Israël durcit son blocus: "Gaza est déjà au bord de l’effondrement"
- Publié le 13-07-2018 à 09h47
Alors que les cerfs-volants continuent de ravager la région voisine de Gaza, l’Etat hébreu réplique par l’asphyxie économique.L’étau du blocus se resserre encore davantage autour de la bande de Gaza. Afin de mettre fin aux cerfs-volants et aux ballons incendiaires lâchés depuis l’enclave palestinienne et qui enflamment les terres israéliennes, l’Etat hébreu choisit d’éviter l’escalade militaire. A la place, il privilégie une stratégie de punition collective en limitant drastiquement l’import-export de biens à Gaza.
Lundi, l’armée israélienne a indiqué que le Premier ministre, Benjamin Nétanyahou, et le ministre de la Défense, Avigdor Lieberman, avaient décidé de "fermer" le point de passage de Kerem Shalom, la seule voie de circulation de marchandises vers la bande de Gaza. Une décision prise "en réaction aux attaques terroristes en cours menées par le Hamas qui exploite et met en danger les habitants de Gaza", précisait-elle.
L’envoi massif de cerfs-volants incendiaires marque la seconde phase de la Marche du retour qui avait rassemblé, depuis le 30 mars, jusqu’à des dizaines de milliers de personnes le long de la barrière entre Gaza et Israël. La mobilisation a chuté après l’épisode meurtrier du 14 mai, pendant lequel les forces israéliennes ont tué une soixantaine de manifestants palestiniens et blessé des milliers d’autres. Depuis, des dizaines de jeunes, affiliés au "comité des cerfs-volants", s’emploient à envoyer ces engins qui embrasent le sol à leur atterrissage dans le sud d’Israël.
Les autorités israéliennes n’ont toujours pas réussi à enrayer le phénomène, artisanal mais dévastateur : selon le ministère de la Défense, 28 000 dounams (2 800 hectares) de champs et de forêts ont déjà été incendiés. Le montant des dégâts est estimé à plusieurs millions de shekels. Sans compter le mécontentement des agriculteurs et des résidents israéliens frontaliers qui reprochent au gouvernement de ne pas agir avec assez de fermeté.
Outre la réduction de la zone de pêche à six milles (11 km) au lieu de neuf (17 km), l’entrée de marchandises se limite donc désormais à la nourriture, au fuel et aux médicaments. Tout le reste est interdit jusqu’à nouvel ordre, ainsi que l’exportation de fruits et légumes depuis Gaza. C’était déjà le cas en 2007 lors de l’instauration du blocus par Israël et l’Egypte, pour mettre sous pression le mouvement islamiste du Hamas qui venait de prendre le contrôle de l’enclave. Les restrictions ont été allégées à partir de 2010.
"Déjà au bord de l’effondrement"
Les deux millions de Gazaouis seront les premiers affectés par la mesure de lundi. "Gaza est déjà au bord de l’effondrement. Cette décision ne fait que verser de l’huile sur le feu en minant un peu plus l’économie gazaouie, notamment le secteur privé", prévoit Mukhaimer Abu Saada, professeur de sciences politiques à l’université al-Azhar de Gaza. En effet, la situation humanitaire à Gaza est catastrophique, du fait du blocus, des coupes budgétaires décidées par l’Autorité palestinienne (Ramallah) en avril 2017 pour faire plier Hamas sur les conditions d’une réconciliation palestinienne, et d’une réduction de l’aide internationale. Dès lundi, le Hamas a dénoncé "un nouveau crime contre l’humanité" par Israël, appelant la communauté internationale à réagir.
Même si des négociations indirectes sont en cours entre les deux protagonistes, l’Etat hébreu espère que le renforcement du blocus aura un effet suffisamment dissuasif sur le Hamas pour qu’il fasse rapidement cesser l’envoi des cerfs-volants. Mais rien ne garantit que la stratégie israélienne ne se solde pas plutôt par un nouvel embrasement de la bande de Gaza.