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Joseph Joffo : Un sac de billes, son «bâton de maréchal»

Joseph Joffo à Bruxelles en mars 2017. Le Figaro l'avait rencontré à l'occasion de l'adaptation d'Un sac de billes avec Elsa Zylberstein et Patrick Bruel sur le tournage d' «Un sac de billes», de Christian Duguay. DPA/ABACA

INTERVIEW - Lors de l'adaptation du best-seller Un sac de Billes, le mercredi 18 janvier 2017, l'écrivain, qui vient de s'éteindre aujourd'hui à l'âge de 87 ans, se confiait au Figaro. Il revenait sur sa vie de petit juif pendant l'Occupation. Nous republions cette interview dans son intégralité.

LE FIGARO - Vous êtes-vous reconnu dans le film de Christian Duguay, Un sac de billes, qui raconte votre enfance entre 1941 et 1944?

Joseph JOFFO - Ces images de mon enfance sont ma récompense, mon bâton de maréchal. Quand j'ai vu Patrick Bruel dans le rôle de mon père, j'ai eu l'impression de le retrouver. Tout comme Elsa Zylberstein, dans le rôle de ma mère. Elle était comme ça. J'ai retrouvé l'esprit de l'époque, les scènes clé, les décors, la relation avec mon frère, tout. Dans les années 70, il y avait eu un premier film de Doillon sur Le sac de billes. Mais ni Maurice ni moi ne nous étions retrouvés dans cette version-là. Le curé qui nous avait sauvés dans le train était montré comme un poivrot, pas très aimable. C'est un comble!

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D'un livre autobiographique à un film, il y a souvent des raccourcis. C'est le jeu, non?

Christian Duguay nous a associés au projet, il voulait qu'on s'y retrouve. Mais je sais bien qu'il ne faut pas trop compliquer un scénario, sinon cela ne fonctionne plus. Par exemple, mes deux frères aînés et ma mère ont été arrêtés en avril 1944, puis déportés dans le camp de Drancy. Ils y sont restés jusqu'en août. Ils ont été libérés grâce aux faux papiers de ma mère, qui en faisaient MarKoff, prétendument descendante des Romanov - et donc, une catholique. Mais on ne pouvait pas tout raconter. De même, nous n'avons pas parlé de mes trois sœurs qui étaient mariées et également cachées. Certains détails manquent ici ou là. À l'hôtel Excelsior de Nice, où nous avons été détenus pendant un mois en 1943, le SS dit à Maurice: «Petit, si tu ne reviens pas d'ici 48 heures avec vos certificats de baptême, on coupera ton petit frère en morceaux». Dans le film, il se contente de dire: «on le tuera», cela faisait plus véridique.

Une photo prise le 4 mars 1974 à Nice montre l'écrivain français Joseph Joffo devant des enfants jouant aux billes. RALPH GATTI/AFP

« On me voit monter sur la table en clamant: « Je suis juif ! »

Joseph Joffo

De même, à la libération à Rumilly on voit le père Mancelier, un libraire pétainiste chez qui je travaillais, se faire casser la figure. On me voit monter sur la table en clamant: «Je suis juif!». Ce que l'on ne montre pas, c'est qu'il en a fait une crise cardiaque. Ensuite, je suis allé à l'hôpital pour témoigner en sa faveur. Il avait fait Verdun, il croyait au maréchal. Il était juste un peu bête. Son fils, en revanche, était un milicien, un vrai con.

Qu'en a pensé votre frère, qui n'a pas co-écrit le livre avec vous?

Maurice a toujours été sur la réserve sur cette période. Il n'avait pas envie de remuer tout cela. Mais il m'a laissé faire. Car avec mon frère, même si cela n'a pas toujours été un long fleuve tranquille, c'est une formidable histoire d'amour. Récemment, je lui ai dit: «''C'est formidable que tu sois venu me rechercher à l'hôtel Excelsior''. Il m'a répondu: ‘‘je n'aurais pas pu vivre sans mon petit frère''. Moi aussi je sais que je n'aurais pas pu vivre sans lui.

Joseph Joffo : Un sac de billes, son «bâton de maréchal»

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35 commentaires
  • PaixDuMonde

    le

    Dans un long métrage, Il arrive qu'un acteur mal choisi enlève toute la magie de cette histoire triste et touchante que j'ai du lire une bonne dizaine de fois...

  • ambidextre

    le

    Bâton de Maréchal, vraiment? Oy oy oy...

  • COMMUNE

    le

    On en a marre d'entendre parler de la "religion" de quelqu'un, ce n'est que du bourrage de mou. On vient de parler de la vente d'une lettre de A. Einstein (son frère Franck, avait fait du cinéma), où il disait être fier d'être juif, mais ne pas croire en Dieu.
    Alors de qui se moque-t-on ? Chez les Juifs, Chrétiens et autres "gens du livre", il y a des gens qui le sont de façon héréditaire, mais qui n'éprouvent pas le besoin de faire pour autant braire le monde. Et aussi les bigots, extrémistes, punaises de sacristie, et autres grenouilles de bénitier ; ceci dans toutes les religions. Donc ce dont on veut entendre parler, sont les gens de "bonne volonté", pas des aberrants qui se raccrochent à des légendes vieilles de 2000 ans ou plus, pour se faire mousser. Nous sommes au XXIème siècle, que diable !

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