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Si je reviens un jour, la BD qui retrace la vie d'une adolescente juive, à Paris, pendant l'Occupation

La journaliste Stéphanie Trouillard et le jeune dessinateur Thibaut Lambert font revivre les lettres de Louise Pikovsky en bande dessinée.
La journaliste Stéphanie Trouillard et le jeune dessinateur Thibaut Lambert font revivre les lettres de Louise Pikovsky en bande dessinée. Des Ronds dans l'O

Louise Pikovsky, collégienne parisienne assassinée à Auschwitz en 1944, a entretenu une correspondance avec un de ses professeurs. Un précieux témoignage sur la vie en cette période trouble restitué dans une poignante bande dessinée.

«Nous sommes tous arrêtés. Je vous laisse les livres qui ne sont pas à moi que je voudrais retrouver si je reviens un jour...» Ces mots sont les derniers de Louise Pikovsky, adolescente juive parisienne au destin fauché par le nazisme. Cette élève de troisième du lycée Jean-de La-Fontaine, dans le 16e arrondissement, a été arrêtée avec toute sa famille le 22 janvier 1944. Et ne reviendra pas. Elle avait 16 ans quand elle a été gazée avec tous les siens dès son arrivée à Auschwitz.

Cette destinée tragique aurait pu sombrer dans l'oubli si le hasard en avait décidé autrement. Brillante, la jeune fille a entretenu une correspondance bouleversante avec Mademoiselle Malingrey, son professeur de lettres, dès l'été 1942. Six courriers conservés dans une vieille armoire du lycée et exhumés en 2010 lors d'un déménagement.

En 2017, la journaliste et historienne Stéphanie Trouillard, spécialisée dans la Seconde Guerre mondiale s'est emparée de cette histoire. Après la réalisation d'un riche web documentaire sur le site de France 24 et d'un reportage consacrés à l'adolescente, elle a décidé de décliner cette histoire en bande dessinée.

«Je me suis tournée vers la bande dessinée pour toucher un plus large public, notamment les plus jeunes, explique-t-elle. J'interviens régulièrement dans des établissements scolaires pour raconter l'histoire de Louise et je vois bien que les professeurs travaillent beaucoup avec la bande dessinée dans le cadre de leur enseignement.»

« En France, il n'y avait pas vraiment de figure à laquelle les adolescents qui étudient cette période de l'histoire pouvaient s'identifier »

Stéphanie Trouillard

Témoignage précieux sur la France de ces années-là, les lettres évoquent un quotidien où les camarades de confession juive disparaissent du jour au lendemain, les pères de famille se retrouvent internés à Drancy pour en ressortir déchus de leur nationalité française, à l'instar du père de Louise. Elles racontent également les joies de la cour d'école, les préoccupations ordinaires d'une adolescente, les visites le soir à son professeur de lettres ponctuées de discussions fertiles. Sans oublier les doutes: «Est-ce que la souffrance a des arrêts ?», s'interroge Louise Pikovsky.

Dotée d'une sensibilité et d'une maturité stupéfiantes, Louise n'est pas sans rappeler Anne Frank, cette autre adolescente au destin brisé. Est-ce que l'histoire de Louise aura la même portée? «Ce n'est pas vraiment comparable, estime Stéphanie Trouillard. Anne Frank a écrit tout un journal, Louise à peine une dizaine de lettres. Et elle n'a pas été cachée, elle a vécu une vie quasi normale jusqu'à son arrestation. En France, il n'y avait pas vraiment de figure à laquelle les adolescents qui étudient cette période de l'histoire pouvaient s'identifier. On a le journal d'Hélène Berr, qui était étudiante. Je vois davantage l'histoire de Louise comme une porte d'entrée au Journal d'Anne Frank et aux récits de Primo Levi.»

Pour reconstituer la vie de Louise pendant l'Occupation, Stéphanie Trouillard s'en est tenue aux lettres ainsi qu'aux souvenirs des camarades de classe et de membres de la famille retrouvés lors de son enquête. Le dessin rond et coloré du jeune Thibaut Lambert, atténuant la dureté du propos, achève de nous émouvoir.

Un dossier à la fin de l'album présente des reproductions des lettres ainsi que des photographies de famille. Outre le témoignage, le lecteur appréciera la qualité d'écriture de la jeune collégienne. Comme Anne Frank, Hélène Berr, Primo Levi, Jorge Semprun, Art Spiegelman et tant d'autres, Louise nous laisse des mots pour mesurer l'indicible. Stéphanie Trouillard et Thibaut Lambert ont su leur donner la chair qu'ils méritent.

Si je reviens un jour. Les lettres retrouvées de Louise Pikovsky, Stéphanie Trouillard et Thibaut Lambert, Éditions des Ronds dans l'O, 20 euros.

Si je reviens un jour, la BD qui retrace la vie d'une adolescente juive, à Paris, pendant l'Occupation

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8 commentaires
  • Hydra-matic

    le

    l'occupation actuelle est moins vendeuse..?

  • marioncobretti

    le

    Et à quand une BD sur l'adolescente Strasbourgeoise agressée pour une jupe ?. L'occupation...de 2020.

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