Obama et Netanyahou ont arrondi les angles. Pour reprendre le chemin de la paix?
Après la visite du Premier israélien à Washington, le président américain a peut-être encore une chance de mettre la pression sur Israël pour qu’il reprenne les négociations de paix avec les Palestiniens.
- Publié le 10-11-2015 à 22h43
- Mis à jour le 10-11-2015 à 22h44
Barack Obama et Benjamin Netanyahou se sont efforcés, lundi lors d’une visite officielle de ce dernier dans le bureau ovale, d’arrondir les angles qui se sont accumulés ces dernières années. La plus aiguë de ces divergences de vue entre le président américain et le Premier ministre israélien concernait la conclusion d’un accord sur le nucléaire iranien, finalement intervenue en juillet dernier -une "erreur historique" pour Benjamin Netanyahoun, qui l’avait combattue jusque devant le Congrès de Washington, mais une ligne maîtresse du bilan de l’administration Obama. Mais l’heure n’est plus aux "différends sur cet accord", a déclaré M. Netanyahou, préférant pointer désormais "un intérêt commun à empêcher l’Iran de violer l’accord qui a été signé" ainsi qu’une coopération sécuritaire bilatérale à renforcer, en particulier sur le plan du renseignement. Israël craint que la levée totale des sanctions financières et économiques prises à l’égard de l’Iran ne permette de renforcer les groupes armés appuyés par Téhéran, au premier rang desquels le Hezbollah libanais et le Hamas palestinien, ennemis jurés d’Israël. Et comme pour illustrer cette menace, la sécurité israélienne a démantelé, mardi à Qalqiliya, une cellule du Hamas qui était en train de reprendre pied en Cisjordanie.
Le président américain a quant à lui condamné fermement "la violence palestinienne contre des citoyens israéliens innocents" et redit sa "conviction profonde qu’Israël a non seulement le droit mais l’obligation de se défendre". Il a ajouté que M. Netanyahou, qu’il voyait pour la première depuis treize mois, est le dirigeant qu’il a rencontré le plus fréquemment, ce qui témoigne selon lui du "lien extraordinaire entre l’Amérique et Israël". Le Premier ministre a apprécié, estimant que la rencontre était l’une des "meilleures" qu’il ait eue avec le Président.
Ce savant exercice d’amabilités réciproques a permis à chaque partie de se rassurer alors que la situation sécuritaire d’Israël reste soumise à de nombreuses incertitudes. Outre la menace virtuelle de l’Iran, l’Etat hébreu fait face à voisinage immédiat des plus instables avec l’expansion de Daech et l’intervention militaire russe en Syrie, et aussi avec cette troisième intifada qui ne dit pas nom mais qui fait beaucoup de victimes sur son sol et dans les Territoires : septante-sept Palestiniens et dix Israéliens ont trouvé la mort depuis près de six semaines dans une vague de violences qui se manifeste surtout par des agressions au couteau de la part de Palestiniens, créant une psychose dans la population juive. Benjamin Netanyahou a souligné la nécessité de développer "des moyens pratiques pour faire baisser la tension, accroître la stabilité et se diriger vers la paix", ajoutant qu’il restait "engagé dans la voie d’une paix à deux Etats". Barack Obama a estimé que les actes étaient plus importants que les paroles, tout en exprimant sa déception de n’avoir pas pu faire avancer le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens.
Les prochaines négociations concernant le renouvellement du plan décennal d’assistance militaire américaine à Israël pourraient constituer une dernière occasion pour l’administration Obama -dont le mandat échoit dans un peu plus d’un an- de mettre un peu de pression sur Israël. L’Etat hébreu, qui voudrait voir l’aide militaire annuelle passer de 3 milliards de dollars à 4 voire 5 milliards de dollars, pourrait se voir demander en contre-partie un engagement sans faille vers la conclusion d’un accord de paix, qui passerait par des concessions. "Tout va dépendre des priorités d’Obama", estime Valentina Morselli, politologue et spécialiste d’Israël à l’ULB, ajoutant que la question de l’assistance militaire est en lien étroit avec le contexte régional. "Même si l’avancement du processus de paix est l’un des objectifs d’Obama, la pression qu’il décidera d’exercer sur Netanyahou dans ce domaine dépend également de la priorité accordée aux autres objectifs de pacification et sécurité de la région". Reste l’inconnue de la présidentielle américaine de l’an prochain et d’une éventuelle continuité de la politique de l’actuelle administration en la matière. "A ce stade, Netanyahou n’a donc pas vraiment d’intérêt à se presser à accepter un accord qui ne le satisfait pas", note Mme Morselli, tout en précisant que la situation peut bien entendu évoluer selon les événements dans la région et dans les deux administrations.