Michel Boujenah: "Si je n’avais pas fait ce métier, je me serais tué"
- Publié le 23-03-2018 à 18h52
- Mis à jour le 23-03-2018 à 19h33
À 65 ans, l’humoriste franco-tunisien Michel Boujenah reste "un éternel gamin" "Ce métier m’a choisi, ce n’est pas moi qui l’ai choisi", nous confie le comédien Michel Boujenah (Trois hommes et un couffin, notamment) qui sera au Waterlol Festival en septembre avec son nouveau spectacle Ma vie encore plus rêvée. "Si je n’avais ressenti cette force incroyable qui m’a poussé à faire ce métier et que je ne l’avais pas suivie, je pense que je me serais tué. Physiquement ou symboliquement. Je serais devenu médecin comme mon père et je pense que j’aurais foutu ma vie en l’air… Et au moment où je dis ça, j’ai parfois des regrets de ne pas avoir fait médecin. Bref, je pense qu’il faut m’envoyer un psychiatre (sourire) !"
Bien que dans guérir, il y a rire. "Mais on va dire que je fais du bien aux gens quand je les fais rire et j’ai beaucoup d’empathie envers eux, se rassure l’artiste de 65 ans qui n’a jamais pensé à la retraite. Mais je n’avais pas le choix, il fallait que je fasse ça. C’est comme quand vous tombez amoureux. On ne peut pas faire autrement, c’est elle ou rien. Eh bien, c’est ce qui m’est arrivé. Je ne pouvais plus m’échapper de ce métier."
Celui-là même qui vous donne une tribune pour attaquer l’extrême droite… À quand Michel Boujenah en politique ?
"Ah, non, jamais ! Mais c’est marrant que vous dites ça car, il n’y a pas longtemps, j’ai rêvé que j’avais abandonné mon travail d’artiste et que je m’étais lancé en politique. Je devenais député et, très très vite, je me rendais compte que j’avais fait une énorme connerie. Mais que je ne pouvais plus reculer. J’étais dans la merde. Même si dans mes spectacles, je parle plus de politique qu’avant, je n’en parle pas de manière politicienne."
C’est-à-dire ?
"À force de se plaindre, on oublie qu’on vit dans des démocraties extraordinaires. Il y en a à peine 35 dans le monde. Aller faire un spectacle d’humour en Corée du Nord et vous verrez leur tête ! On est dans la merde ici, on souffre, mais on est gâté en même temps. Mais la démocratie, c’est ça aussi. Être gâté dans la merde. La dictature, c’est plus simple, vous n’êtes pas d’accord, on vous tue. La démocratie est l’art du compromis et de la magouille mais aussi de la liberté. C’est d’ailleurs là-dedans qu’on voit le plus d’humoristes. Je ne fais pas rire avec les attentats mais si on arrête de rire, ça veut aussi dire qu’ils ont gagné. Ce n’est pas politique de dire ça, c’est juste humain. Je ne suis pas Coluche ni Guy Bedos."
Ni quelqu’un qui se dévoile dans son intimité alors que le fil conducteur de votre carrière est la famille…
"Non, je ne parle pas de ma vie privée car je n’aime pas ça. C’est important de protéger les miens. Car, eux, ne l’ont pas choisi cette vie… C’est d’ailleurs plus difficile pour mon fils alors que ma fille ça l’amuse. Joseph, à une époque, il ne voulait même pas aller au magasin avec moi. Il voulait aller avec sa mère ou avec ses copains. Ça l’emmerde que les gens viennent me parler. Il n’est pas avec son papa. Par contre, à l’étranger, ça va. Mais je comprends tout à fait ce sentiment et je le respecte. Le plus dur quand on est un personnage public comme moi, c’est le regard des autres."
Ont-ils toutefois la même vocation que leur père ?
"Joseph (20 ans) va faire du cinéma car il suit des cours dans une école de cinéma. Et Louise (18 ans) est plutôt pour les arts plastiques. Mais il est vrai que les chiens ne font pas des chats ! Le fils de Zidane, il fait du foot (sourire) !"
Ma vie encore plus rêvée de Michel Boujenah, le 13 septembre au Waterlol Festival. Infos et réserv. : www.waterlol.be.
"J'ai abandonné ma carrière aux USA"
"Gad Elmaleh le fait très bien mais il est bilingue depuis longtemps", souligne Michel Boujenah qui a été s’essayer au pays de l’Oncle Sam récemment (mais en français). "Gad en mourrait d’envie mais moi, je n’en ai rien à foutre."
Pour preuve, l’humoriste a failli faire carrière aux USA. "En 1984, avant le succès de Trois hommes et un couffin, des Américains sont venus me voir jouer à Paris. Et ils m’ont proposé de vivre à Manhattan, le seul endroit au monde où il y a le plus de juifs qu’en Israël. J’apprenais l’anglais le matin à l’école et je travaillais mon spectacle l’après-midi avec eux pendant un an pour le jouer après. J’étais payé pour ça et c’était un contrat en or. Mais, après quinze jours, je suis rentré. Ce n’était pas pour moi, je voulais rentrer chez moi et c’est pour ça que je n’ai pas fait de carrière américaine. Mais je n’ai aucun regret, je suis très heureux ici et je m’en fous complètement de la notoriété."