Entre Palestiniens et Israéliens, un pas de plus vers le point de non-retour

En annonçant la fin de leur coopération sécuritaire avec les Israéliens, les Palestiniens ont amorcé une nouvelle arme potentiellement explosive. A leur président Mahmoud Abbas e décider à présent s'il l'active ou pas, et quand.

AFP
Entre Palestiniens et Israéliens, un pas de plus vers le point de non-retour
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En annonçant la fin de leur coopération sécuritaire avec les Israéliens, les Palestiniens ont amorcé une nouvelle arme potentiellement explosive. A leur président Mahmoud Abbas e décider à présent s'il l'active ou pas, et quand.

Le Conseil central de l'Organisation de libération de la Palestine a décidé jeudi de mettre fin à la coopération sécuritaire "sous toutes ses formes" avec Israël. Maintes fois annoncée et repoussée, cette décision aux possible lourdes conséquences est redoutée par la communauté internationale, tant elle comporte d'inconnues.

C'est aussi, si elle est appliquée, une avancée de plus dans la course en avant diplomatique qu'a engagée une direction palestinienne exaspérée depuis l'échec d'une énième initiative américaine de paix en 2014.

Habitués à entendre une telle menace depuis des années, les experts se demandaient vendredi si, cette fois, les Palestiniens tiendraient leur promesse malgré le risque de déstabilisation.

Assaad Abdelrahmane, un des dirigeants de l'OLP, a voulu dissiper les doutes: "Ce ne sont pas des recommandations, ce sont des décisions", susceptibles d'être mises en oeuvre "à tout moment", a-t-il dit à l'AFP.

Quand ? Ce sera au comité exécutif de l'OLP d'en juger, dit-il. Autant dire au président Mahmoud Abbas, traduisent les experts. Si cela advenait, cela ne devrait pas être avant les législatives qui décideront le 17 mars si Benjamin Netanyahu reste au pouvoir en Israël, ni même avant la formation du prochain gouvernement israélien, ont suggéré les Palestiniens à leurs interlocuteurs étrangers.

Instaurée par les accords d'Oslo conclus en 1993 entre Israël et l'OLP, la coopération secrète mais intense et étendue entre forces de sécurité palestiniennes et israéliennes passe pour avoir permis de déjouer des dizaines d'attentats anti-israéliens. L'Autorité palestinienne y trouverait aussi son compte avec le maintien de la stabilité.

Seulement les Palestiniens n'en peuvent plus de jouer les "supplétifs" des occupants tandis que le Premier ministre israélien s'emploie à "détruire" Oslo, à progressivement dépouiller l'Autorité palestinienne de toute autorité et à pousuivre la colonisation, dit M. Abdulrahmane.

Il y a des mois, rappelle-t-il, que le président Abbas a choisi d'internationaliser la cause palestinienne et de ne plus s'en remettre au schéma - historique mais sanctionné par l'échec - de négociations entre Palestiniens et Israéliens sous les auspices des Américains.

Les Palestiniens ont tenté fin 2014 d'obtenir une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU fixant un terme à l'occupation, ils ont demandé début 2015 leur adhésion à la cour pénale internationale avec l'intention proclamée de poursuivre les dirigeants israéliens pour crimes de guerre; à présent, ils décident de rompre la coopération sécuritaire. A chaque étape, ils ont fait ce qu'ils avaient dit, insiste le dirigeant de l'OLP.

L'adhésion à la CPI - menace ancienne elle aussi - passait déjà pour l'une des dernières cartes d'un président Abbas affaibli et vieillissant. Avec la décision du Conseil central de l'OLP, la fin de coopération sécuritaire devient "une vraie option", dit un diplomate occidental sous le couvert de l'anonymat. Il estime aussi que les choses peuvent très bien rester en l'état "pendant des mois".

Nathan Thrall, expert à l'International Crisis Group, abonde: la menace d'une rupture de la coopération est désormais "crédible", mais elle figure parmi un certain nombre d'autres résolutions de l'OLP qui ont peu de chances de devenir des réalités prochaines, note-t-il.

Les autorités israéliennes se sont gardées de tout commentaire officiel vendredi.

Mais l'Autorité palestinienne joue peut-être plus gros qu'Israël, estime Yaacov Amidror, ancien conseiller à la sécurité nationale de M. Netanyahu.

En 2012 ou 2013, la très grande majorité des individus arrêtés sous l'accusation de terrorisme en Cisjordanie l'ont été par les autorités israéliennes, pas palestiniennes, dit-il. "Le gros problème, (ce serait) le maintien de l'ordre. Si ça, ça s'arrête, ce sera le chaos en Cisjordanie", ajoute-t-il, notant que cela serait surtout très problématique pour les Palestiniens, et beaucoup moins les Israéliens.

"Notre intention n'est pas d'arriver au point de non-retour, dit M. Abdulrahmane, de l'OLP, "cela dépendra de ce que l'autre partie a à nous donner".

Cela vaut pour le gouvernement de M. Netanyahu ou celui qui lui succédera, poursuit-il. L'avis communément partagé des membres du comité exécutif de l'OLP est d'attendre au moins les élections israéliennes, indique-t-il.

Mais les experts se montrent plus que réservés sur une chance de reprise des efforts de paix après les élections israéliennes, quel que soit le gouvernement.

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