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En Israël, l’ex-journaliste Yaïr Lapid chargé de former un gouvernement

Yaïr Lapid, ex-journaliste et présentateur de télé, dirigeant du parti de centre gauche Yesh Atid, a été nommé Premier ministre par le président Reuven Rivlin pour sortir le pays de son impasse. OREN BEN HAKOON/AFP

Le premier ministre Benyamin Netanyahou, dont le parti était arrivé en tête des élections, n’a pas réussi à former une coalition.

Le «magicien» a raté ses tours. Benyamin Netanyahou n’est pas parvenu à former un gouvernement avant la date limite fixée à mardi minuit. Le président israélien Reuven Rivlin va maintenant donner sa chance au camp rival et éclectique dont le seul ciment est de vouloir éjecter du pouvoir le premier ministre après douze années de règne. Il a désigné mercredi Yaïr Lapid, un ex-journaliste et présentateur de télé, dirigeant du parti de centre gauche Yesh Atid, pour tenter de sortir le pays de l’impasse politique dans laquelle il est plongé depuis les législatives du 23 mars, les quatrièmes en deux ans.

Benyamin Netanyahou avait pourtant, sur le papier, de nombreuses cartes en main. Son parti, le Likoud, était arrivé en tête du scrutin. Il compte 30 sièges à la nouvelle Knesset où la droite, toutes tendances confondues, est dominante, et il bénéficie du soutien des ultraorthodoxes. En tacticien madré, le premier ministre avait imaginé une formule alambiquée pour rafler la mise. Il a favorisé l’union de l’extrême droite messianique pour qu’elle entre au Parlement. Dans le même temps, il a fracturé les partis représentant les Arabes israéliens.

L’un de leurs leaders, Mansour Abbas, un islamo-conservateur qui a fait sécession, a obtenu des élus à la Chambre et s’est déclaré prêt à soutenir sans participation un gouvernement dirigé par Netanyahou afin d’obtenir des aides pour sa communauté. Mais le plan s’est retourné contre son instigateur. Bezalel Smotrich, la figure de proue des sionistes religieux, a refusé un accord pour un gouvernement dont le sort dépendrait, selon lui, de «terroristes arabes». Naftali Bennett, le leader de Yamina, un mouvement de la droite radicale religieuse, qui ambitionne de remplacer un jour «Bibi», a eu alors beau jeu de décliner les offres de service du chef du gouvernement. Dans un ultime élan, le premier ministre était allé jusqu’à lui proposer de partager son poste dans un système de rotation.

Benyamin Netanyahou s’est heurté dans son entreprise à deux difficultés majeures: il a perdu, à force de promesses non tenues et de manœuvres jugées grossières, la confiance d’une bonne partie de la classe politique et il s’est aliéné ses compagnons de route. La numéro 2 de Yamina, Ayelet Shaked, son ancienne ministre de la Justice, l’a qualifié lui et son épouse, Sara, de «tyrans», de «dictateurs», disant que le couple était «assoiffé de pouvoir».

En échouant à créer une coalition, le chef du gouvernement doit remiser ses espoirs d’une sortie de l’imbroglio judiciaire dans lequel il est plongé

Le premier à avoir pris la tangente est Avigdor Liberman et son parti russophone, Israel Beytenou. L’ex-éminence grise de «Bibi» est à l’origine de la crise qui dure depuis deux ans. Le dernier est Gideon Saar, un baron du Likoud. Il a fondé sa propre formation avant le scrutin, avec pour ambition d’en finir avec Bibi. Naftali Bennett, ex-conseiller de Benyamin Netanyahou et successivement ministre de l’Économie, de l’Éducation et de la Défense a également rompu les ponts. Tous se situent sur l’échiquier politique à la droite du premier ministre.

En échouant à créer une coalition, le chef du gouvernement doit remiser ses espoirs d’une sortie de l’imbroglio judiciaire dans lequel il est plongé. Certains de ses alliés politiques s’étaient engagés à modifier la législation pour qu’il bénéficie d’une immunité. Son procès pour des faits de corruption, de fraude et d’abus de confiance qu’il nie a pris son rythme de croisière et ne lui laisse aucun répit.

Le drame du mont Méron, marqué jeudi soir par la mort de 45 personnes dont des enfants lors d’un pèlerinage religieux, enfin, a terni son image. Le rassemblement de plus de 100.000 personnes a été permis par les autorités malgré les mises en garde sur les conditions de sécurité et les restrictions imposées aux manifestations publiques en raison de la pandémie. Son gouvernement a cédé aux pressions des partis ultraorthodoxes. En avril, le grand pèlerinage annuel druze avait été annulé, les Palestiniens s’étaient vus interdire au début du ramadan l’accès à la place de la porte de Damas, à Jérusalem, et samedi la cérémonie du feu sacré de la Pâque orthodoxe chrétienne célébrée dans la basilique du Saint-Sépulcre s’est déroulée dans une vieille ville bouclée par les forces de l’ordre pour éviter les rassemblements trop importants.

À VOIR AUSSI - Après la tragédie de Méron, Israël observe une journée de deuil national

Yaïr Lapid n’aura pas la tâche facile. Il doit, lui aussi, s’attirer les grâces de Naftali Bennett et de partis arabes pour dégager une majorité en sa faveur à la Knesset. Il propose, lui aussi, un système de rotation du poste de premier ministre avec Naftali Bennett. Si le pays reste ingouvernable, le Parlement devrait être dissous dans environ un mois et les Israéliens retourneront aux urnes. Si tel était le cas, Benyamin Netanyahou resterait en place en tant que premier ministre intérimaire. Et il est probable qu’il repartirait en campagne.

En Israël, l’ex-journaliste Yaïr Lapid chargé de former un gouvernement

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45 commentaires
  • Oskar Lafontaine

    le

    Souvenons-nous seulement qu'une absence de solution, politique en plus, n'empêche nullement la Terre de tourner, ni la vie de suivre son cours. Les événements de la fin de l'année 2021 feront jaillir la solution et pas seulement pour la constitution d'un gouvernement israélien. "Il n'est pas de problème, qu'une absence de solution, ne finisse par régler". C'est d'un Président du Conseil sous la quatrième République et qui, et ils furent peu nombreux, avait en juin 1940, refusé de voter les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain.

  • Verdulo

    le

    Finissons-en avec le Likud et ses alliés ! Que les partis arabes comprennent l'urgence de sauver la démocratie israélienne des griffes de Nétanyahou : c'est dans leur intérêt.
    Lapid PM !

  • Francducol

    le

    Esperons que Netanyahu reprendra la main.

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