Projet israélien d’annexion en Cisjordanie: faute de soutien international, «une nouvelle intifada» en vue?

© REUTERS / Baz RatnerLa colonie israélienne de Maale Edumim, située en Cisjordanie
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À quelques jours de la déclaration de Benyamin Netanyahou sur son plan d’annexion d’une partie importante de Cisjordanie, la communauté internationale a marqué son désaccord. Mais que peut-elle faire? Frédéric Encel, spécialiste du conflit israélo-palestinien, livre son analyse au micro de Sputnik France.

La communauté internationale a tiré ce 24 juin la sonnette d’alarme au Conseil de sécurité. Hormis les États-Unis, ses membres ont condamné la potentielle –et probable– annexion de la vallée du Jourdain et d’une importante partie de la Cisjordanie.

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Si les détails d’une telle annexion restent flous à quelques jours de son annonce officielle, le 1er juillet, celle-ci reste la promesse phare Benyamin Netanyahou, pris dans un cycle électoral mouvementé en Israël.

En effet, les autorités israéliennes tâtent le terrain depuis quelques semaines en laissant fuiter volontairement de potentiels schémas d’annexion. Ceux-ci vont de la proposition issue du plan de paix du gendre de Donald Trump, Jared Kushner, à ceux, plus radicaux, du Yesha, l’organisation des colons de Cisjordanie. Si l’on ne connaît donc pas la portée de l’annexion à venir, la pression politique intérieure fait qu’elle arrivera certainement sous une forme ou une autre.

​Cette annexion pourrait cependant avoir conséquences désastreuses pour l’une des régions les explosives du monde. C’est ce qu’explique au micro de Sputnik France Frédéric Encel, géopolitologue et spécialiste du conflit israélo-palestinien, auteur de plusieurs ouvrages sur la région, notamment Atlas géopolitique d’Israël. Aspects d’une démocratie en guerre (Éd. Autrement, 2008).

Selon lui, si «les circonstances sont différentes par rapport aux deux premières intifadas –notamment, car la variable économique n’est pas similaire aux soulèvements précédents –, une nouvelle intifada pourrait voir le jour du fait de l’inexistence d’un processus de paix, mais également de l’abandon des “frères” arabes.»

il est vrai qu’actuellement, peu d’entraves se mettent sur le chemin de Benyamin Netanyahou.

Une communauté internationale incapable de faire pression sur Israël?

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Comme l’explique Frédéric Encel, dans le cas d’une annexion de la vallée du Jourdain, il y aurait de fortes critiques venant de l’international, en particulier des pays arabes, mais également des Européens. Cela resterait cependant au stade de critiques et ne se transformerait pas en sanctions.

«Le monde arabe est divisé entre l’Arabie saoudite et ses alliés et l’Iran et ses alliés, il est donc difficile d’imaginer un front uni et des sanctions venant de cette région. D’autant qu’ils n’ont plus de levier pétrolier comme ils l’avaient dans les années 70.»  

Les seuls qui pourraient taper fort, selon l’expert, seraient les Européens, car ils sont fortement liés économiquement à Israël. Benyamin Netanyahou fait très attention aux conséquences économiques de sa politique extérieure. S’il sentait par exemple que ses actions engendreraient la suspension de l’accord de libre-échange signé en 1995 entre l’Union européenne et Israël, «évidemment qu’en aucun cas il n’annexerait», précise le géopolitologue.

La solution à deux États définitivement enterrée?

Une telle mesure représenterait un manque à gagner insupportable pour l’État hébreu, car l’économie israélienne est en grande partie adossée à cet accord de libre-échange. Netanyahou sait néanmoins que ce scénario n’est pas crédible du fait de l’unanimité requise pour enclencher cette suspension. Les pays membres n’arriveraient jamais à tomber d’accord, notamment du fait du soutien indéfectible de ceux de l’Est à Israël.

​Pour sa part, Tel-Aviv tend à justifier cette annexion par le fait que de nombreuses colonies existent déjà de manière officieuse en Cisjordanie. C’est d’ailleurs un secret de polichinelle que le territoire est déjà très largement administré et contrôlé par l’État hébreu.

Une donnée essentielle qui conforte un peu plus l’idée que de voir un jour un État palestinien souverain et indépendant existant côte à côte avec Israël, ressort plus de la fiction que de la réalité:

«La question de l’échange de territoires a été négociée à Oslo, Oslo 2 et Camp David en 2000, sans grand succès. Mais si annexion il y a, cela entraverait, pas totalement, mais très sérieusement, la possibilité d’un État palestinien souverain à côté d’Israël, c’est une certitude», prévient Frédéric Encel.
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