Chaud bouillant, le Zénith de Caen scande son nom sur l’air d’« On est les champions », qui s’était raréfié depuis la Coupe du monde 1998. « Il va revenir, il n’a pas chanté Je joue de la musique », pronostique sans grand risque un couple de retraités en gradin. Calogero réapparaît et s’exécute pour un ultime rappel. « Ça vient de je ne sais où/ C’est comme un compteur dans ma tête/ Ça me prend, ça me rend fou/ C’est comme un pick-up dans ma tête ». Slap de basse, pulsation disco, gimmick de guitare funky, plus adhésif que le sparadrap d’Haddock. Et quelque chose de Michel Berger. Le tube clivant de l’été 2017 – exaspérant pour les uns, irrésistible pour les fans – désinhibe les plus sages et métamorphose la salle normande en discothèque géante lors de la troisième date, le 17 mars, du « Liberté chérie Tour ». Un tour de France (avec extensions en Suisse, en Belgique et au Luxembourg) déjà programmé jusqu’en février 2019. Le précédent, en 2014-2015, avait réuni plus de 400 000 spectateurs dans la foulée d’un album, Les Feux d’artifice, vendu à 800 000 exemplaires.
Qu’on se le dise : le patron, aujourd’hui, de la variété pop à la française, c’est lui. Calogero Joseph Salvatore Maurici, 46 ans, successeur de Berger, mort en 1992, et de Jean-Jacques Goldman, dont on reste sans nouvelles discographiques depuis seize ans. Comme eux, il est parvenu à fédérer un public disparate – ni hip-hop, ni hipster, ni métalleux –, mixte, qui traverse les âges. « Il est assez familial, il y a même des gamins de 3-4 ans », se félicite-t-il.
Comme eux, mais dans des proportions infiniment moindres, il a pris part à la légende de Johnny en composant en 2008, avec son frère Gioacchino, la musique de Ça n’finira jamais, une chanson devenue prémonitoire après la mort de l’« Idole des jeunes », le 5 décembre 2017. Sur la route, « Calo » ne manque pas de rendre hommage au « taulier » : la rythmique saccadée façon Lust for Life (Iggy Pop) de Comment font-ils ralentit en blues-rock préparant le terrain au refrain de Gabrielle. Dans la fosse, les mains se joignent, prises par d’invisibles menottes. Prêts à « mourir d’amour enchaîné », les spectateurs prolongent dans la liesse le deuil national.
Homme à tout faire
Contrairement à Berger et à Goldman, le musicien n’a pas eu le loisir d’inscrire à son actif un Rock’n’Roll Attitude ou un Gang, soit un album complet réalisé pour Hallyday. II a pu néanmoins assouvir en 2017 un « rêve de gosse » avec A nos amours, le disque de Julien Clerc accompagnant la célébration de ses cinquante ans de carrière.
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