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« Dis-moi où est l’argent » : l’antisémitisme au cœur d’un procès

Le procès de cinq hommes doit s’ouvrir mardi devant la cour d’assises du Val-de-Marne pour vol, viol et séquestration au domicile d’une famille juive en 2014.

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Publié le 25 juin 2018 à 11h06, modifié le 07 septembre 2018 à 13h51

Temps de Lecture 8 min.

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Quand ils ont poussé la porte et déboulé encagoulés, gantés, ce lundi 1er décembre 2014 à midi, elle a juste eu le temps de crier : « Jonathan ! » Illico, elle s’est vu intimer un « chut ! » brutal. Elle se souvient avoir été plaquée contre un mur, assise sur le canapé du salon, puis traînée avec son compagnon dans la salle de bains. Là, lui s’est vu coller un fusil à canon scié dans la bouche : « Dis-moi où est l’argent ­sinon je te bute (…) on sait que ton père est juif et que vous avez de l’argent ! »

Après quoi, ce fut son tour : « Et toi, t’es quoi ? » Elle a osé la ­vérité : « Rien du tout. (…) Mes parents habitent en Normandie. » Une heure plus tard, elle était malgré tout abandonnée dans une chambre de l’appartement dévasté, pieds et mains liés sur un clic-clac, tee-shirt relevé, à demi étouffée par ses sanglots et le ruban adhésif sur ses lèvres.

Avec son visage rond, ses yeux verts las, Laurine C. sera sans doute la silhouette la plus fragile du procès des auteurs présumés de ce vol devenu viol, à partir de mardi 26 juin, devant la cour d’assises du Val-de-Marne. Elle avait 19 ans en 2014. Ils sont cinq, aujourd’hui, presque de son âge, à être renvoyés des chefs notamment de viol, séquestration, extorsion, violences aggravées et association de malfaiteurs, selon l’enquête judiciaire et l’ordonnance de mise en accusation que Le Monde a pu consulter. Le tout avec la circonstance aggravante d’antisémitisme.

Cinq grands gaillards habitués des après-midi désœuvrés sur les bancs de la Pointe du lac, à Créteil. Laurine C. y avait emménagé un mois plus tôt, chez ses beaux-parents, juifs pratiquants. Elle la Normande timide, ni juive ni athée, juste éprise de leur fils.

« Les envoyés de Mohamed Merah »

Quatre ans après, à Créteil, s’est installée comme une méfiance latente sur les rives de ce quartier populaire bâti autour d’un lac artificiel, prisé d’une petite communauté juive banlieusarde. Aux yeux d’habitants qui ont accepté de se confier, les « braises » ayant conduit au drame sont toujours inflammables. L’annonce, quelques jours après les faits, sur ces mêmes berges, de l’antisémitisme comme « grande cause nationale », par le ministre de l’intérieur de l’époque, Bernard Cazeneuve, n’y a rien changé. On était alors un mois avant l’attaque de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher.

Les affaires Sarah Halimi, en 2017, et Mireille Knoll en mars, ces vieilles dames de confession juive tuées dans des circonstances troubles, à leur domicile parisien, sont aussi passées par là. Autour de ce bassin, autrefois la fosse d’une gigantesque décharge, les promeneurs se sont toujours partagés les berges, sans trop d’encombres, avec le trafic de stupéfiants. L’appartement des beaux-parents de Laurine C., un T4 de location en deuxième étage, donnait lui-même sur une impasse, à deux pas du deal et des cygnes. Mais l’idée que les eaux grises du lac puissent désormais apparaître aux cités voisines – d’où venaient les agresseurs – comme le premier pas vers l’embourgeoisement a fait s’envoler ce que beaucoup appréciaient, justement, à Créteil : l’insouciante tranquillité.

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