Conflit israélo-palestinien: la conférence de Paris demande aux parties d'éviter des "actions unilatérales"

AFP et Belga

Plus de 70 pays ont solennellement réitéré dimanche leur engagement en faveur des deux États israélien et palestinien, avertissant qu'ils ne reconnaîtraient pas d'actions unilatérales qui menaceraient une solution négociée, particulièrement sur la question des frontières ou le statut de Jérusalem.

Dans un communiqué final âprement et minutieusement négocié, les participants à la conférence de Paris ont exhorté Israéliens et Palestiniens à "démontrer leur engagement pour la solution à deux États, et à s'abstenir d'actions unilatérales qui préjugeraient du résultat de la négociation, notamment sur les frontières, Jérusalem, les réfugiés". Le texte précise que si de telles actions étaient prises, "ils ne les reconnaîtront pas".

Ce message intervient dans un contexte particulièrement explosif, alors que la solution des deux États semble plus inatteignable que jamais, près de soixante-dix ans après la création d'Israël et le début du conflit. Il intervient aussi à cinq jours de l'entrée en fonction d'une administration américaine ayant pris des positions très pro-israéliennes.

Le communiqué s'abstient soigneusement de faire référence au projet controversé du futur président américain Donald Trump de transférer l'ambassade des Etats-Unis de Tel-Aviv à Jérusalem, mais il y a "un message subliminal à l'administration Trump", selon un diplomate français.

Le président élu américain a promis durant sa campagne de reconnaître Jérusalem comme capitale d'Israël et d'y déménager son ambassade. Une telle mesure romprait avec la politique historique des États-Unis et irait à l'encontre de la position de l'ONU, pour laquelle le statut de Jérusalem, dont la partie Est palestinienne a été occupée en 1967 puis annexée par Israël en 1980, doit se régler par la négociation.

Les Palestiniens, qui veulent aussi faire de Jérusalem la capitale de leur futur État, ont d'ailleurs vivement réagi, le président Mahmoud Abbas menaçant de revenir sur la reconnaissance d'Israël si une telle décision était appliquée.

Plus direct que le communiqué final, le chef de la diplomatie française Jean-Marc Ayrault a estimé lors de sa conférence de presse que le déménagement de l'ambassade serait une "provocation". Plus tôt, il avait mis en garde contre un projet "extrêmement lourd de conséquences". Il a également réitéré que "la base" de règlement du conflit était "les frontières de 1967 et les grandes résolutions des Nations unies", se référant ainsi aux textes appelant Israël à se retirer des territoires occupés après la guerre des Six jours en 1967.

De son côté, le secrétaire d'État américain John Kerry s'est félicité d'un texte "équilibré", qui dénonce les actes et les incitations à la violence côté palestinien. Il a également confirmé qu'il avait parlé dimanche au téléphone avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour le "rassurer". M. Netanyahu n'a de cesse de dénoncer l'initiative française, qualifiée d'"imposture" ou de "futile".

Les Israéliens et les Palestiniens, dont les négociations sont gelées depuis près de trois ans, n'étaient pas conviés à la conférence de Paris. Si les Palestiniens sont en faveur de l'internationalisation du conflit, les Israéliens sont eux violemment opposés à toute approche multilatérale du dossier et le gouvernement Netanyahu n'a pas caché compter ardemment sur l'arrivée de M. Trump au pouvoir.

Dans un tel contexte, la réunion de Paris valait surtout pour le symbole, à un moment où la perspective de deux États s'évapore, compte tenu de la situation sur le terrain, marquée par la poursuite de la colonisation israélienne et les attaques et attentats palestiniens. Elle était aussi le dernier acte d'une série de gestes remarqués sur la question israélo-palestinienne, dont le plus important s'est produit à l'ONU le 23 décembre.

Un mois avant son départ de la Maison Blanche, l'administration du président sortant Barack Obama a en effet marqué le coup en s'abstenant sur une résolution condamnant la colonisation israélienne, la première depuis 1979. Au grand dam du président élu Trump qui avait exhorté Washington à mettre son veto.

Quelques jours plus tard, dans un discours en forme de testament politique, John Kerry avait à nouveau dénoncé la colonisation et énoncé des principes pour la solution du conflit, évoqués dans le communiqué final de la conférence de Paris.

Une nouvelle conférence internationale "avec les participants qui le souhaitent" se réunira d'ici à la fin de l'année pour faire le point sur les avancées du processus, indique aussi le communiqué final.

Les Palestiniens se félicitent des décisions de la conférence de Paris

Le numéro deux de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) a favorablement accueilli dimanche les conclusions de la conférence de Paris sur le Proche-Orient qui, selon lui, "a souligné la nécessité de mettre fin à l'occupation israélienne".

Saëb Erakat a en outre appelé, dans un communiqué, la France "à reconnaître immédiatement l'Etat de Palestine dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme sa capitale" et demandé aux autres participants à la conférence de "reconnaître la Palestine au même titre que leur reconnaissance d'Israël".

Un millier de personnes rassemblées à Paris en solidarité avec Israël

Mille personnes, selon la police, se sont rassemblées dimanche à Paris à l'appel d'institutions juives françaises pour protester contre la tenue concomitante dans la capitale d'une conférence internationale sur le conflit israélo-palestinien en l'absence des parties concernées. "Nous sommes venus dire que personne ne pourra imposer à l'État d'Israël un statut autre que celui qu'il s'est délibérément et démocratiquement choisi et (...) que la paix ne pourra être l'aboutissement que de négociations directes, comme cela a été le cas avec l'Égypte et la Jordanie", a déclaré Francis Kalifat, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) à l'initiative de ce rassemblement, tenu à une dizaine de mètres de l'ambassade d'Israël.

"Comment être aveugle au point de ne pas comprendre que c'est la même haine qui a tué à Nice, qui a tué à Berlin et qui tue à Jérusalem quatre jeunes de 20 ans ?", s'est-il interrogé, faisant allusion à l'attaque au camion du 8 janvier. "Ce qui fera avancer la paix, c'est quand on dira aux Palestiniens qu'ils doivent arrêter la terreur, reconnaître l'État d'Israël comme État juif" et Jérusalem comme sa "capitale une et indivisible", a estimé de son côté Joël Mergui, le président du Consistoire central israélite de France.

Pourtant très critique envers l'initiative diplomatique française, un député de droite, Pierre Lellouche, s'est fait huer par une partie de la foule quand il a évoqué son attachement à la "solution de deux États".

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...