Bruel : "L’amour du public est presque orgasmique"

Pari réussi pour Delphine, gagnante du concours DH, qui a interviewé Patrick Bruel pour la sortie de son DVD live Barbara.

Pierre-Yves Paque

Pari réussi pour Delphine, gagnante du concours DH, qui a interviewé Patrick Bruel pour la sortie de son DVD live Barbara. " On s’était déjà rencontré furtivement et il m’a reconnue, c’est fou !", n’en revenait toujours pas la Namuroise - qui fêtait ses 40 ans ce lundi et qui "ne les faisait pas" selon Patrick Bruel - à la sortie de l’interview dans le cadre vintage de L’Archiduc à Bruxelles, ce lundi midi. "C’est vrai qu’il y a des visages familiers, des figures que je connais en Belgique , confirme le chanteur français. Des gens qui se déplacent, même parfois dans des concerts très isolés. Il y a une communauté belge très fidèle !"

Même si elle s’est estompée un peu avec les années, la Bruelmania est donc toujours bien présente ?

"Oui mais ce sont uniquement des témoignages d’affection et il ne faut pas avoir peur de l’affection. De quelque chose qui devient incontrôlable oui, mais là, tout va bien. Y a pire dans la vie !"

Avec votre tournée hommage à Barbara, avez-vous justement créé un autre rapport avec votre public ?

"Pas un autre rapport, plutôt une continuité. Il y a une relation qui s’installe depuis très longtemps. Le public a toujours été très réceptif et a toujours eu la bonne attitude par rapport à mes projets. Il était plus difficile de s’entendre en 1980 mais quand je chantais Jeff, plus une mouche ne volait. Barbara, c’est une proposition différente et un autre effort d’écoute. Pour beaucoup, c’est comme si c’étaient de nouvelles chansons d’un nouvel album. Ce qui a ouvert un public différent qui ne me connaissait pas. Mais ce public a pu plus facilement faire connaissance avec moi vu que je me raconte plus. Ce spectacle-ci est plus proche de moi. Paradoxalement, vu que c’est une dame. Mais pour raconter Barbara, je devais raconter ma mère, mes rêves, mon adolescence et mon enfance. La douleur d’enfance. Même si moi, c’était juste de l’absence et du manque, elle, elle a vécu une véritable tragédie. Cela n’avait rien à voir mais cela permettait de faire le lien."

Après la Dame en Noir et Michel Delpech (La fille avec des baskets), le prochain sera notre Jacques Brel national ?

"Depuis le début, j’hésitais justement entre les 3 B, Brel, Brassens et Barbara. À un moment donné, je voulais même faire les trois sur le même disque. Brel et Brassens sont même beaucoup plus connus que Barbara. Je ne le savais pas. Je pensais qu’elle était égale alors qu’elle l’était plus par des aficionados ou des passionnés comme moi."

Quand vous montez sur scène et que vous avez ce nombre incalculable de personnes qui scandent votre nom, il doit y avoir quelque chose d’irréel, limite… orgasmique ?

"C’est vrai, l’amour du public est très très fort. Ce qui est assez extraordinaire c’est que ce n’est jamais normal. Jamais lassant non plus car je ne m’y suis jamais habitué. Tous les soirs, je reçois la même charge. Je ne sais pas si des artistes peuvent être blasés de ça, mais moi non. C’est énorme, c’est presque orgasmique oui, c’est très difficile de juxtaposer une émotion juste après celle-là. Mais la vraie vie est quand on descend de scène et on a tendance à penser que la vraie vie est sur scène. On a envie d’y rester car on y est aimé, protégé et salué. C’est un espace pour s’exprimer, un espace de liberté totale où on y fait ce qu’on veut. Une dose d‘amour immense. Cela peut être une drogue à un moment car ça peut manquer. Au départ, on fait tous ça pour être aimés puis on se rend compte qu’on en a jamais assez (sourires) !"

Après tout ce que vous avez déjà réalisé en musique ou cinéma, qu’avez-vous encore envie d’accomplir ?

"Plein de choses ! Dont une très précise dans les deux ans qui viennent… L’envie de tourner avec un bon réalisateur belge, ça, ça me ferait plaisir ! Mais je ne vous dirai pas qui, vous verrez bien (sourire) !"

"J’ai enfin pu approcher l’homme derrière la star"

Bruel : "L’amour du public est presque orgasmique"
©guillaume

Delphine, une fidèle de La DH, émue, se confie après son entretien avec Bruel.

"Merci de m’avoir fait vivre ce moment inoubliable, pouvoir l’interviewer, c’est quelque chose de vachement privilégié, confie Delphine (accompagnée de sa copine Géraldine) qui n’était pourtant pas fan de l’album hommage à Barbara à la base mais qui y a finalement adhéré. Il m’a fallu le temps mais une fois que j’ai compris à quel point cela résonnait dans sa propre vie, c’est logique et cela m’a fort touchée."

Mariée, cette mère de 40 ans - depuis hier, jour J de sa rencontre avec le chanteur - ne cachait pas son stress avant de le rencontrer en chair et en os. "Depuis toujours, je l’écoute, confesse la Namuroise, les joues encore un peu rouges et les mains moites mais ravie de son cadeau. En plus de mon anniversaire, cela fait 10 ans que j’ai été voir son premier concert, c’était une surprise pour mes 30 ans. Une première rencontre qui fut comme un flash. Je me suis dit : ‘un jour, il faut vraiment que je lui parle’. C’était quelque chose de profondément ancré en moi. Je ne sais pas expliquer… à part un sixième sens qui a fait que je suis vraiment entré en connexion avec lui alors qu’on était 15.000 dans la salle!"

Delphine insiste. "J’aime surtout le fait de pouvoir approcher l’homme derrière la star. Et par cette rencontre en toute intimité, il a confirmé tout le bien que je pensais de lui. Un homme intelligent, qui sait où il va, ce qu’il fait, pourquoi il le fait, et c’est ce que j’apprécie beaucoup chez lui. Derrière la bête de scène qu’il est, il est hypersensible et rempli d’émotions. Quand je lui ai posé la question de savoir si Barbara l’avait chamboulé… j’ai moi-même été émue par sa réponse. Car on sent qu’il est allé au-delà des textes, il est allé derrière les mots, dans son histoire et même la sienne à lui."

Bruel? Une bulle d’air pour Delphine que son mari ne saisi pas toujours. "Il ne comprend pas ma Bruelmania, sourit-elle. Mais je lui ai dit que s’il me retirait ce genre de choses, ce n’était plus moi. J’ai besoin de rêve et un peu de folie pour vivre. Si ça n’avait pas été Bruel, je me serais raccroché à un autre. J’ai besoin de cette petite pique d’adrénaline, ce sont des moments qui me font vivre. Alors, une nouvelle fois, encore merci, merci et merci !"

"Ils votent extrême droite par réaction"

De retour d’un tournage de film en Italie, Patrick Bruel a laissé un message engagé sur son compte Facebook à propos du référendum. "J’ai passé deux mois à Rome, à la fois ville touristique, éternelle et le sentiment d’une Italie qui vacille avec de gros problèmes , commente-t-il. Mais je savais que ce non allait passer de manière très forte."

Après les inattendus Brexit et l’élection de Donald Trump, le chanteur de 57 ans - né en Algérie - pense à sa mère patrie, la France, en lice pour de nouvelles présidentielles en 2017. "Ce serait inconscient de ne pas penser qu’aujourd’hui, beaucoup de gens sont à bout et se tournent vers les sirènes populistes qui leur hurlent ce qu’ils veulent entendre, ce qu’ils ont même besoin d’entendre. Beaucoup de gens ne votent pas extrême droite par conviction, mais par réaction. Or, aujourd’hui, c’est la responsabilité des vrais républicains et démocrates de présenter des projets et propositions suffisamment solides pour rassurer ces gens qui sont perdus, déçus et en colère. Les choix populistes, on le sait, n’ont jamais marché nulle part ou alors… à quel prix ! Mais le sursaut du peuple autrichien est rassurant aussi. Ce n’est pas une fatalité que toute l’Europe vire comme dans la fin des années 30."


Bruel Barbara - Live au Châtelet (enregistré le 6 juin dernier) est disponible en 2 CD + DVD et 2 CD + Blu-Ray.


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