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Royaume-uni: Corbyn désavoué par une scission au Labour

VIDÉO - Une poignée d'élus travaillistes quittent le parti pour dénoncer sa gestion du Brexit, l'idéologie d'extrême gauche et l'antisémitisme.

Serait-ce l'acte fondateur d'une recomposition de la politique britannique, tant attendue après le séisme du Brexit? À moins qu'il ne s'agisse que d'un hoquet dans la vie parlementaire. L'histoire le dira. Sept députés du Labour ont démissionné de concert, lundi matin, en protestation contre la gestion de Jeremy Corbyn, pour former un nouveau groupe indépendant au Parlement. Ils n'ont pas eu de mots assez durs pour condamner la dérive du Parti travailliste sous sa houlette. Antisémitisme, «complicité» dans le chaos du Brexit, noyautage du parti par son aile gauche, climat d'intimidation et d'agression contre les dissidents à la ligne officielle, trahison des valeurs traditionnelles de la gauche modérée: la liste des griefs est longue.

« J'en suis venue à avoir honte de rester au sein du Labour, et je suis arrivée à la conclusion écœurante qu'il est devenu institutionnellement antisémite. »

Mike Gapes, membre du Labour depuis cinquante ans

Avec une émotion visible, les sept mutins se sont succédé à la tribune d'une salle de conférences de Westminster pour détailler leurs raisons respectives de quitter un navire dans lequel ils ne se retrouvent plus. La députée de Liverpool Luciana Berger a été la cible d'une violente campagne de sa base locale cherchant à la destituer pour avoir dénoncé les attaques antisémites dont elle fait l'objet. «J'en suis venue à avoir honte de rester au sein du Labour, et je suis arrivée à la conclusion écœurante qu'il est devenu institutionnellement antisémite», explique-t-elle, dénonçant la complaisance de sa direction sur le sujet. Mike Gapes, membre du parti depuis cinquante ans, se dit lui aussi «dégoûté de constater que le Labour est devenu un parti raciste et antisémite». «Jeremy Corbyn est du mauvais côté de l'histoire sur tant de questions internationales, dont la Russie, la Syrie ou le Venezuela, estime-t-il. Un gouvernement dirigé par lui menacerait notre sécurité.»

«Nous ne pouvons plus faire campagne pour un parti mené par Jeremy Corbyn. Trop c'est trop!» renchérit Chris Leslie, élu de Nottingham. Le Labour «est noyauté par l'appareil politique de l'extrême gauche», déplore-t-il. Les désaccords dépassent le Brexit. Ils vont de la défiance à l'égard de l'Otan et «l'hostilité envers notre propre pays» à une idéologie de lutte contre des «ennemis de classe» et autres «oppresseurs».

Le plus célèbre des renégats, Chuka Umunna, député de Londres, avait renoncé au dernier moment à se lancer dans la course pour la tête du Labour quand Jeremy Corbyn a été élu en 2015. Depuis le vote pour le Brexit, il mène une inlassable campagne en faveur d'un nouveau référendum, aux côtés d'élus d'autres partis. Il appelle à «faire de la politique autrement» pour réparer un «système cassé».

L'état-major du parti appelle les démission­naires à remettre leur mandat en jeu dans des élections partielles.

Selon les félons, nombre de leurs collègues partagent en silence leur diagnostic. C'est plus ou moins le cas d'une centaine de députés de tendance blairiste, vivant sous la menace d'être écartés par l'entourage de Corbyn des listes de candidatures lors des prochaines élections. Combien seront prêts à franchir le Rubicon? Beaucoup s'interrogent sur les finalités et le timing de la rupture fracassante.

Dans tous les esprits, la précédente scission d'un groupe de dissidents du Labour pour créer le Social Democratic Party en 1981 avait conduit à seize ans de gouvernements conservateurs. Représentante de la nouvelle génération d'élus travaillistes, qui avait quitté l'équipe de direction en désaccord avec Corbyn, Lisa Nandy regrette un «jour horrible pour notre parti». Son chef se dit pour sa part «déçu que ces députés se soient sentis incapables de continuer à œuvrer ensemble pour le programme qui a inspiré des millions de personnes aux dernières élections et nous a permis d'atteindre le plus grand nombre de voix depuis 1945». Bravaches, les jeunes du Labour promettent: «Quand les lâches tressaillent et les traîtres ricanent, nous ferons flotter le drapeau rouge.» L'état-major du parti appelle les démissionnaires à remettre leur mandat en jeu dans des élections partielles.

En miroir à la crise au Parti travailliste, les tories modérés sont furieux de la mainmise des brexiters jusqu'au-boutistes sur Theresa May.

La scission risque de pénaliser les travaillistes au Parlement et lors des prochaines élections, en raison d'un système électoral qui ne laisse aucune place aux petits partis. Les conservateurs modérés tentés de rejoindre les mutins du Labour vont donc y réfléchir à deux fois.

En miroir à la crise au Parti travailliste, les tories modérés sont furieux de la mainmise des brexiters jusqu'au-boutistes sur Theresa May. Mais l'avènement d'un mouvement social-démocrate d'ampleur, réuni au centre de l'échiquier par son opposition au Brexit, semble prématuré. Les quelque dix frondeurs conservateurs notoires vont sans doute préférer attendre de voir comment leur leader gère les dernières semaines cruciales jusqu'à la sortie prévue de l'UE, avant de décider quoi que ce soit.

Royaume-uni: Corbyn désavoué par une scission au Labour

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58 commentaires
  • Lewis78

    le

    Au vu du contexte spécifique britannique actuel, on peut constater quand même la modestie de cette scission.
    J'ai lu qu'Emmanuel Macron était un modèle de ces députés secessioniste.
    Macron a quand même eu la délicatesse de ne pas faire partie du PS avant de lancer son mouvement. Eux ne respectent finalement ni le résultat du référendum, ni les dernières élections parlementaires, ni les élections internes à leur Parti.

  • Jenveupas

    le

    Cela fait un moment que les travaillistes dérivent vers le gauchisme idiot et antisémite

  • Bradito

    le

    Voilà ce qui se passe quand on laisse les extrêmes ronger les esprits.

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