Sharko: "Je ne suis pas Mick Jagger, j’adorerais être Patrick Bruel"

Interview > Basile Vellut
Sharko: "Je ne suis pas Mick Jagger, j’adorerais être Patrick Bruel"

Le groupe est de retour avec un nouvel album. Le dernier datait de 2009… Le 23 mars dernier, quelques heures après les attentats de Bruxelles, on n’avait pas trop la tête à poser des questions à David Bartholomé, le chanteur de Sharko, que l’on n’avait pourtant plus croisé en mode groupe depuis des années. Depuis 2009 et Dance on The Beast et une interview bien plombée par le mal-être suintant de tous les pores du natif d’Arlon. Sept ans après le dernier album de Sharko, le quadragénaire a à coeur de partager son retour avec You Don’t Have To Worry.

Entretien d’un écorché vif.

Le titre, en français, Tu n’as pas à t’en faire, sonne étrangement aujourd’hui… Il prend une autre résonance que quand vous l’avez pensé ?

"Avant, il y avait une observation sur le rapport à l’insouciance et essayer des repères de sagesse, d’apaisement et se dire que ça va aller. Je pense aussi sincèrement que ça va aller."

Le pire est derrière nous ?

"Le choix du civisme, de ne pas être sclérosé par la panique et la peur c’est d’avancer."

La musique peut jouer un rôle ?

"Je le pense naïvement. Le mien n’est pas d’avoir de grands discours de politique globale et générale mais plutôt de jouer la carte du divertissement. Avec candeur, je pense que si je peux continuer à apporter des observations ludiques, c’est mon rôle. Les gens ont besoin d’avoir un peu d’énergie positive. Et un véhicule d’énergie qui susciterait l’enthousiasme et certainement pas l’introspection, la tristesse."

L’artiste doit se sublimer pour apporter ça avec les événements bruxellois, le traumatisme du Bataclan…

"Je ne dirais peut-être pas sublimer mais ce matin, avec le contexte, je me sens comme un artisan qui se serait levé à 4h du mat pour faire le pain en se disant qu’il doit apporter sa petite pierre à l’édifice. Le client doit trouver le pain chaud et la vie doit continuer. Et je ne sais pas si c’est se sublimer ça. Continuer en ayant conscience de l’apport qui est le mien, sans prétention, dans le divertissement."

Sept ans à refaire un album de Sharko, c’est long. C’était difficile à lancer ?

"C’était très très lent, très très long. J’étais super exigeant et je ne supportais plus la posture. Dès que je sentais que j’étais dans une posture de mec un peu sexy qui se fait plus jeune qu’il ne l’est vraiment et qui utiliserait des ficelles pour être un peu plus sauvage, rock ou glamour, tout ça je ne supportais plus et je n’arrivais pas à trouver le bon angle pour être en face de moi-même, du discours que je voulais tenir. Je savais difficilement verbaliser ce que j’attendais de moi. Je voulais absolument être en adéquation avec ce que je ressentais au moment où je le ressentais. On a enregistré des heures et des heures de maquettes, de versions. Dès que je sentais que c’était un artifice ou une posture, j’étais accablé. Cela s’est mieux passé quand il y a eu ici et là le sentiment d’être plus honnête avec moi-même, et d’accepter l’âge que j’ai et le statut qu’on a. Je ne serai jamais Muse, je ne suis pas Mick Jagger, je ne suis pas Alice on the Roof ni Justin Bieber. Ni les Kardashian, je suis ce que je suis avec la voix que j’ai, le physique que j’ai."

La musique vous sert de thérapie ?

"J’adorerais être Florent Pagny ou Patrick Bruel, qui ont beaucoup plus de légèreté sans que ce soit une mauvaise chose. J’ai l’impression que je dois mettre beaucoup de concentration, de substance, je me prends beaucoup la tête. Je vois difficilement Jenifer se prendre la tête. Ou Garou."

Cette légèreté, vous n’arrivez pas non plus à l’appliquer dans votre vie en général ? Ou c’est juste au niveau musical ?

"C’est un choix de vie de faire ce métier dans ce secteur maintenant. Si avec cette implication, cette immersion, tu te galvaudes, qu’est-ce qu’il te reste ? Ce n’est pas simple de faire un album, qu’il tienne debout. Si en plus, tu le fais de travers, qu’est-ce qu’il me reste ?"

Sharko, You Don’t Have To Worry (Bandy Bandy)

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...