USA: Le transfert d’ambassade à Jérusalem, une simple formalité
- Publié le 21-01-2017 à 09h15
- Mis à jour le 21-01-2017 à 10h46
Donald Trump peut tenir sa promesse grâce à une loi de 1995. Du moins, sur papier.Donald Trump en a fait l’une de ses priorités : il déplacera l’ambassade des Etats-Unis en Israël de Tel Aviv à Jérusalem. La promesse a de quoi déconcerter tous les observateurs de la région car un tel déménagement de la représentation américaine aura forcément des conséquences importantes sur la position officielle des Etats-Unis à l’égard de l’Etat hébreu. Voire sur l’ensemble de la région. Washington reconnaîtrait de facto Jérusalem comme la "capitale indivisible et éternelle" d’Israël, ce que le nouveau président et le nouvel ambassadeur nommé, David Friedman, ont tous deux soutenu.
Afin de prendre au mot Donal Trump, trois sénateurs républicains, dont deux de ses concurrents malheureux dans la course à l’investiture, Ted Cruz et Marco Rubio, ont déposé le 3 janvier un projet de loi appelant M. Trump à reconnaître Jérusalem comme la capitale d’Israël et à procéder au déménagement de l’ambassade. Le projet affirme même : "La politique américaine devrait être de reconnaître Jérusalem comme la capitale indivisible de l’Etat d’Israël, à la fois en droit et de fait."
Mais le nouveau Président a-t-il vraiment le pouvoir de tenir cette promesse ? La réponse est non seulement oui, mais, pour y parvenir, il ne doit absolument rien faire… Contrairement à ses prédécesseurs. Car, depuis plus de vingt ans, tous les présidents américains reportent l’exécution d’une loi de 1995, qui prévoit le déménagement de l’ambassade américaine de Tel Aviv vers Jérusalem.
Un report activé tous les six mois
Adopté par le Congrès le 23 octobre 1995, le "Jerusalem Embassy Act" a pour objet d’engager et de financer le déménagement de l’ambassade. Après des années de débat, cette loi était passée, assortie d’une clause de report, renouvelable tous les six mois, que le Président peut activer s’il juge que "la sécurité nationale des Etats-Unis est menacée". A l’époque, Bill Clinton l’avait activé en début de second mandat.
Une tentative de passer en force avait eu lieu quatre ans après le "Jerusalem Embassy Act", avec un projet qui entendait supprimer la clause de report, mais la situation dans la région ne l’a pas permis. Le 11-Septembre et son chamboulement planétaire a ensuite jeté le projet aux oubliettes. Jusqu’à ce que, aujourd’hui, un président dise qu’il va vraiment procéder à ce déménagement.
Un déménagement déjà balisé
En pratique, le déménagement à Jérusalem est déjà balisé. Un terrain, situé dans la partie ouest de la ville, a déjà été choisi. Il reste à débloquer les 100 millions de dollars prévus à cet effet.
Reste que, ce faisant, les Etats-Unis provoqueraient ce qui pourrait être perçu comme un changement unilatéral du statut de Jérusalem, en porte-à-faux total avec la position des Nations unies. Washington avaliserait aussi l’annexion de l’ensemble de la ville par Israël. La Ville sainte est considérée par l’Onu comme un territoire international, dont le statut final doit faire l’objet de négociations entre Israël et l’Autorité palestinienne. "Cela irait à l’encontre du rôle traditionnel joué par les Etats-Unis dans le dossier israélo-palestinien, puisqu’ils se présentent comme le médiateur de référence dans les négociations de paix", souligne François Dubuisson, professeur au Centre de droit international de l’ULB. En prenant parti de cette manière, Washington risquerait de perdre ce rôle. Non sans instiller un nouveau facteur d’incertitude dans la région.