Boire & manger

La symphonie sensuelle et magique du caviar d’élevage

Transformer la matière première issue des poches d’esturgeons, c’est un art qui met en œuvre tous les sens. Tout comme le résultat.

Armen Petrossian dans son laboratoire | Avec l’aimable autorisation d’Armen Petrossian
Armen Petrossian dans son laboratoire | Avec l’aimable autorisation d’Armen Petrossian

Temps de lecture: 4 minutes

Le caviar a eu comme mer nourricière la Caspienne, où les esturgeons, Osciètre, Beluga, Sevruga, se sont reproduits durant des siècles et ont donné des œufs gris-noirs que de grands artisans comme les frères Petrossian ont su dans les années 1920 sélectionner, travailler, mettre en boîte selon un savoir-faire ancestral.

Cette famille, titulaire de concessions de pêche dans la Caspienne, a su transmettre l’esprit fait main, la haute couture des caviars élaborés par le descendant actuel, Armen Petrossian, le patriarche et l’héritier du processus secret qui transforme la matière première issue des poches d’esturgeons: tout un art qui met en œuvre tous les sens.

La maison Petrossian sélectionne toute l’année des caviars venus de multiples pays producteurs d’œufs d’esturgeons. Comme on le sait, les caviars Beluga, Osciètre, Sevruga (des types d’esturgeons) ne proviennent plus de la mer Caspienne, où la pêche est désormais interdite et le braconnage puni de peines de prison par la Fédération de Russie.

Depuis 1998, les caviars, qui n’ont pas de terroir unique, sont issus d’une centaines de fermes d’élevage réparties sur le globe: en Charente-Maritime, en Sologne, en Vénétie, en Bulgarie, sur les rives du Danube (le Beluga Huso huso), en Californie (l’Alverta transmontanus) sur le fleuve Amour, près de la Chine pour le shrenki, au Moyen-Orient, en Israël, et près de Shanghai.

Plus de vingt-sept espèces d’esturgeons ont été recensées dont le Baeri (esturgeon sibérien), proposé par Petrossian depuis 1998 et par d’autres producteurs, qui ont participé activement à l’essor et à la qualité actuelle des caviars d’élevage, notamment en France pour les qualités contemporains.

Poches de grains noirs

Comment choisir de beaux caviars produits à partir d’esturgeons femelles? Il faut huit à dix ans pour qu’un esturgeon livre des poches de grains noirs bruts.

Dés de saumon et fleurs de caviar | Avec l’aimable autorisation du restaurant Petrossian

Comment procèdent Armen Petrossian et ses équipes de «caviarologues»? Le parfum des grains se hume, l’œil observe la brillance, la couleur est plus ou moins noire ou grise, la texture se juge sur un grain de caviar entre deux doigts, l’oreille est attentive quand le caviar remué chante, et enfin le palais goûte, on fait rouler les grains sur la langue, ce qui détermine les arômes et la longueur en bouche.

Le parfum des grains se hume, l’œil observe la brillance, la couleur est plus ou moins noire ou grise, la texture se juge sur un grain de caviar entre deux doigts, l’oreille est attentive quand le caviar remué chante, et enfin le palais goûte

Tous ces éléments de dégustation figurent dans les méthodes de sélection Petrossian. La provenance ne joue guère: les goûts, la magie des saveurs, le croquant, le moelleux, la noisette font la symphonie sensuelle des grains –ce qu’ils vont devenir.

Toute l’année, les caviarologues Petrossian évaluent le contenu des boîtes de 1,8 kilo venues des fermes bulgares, américaines, italiennes, chinoises, françaises qui devront maturer dans les ateliers de l’entreprise, proche de Paris.

C’est la mémoire du goût qui forge le savoir-faire de la marque mondiale. Petrossian, présent entre autres à New York, où l’on élabore 15% des 50 tonnes de caviars produits dans le monde: c’est l’Hermès du caviar.

Le rêve pour un grand amateur, c’est une petite cuillère de nacre et une grosse boîte. Les contenants maison vont de 30 grammes à 1 kilo, mais Petrossian peut réaliser des présentations plus importantes –10 kilos– pour des fêtes d’exception.

Sélections impériales et royales Petrossian

Alverta® Royal A. transmontanus. Goût marin, long en bouche, incomparable, caviar de renommée mondiale. 54 euros les 30 grammes, 90 euros les 50 grammes.

Ossetra Royal A. güldenstaedti. D’allure ferme et sensuelle, saveurs amples, beau travail. 72 euros les 30 grammes, 120 euros les 50 grammes.

Alverta® Imperial A. transmontanus (esturgeon blanc). Grains fondants, iodés, longs en bouche, bonne initiation aux sortilèges du caviar. 66 euros les 30 grammes, 110 euros les 50 grammes.

Baeri Impérial de Sibérie. Gris et noir, boisé sans excès, attaque fraîche, pour les fruits de mer. 66 euros les 30 grammes, 110 euros les 50 grammes.

Shassetra® Impérial A. shrenki, élevé à Shanghai, roulant en bouche, ferme, fin, iodé, au goût d’amande. 102 euros les 30 grammes, 170 euros les 50 grammes.

Baeri Royal. Petits grains fermes, fruité, minéral, parfait à l’apéritif. 54 euros les 30 grammes. 90 euros les 50 grammes.

Beluga Impérial Huso huso. Très grand caviar, proche du sauvage de la Caspienne. 294 euros les 30 grammes, 490 euros les 50 grammes.

Caviar Pressé «1835»®. L’ancêtre des caviars, réinventé par Armen Petrossian, un concentré de saveurs, intense, plus fort en goût que le caviar traditionnel. 42 euros les 30 grammes, 70 euros les 50 grammes.

Vodka ou champagne? La vodka balaie la bouche et la pétillance du vin blond stimule l’appétit. Il s’agit de rafraîchir la cavité buccale. Au restaurant Petrossian, un beau mariage terre-mer: le tartare de bœuf surmonté de caviar (46 euros). Toute boîte ouverte doit être consommée sans tarder: ce sont des œufs!

Restaurant Petrossian Le 144

144, rue de l’Université 75007 Paris.
Tél.: 01 44 11 32 32.
Menus au déjeuner à 35 euros, et Zakouski à 95 euros.
Fermé dimanche et lundi.

Caviars Prunier

Assiette gourmande chez Prunier | Avec l’aimable autorisation du restaurant Prunier

La maison Prunier produit du caviar français depuis 1872. Émile Prunier, un géant de la restauration moderne, s’était investi dans la pêche en mer du Nord et dans l’élevage de l’esturgeon Baeri, représenté sur les murs et les assiettes de Mathurin Méheut en service dans l’établissement Art Déco de l’avenue Victor Hugo, un grande adresse marine.

L’homme d’affaires et de culture Pierre Bergé a racheté dans les années 1960 l’unique Prunier et les pêcheries artisanales de Montpon-Ménestérol en Dordogne. Cette manufacture d’Aquitaine produit six à sept tonnes de caviar par an, décliné en quatre marques: les caviars Tradition, Paris, Saint-James et Héritage vendus chez Prunier, au Café Prunier et dans les boutiques Caviar House à l’export pour l’Osciètre (117,90 euros les 30 grammes), le Beluga Baeri (214,20 euros les 30 grammes). Des œufs d’esturgeons de luxe comme pour l’Héritage, rarissime et hors de prix (285,60 les 30 grammes).

Voici un aperçu des styles et des goûts des trois principales variétés de caviars Prunier:

Le caviar Tradition. Issu de l’esturgeon baeri aux arômes de noisette, frais, rond, ferme, bonne longueur. 65 euros les 30 grammes. 108 euros les 50 grammes.

Le caviar Paris. Grains plus clairs, beurrés, peu salés, brillants, séduit les dames. 119 euros les 30 grammes. 198 euros les 50 grammes.

Le caviar Saint-James. Créé en 1935 à Londres pour le restaurant Prunier. Attaque vive en bouche, rond, puissant, excellent produit. 119 euros les 30 grammes, 198 euros les 50 grammes.

Compagnon de Pierre Bergé, Yves Saint-Laurent, a dessiné la boîte en couleurs de «Love 2016», 270 euros les 125 grammes. Un cadeau collector sidérant de beauté.

Chez Prunier, le chef Éric Coisel compose six plats au caviar dont les pappardelles de Fernando Pensato au caviar Prunier, 45 grammes (65 euros), un bon prix. Menu «Tout Caviar», quatre plats (175 euros).

Prunier

16, avenue Victor Hugo 75016 Paris.

Tél.: 01 44 17 35 85.

Menu au déjeuner à 47 euros.

Fermé samedi et dimanche au déjeuner, et dimanche pour le dîner.

Le site

 

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