle vérité. Que le représentant du CRIF m'oblige à m'imposer au nom de la vérité due aux victimes de la haine islamiste, cet exercice ingrat qui sera considéré par certains comme constitutif de concurrence victimaire, m'afflige.

Énoncer dans une même phrase que juifs et musulmans seraient victimes du même racisme donne à penser que, comme toujours, les racistes sont les non-juifs et les non-musulmans. Pour un peu les éternels franchouillards… Or dans la tragique circonstance actuelle, les tourmenteurs de juifs se recrutent au sein de l'islam radical.

Laisser également à penser qu'antisémitisme et islamophobie seraient les deux revers d'une même médaille ensanglantée relève de la dangereuse contrevérité. Comme l'a encore écrit mon cher Pierre André Taguieff dans ces mêmes colonnes «la symétrie entre islamophobie et judéophobie relève de l'escroquerie intellectuelle et morale.» «Point de musulmans assassinés en France parce que musulmans, point d'enfants musulmans tués en tant que musulmans. Point non plus en France, même après les tueries de janvier 2015, de manifestations islamophobes violentes avec des slogans comme «mort aux musulmans!» ou «musulmans assassins!». Ni même avec un slogan du type «musulman, casse-toi: la France n'est pas à toi!». Dieu merci.

J'ai défendu ici même le droit et même le devoir qu'avait le président de l'instance représentative des juifs de France de dire la vérité sans faillir. Dans la tempête médiatique s'il le faut. Ce n'était pas la peine de s'y risquer sans savoir tenir fermement la barre. Mais je sais aussi d'où souffle le mauvais vent qui gonfle la tempête. Si les choses ont changé depuis le 11 janvier, ce n'est pas en mieux.


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