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Le traumatisme de l'Holocauste se transmet génétiquement

D'après les résultats d'une étude, les enfants de survivants de l'Holocauste ont développé un stress supérieur aux autres.

Barbara Doniecka, une des survivantes d'Auschwitz, en janvier 2015 (REUTERS/Kacper Pempel)
Barbara Doniecka, une des survivantes d'Auschwitz, en janvier 2015 (REUTERS/Kacper Pempel)

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Guardian, Biological psychiatry

Y-a-til une mémoire génétique de l'holocauste? Si la question a été maintes fois posée, sans jamais obtenir de réponse scientifique nette, c'est désormais chose faite. En tout cas, c'est ce que semble conclure une étude, à haut potentiel polémique, menée par une équipe de l'hôpital new-yorkais Mont-Sinaï. Le résultat de l'étude menée par Rachel Yehuda a été publié dans la revue Biological Psychiatry et relayé par le Guardian.

Elle conclut, sans équivoque, que les traumatismes liés à l'Holocauste se transmettent génétiquement aux générations suivantes. Autrement dit, l'étude entérine la très controversée épigénétique: soit l'idée que les gènes peuvent être influencés par l'environnement et l'histoire individuelle et donc se transmettre génération après génération.

Marqueurs génétiques

L'équipe de chercheurs a réuni 32 hommes et femmes juifs, qui ont tous été enfermés dans des camps de concentration nazis, ont été témoins ou victimes de torture, ou ont dû fuir pendant la Seconde Guerre mondiale. Leur gènes, ainsi que ceux de leurs enfants, tous atteints de stress et de troubles anxieux, ont été analysés et comparés à ceux de juifs qui n'étaient pas eu Europe au moment de la Shoah. 

À notre connaissance, c'est la première démonstration de la transmission transgénétique des effets d'un traumatisme

L'équipe s'est particulièrement penchée sur les aspects génétiques de la réponse générale au stress et les conclusions sont sans appel: «Les modifications génétiques observées sur les enfants de survivants ne peuvent être attribuées qu'à l'exposition à l'holocauste de leurs parents.»

Ils ont trouvé des marqueurs génétiques identiques entre survivants de la Shoah et leur enfants, sans jamais identifier de correlation similaire dans l'autre groupe.

Ce qui signifierait donc que le traumatisme laisse une empreinte biologique, au-delà de la mémoire transmise par les récits et l'éducation. 

«S'il y a transmission de traumatisme, elle se fait via un gène lié au stress qui façonne la manière dont nous faisons face à notre environnement, a déclaré Rachel Yehuda. À notre connaissance, c'est la première démonstration de la transmission transgénétique des effets d'un traumatisme, quand les deux parents ont été exposés.»

Un précédent chez les animaux

En revanche, l'étude n'est pas très claire sur la manière dont le traumatisme se transmet malgré la supposée étanchéité entre le patrimoine génétique et l'exposition environnementale et familiale.

Néanmoins, une étude, publiée par la reuve Nature en 2013, et citée par le Guardian, a déjà démontré que la peur peut être génétiquement transmissible chez l'animal. Les chercheurs avaient contraint des souris à craindre l'odeur de fleurs de cerisiers en la couplant à des décharges electriques. Les souris, nées des souris impliquées dans la première expérience, se sont montrées terrorisées par l'odeur, sans y avoir jamais été exposées auparavant.

Reste à savoir maintenant dans quelles proportions la vulnérabilité ou la résilience dépendent du facteur génétique et de l'exposition des parents à un traumatisme. 

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