Publicité

Sur le fil, Nétanyahou forme son gouvernement

Benyamin Nétanyahou mercredi soir, annonçant un accord avec le Foyer juif, lors d'une conférence de presse à la Knesset, à Jérusalem. GALI TIBBON/AFP

L'extrême droite israélienne s'impose comme un partenaire de la coalition.

Correspondant à Jérusalem

Tout ça pour ça… Benyamin Nétanyahou, qui a provoqué les élections anticipées du 17 mars en espérant se débarrasser d'alliés encombrants et accroître ainsi sa marge de manœuvre, devra se contenter d'une fragile majorité. Arrivé au terme des 42 jours alloués par la loi fondamentale israélienne, le chef de file du Likoud avait jusqu'à minuit, mercredi, pour boucler sa coalition. Sur le fil, il a conclu un accord avec le Foyer juif, qui s'impose ainsi comme un partenaire majeur. Cette formation d'extrême droite, proche des colons et résolument opposée à la solution des deux États, hérite des ministères de la Justice, de l'Éducation et de l'Agriculture, ainsi que d'un vice-ministère de la Défense. Son chef de file, Naftali Bennett, siégera au cabinet de sécurité. Quant au premier ministre, sorti grand vainqueur du scrutin en dépit de sondages qui lui prédisaient un revers, il devra se contenter du soutien de 61 députés sur 120.

Son conte de fées électoral, terni par de fastidieuses négociations avec ses partenaires centristes et ultra-orthodoxes, a viré au cauchemar, mardi, lorsque Avigdor Lieberman a, contre toute attente, renoncé à intégrer la coalition. «D'empereur, Benyamin Nétanyahou s'est subitement transformé en canard boiteux », s'amuse Ben Caspit, l'éditorialiste du quotidien Maariv. Privé des six députés élus dans le sillage de son vieil allié ultranationaliste, «Bibi» s'est en effet retrouvé à la merci du Foyer juif. Une divine surprise pour cette formation qui a obtenu un résultat électoral décevant et dont le chef, Naftali Bennett, a été traité comme quantité négligeable tout au long des négociations. «Le retrait de Lieberman l'a miraculeusement remis en selle, remarque Tamar Hermann, professeur de science politique à l'Université ouverte d'Israël, et son pouvoir de négociation s'est, l'espace de vingt-quatre heures, trouvé démultiplié.»

Dopé par ce coup de théâtre, Naftali Bennett a obtenu mercredi le portefeuille de la Justice pour la jeune députée Ayelet Shaked, qui milite pour la limitation des pouvoirs de la Cour suprême et veut s'attaquer au financement d'ONG jugées anti-israéliennes. «La nommer au ministère de la Justice, c'est comme choisir un pyromane pour diriger une caserne de pompiers », estime Nachman Shai, député de l'Union sioniste (centre gauche). Selon des sources proches du premier ministre, la nomination des magistrats ainsi que des juges rabbiniques pourrait toutefois échapper à son contrôle.

Un soutien monnayé

En dépit des 30 sièges remportés le 17 mars, qui consacrent la domination du Likoud sur la Knesset, Benyamin Nétanyahou avait déjà dû céder beaucoup à ses autres partenaires pour les convaincre de rejoindre sa coalition. Le centriste Moshe Kahlon, dont le parti, Koulanu («tous ensemble » en hébreu), s'est rendu indispensable en empochant 10 mandats, devrait contrôler les ministères des Finances, de l'Environnement et de la Construction ainsi que l'Autorité foncière israélienne. Il espère ainsi être en mesure de mener à bien la vaste réforme de l'immobilier promise à ses électeurs.

Les deux formations ultra-orthodoxes, tenues à l'écart du précédent gouvernement, ont également su monnayer leur soutien. Judaïsme unifié de la Torah, qui représente les religieux ashkénazes, a obtenu l'enterrement des réformes portées par Yaïr Lapid durant la dernière législature. Les étudiants de séminaire talmudique, qui refusent d'effectuer leur service militaire, ne feront pas l'objet de poursuites. Benyamin Nétanyahou s'est par ailleurs engagé à rétablir les allocations familiales supprimées depuis 2013 ainsi que les subventions versées aux yeshivas qui refusent d'enseigner les matières générales. Le parti Shass, qui représente les ultra-orthodoxes séfarades, a pour sa part décroché le ministère des Affaires religieuses. «Nétanyahou est en train de vendre le pays aux haredim », s'est insurgé Yaïr Lapid, dont la croisade contre les privilèges des religieux se trouve réduite à néant. Tout laisse penser que le gouvernement Nétanyahou IV campera sur les positions de ses prédécesseurs en ce qui concerne le conflit israélo-palestinien. Le premier ministre, dans la dernière ligne droite de la campagne électorale, s'était déclaré opposé à la création d'un État palestinien. Il est depuis revenu sur ses propos, mais cette volte-face ne semble guère convaincre l'Administration américaine, qui a menacé de «réévaluer » son soutien à Israël. Le retour en force de Naftali Bennett ne devrait guère contribuer à la rassurer. Le chef du Foyer juif milite pour l'annexion unilatérale de la zone C, qui représente 60 % de la Cisjordanie, ainsi que pour l'adoption d'une loi consacrant le caractère juif de l'État d'Israël. Tout un programme qui ne devrait guère simplifier la tâche des diplomates israéliens.

Sur le fil, Nétanyahou forme son gouvernement

S'ABONNER
Partager

Partager via :

Plus d'options

S'abonner
20 commentaires
  • Allegra Fausto

    le

    Monadine, la reine de Jordanie, Rania, est en effet palestinienne. Et alors ? La reine d’Espagne est grecque.
    La reine de Suède est allemande.
    La princesse de Monaco, Charlène, est sud-africaine.
    Le mari de la Reine d’Angleterre est greco-danois. Les rois et reines se marient souvent avec des étrangères. C’est le cas du roi de Jordanie, tout comme de très nombreux autres souverain(e)s dans le monde.

  • Allegra Fausto

    le

    Tzophe, les colonies israéliennes en Cisjordanie et à Jerusalem Est, en territoire palestinien, violent le droit international et sont illégales. Les israéliens qui vont vivre dans les colonies savent parfaitement qu’ils entrent dans l’illégalité et qu’ils devront tôt ou tard en partir et rentrer en Israël, tout comme les colons anglais ont quitté l’Inde ou les colons français l’Algérie.

  • peutz yaeger

    le

    Je suis extrêmement perplexe quand je vois qu'un pays à la pointe de l'évolution scientifique est encore assujetti aux forces religieuses au point de leur accorder des privilèges .Décidément le monde est en pleine involution avec ce retour en force de l'irrationnel .

À lire aussi