Face au retrait américain de l'accord sur le nucléaire iranien, impliquant le rétablissement de l'embargo sur Téhéran, comment l'Union européenne peut-elle réagir? Les pays membres et leurs entreprises devront-ils être obligés de quitter le marché iranien sous prétexte que Donald Trump a quitté l'accord? Jean-Yves Le Drian, le ministre des Affaires étrangères, rappelait la position de la France ce 23 mai au micro de France Inter: «Nous sommes tout à fait opposés à ces mesures […] extraterritoriales, on ne se plie pas.»
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Pierre Conesa, ancien haut fonctionnaire du ministère de la Défense, précise les contours de l'embargo américain: «la justice américaine s'est donnée un droit d'extraterritorialité c'est-à-dire qu'elle peut juger de contrats passés avec des pays qui sont sous embargo américain exclusivement, même si ces pays ne sont pas sous embargo européen, parce qu'ils peuvent considérer que c'est porter atteinte au principe de l'embargo décidé unilatéralement par Washington». Et l'ancien haut fonctionnaire de poursuivre sur l'hyperpuissance américaine et ses dérives:
«L'unilatéralisme américain depuis 1991 s'est traduit par deux choses: un mensonge public devant l'assemblée générale de l'ONU pour justifier l'invasion en Irak. Aujourd'hui, vous avez un mensonge public, la dénonciation d'un accord signé par six pays pour dire "cet accord, je le déchire et je suis tout seul à le déchirer" et ça veut dire éventuellement demain une guerre qu'il aurait déclarée unilatéralement dans le même scénario.»
Mais quelle peut être la réaction européenne? Pierre Conesa estime qu'il sera très compliqué d'avoir une position européenne commune:
«Beaucoup de pays européens n'ont pas des intérêts analogues, certains préféreront s'aligner sur les Américains, d'autres vont garder leurs intérêts propres et donc on va dans une période de grand trouble.»
Il considère que des pays de l'Europe de l'Est comme la Pologne ne seront «pas favorables à une position unitaire et dure en Europe.»
«Les Américains ont transformé l'OTAN en Pacte de Varsovie occidental»,
déclare Gil Mihaely, en constatant la brutalité de la méthode américaine, révélant clairement les rapports de force. Néanmoins, le journaliste rappelle l'échéance des élections de mi-mandat aux États-Unis, qui auront lieu en novembre 2018 et où Donald Trump pourrait voir sa marge de manœuvre réduite par les Démocrates.