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Gaz offshore

Netanyahu promet de torpiller l'accord maritime entre Israël et le Liban

La conclusion d’un accord sur la démarcation de la frontière maritime entre le Liban et Israël ne dépend plus que de quelques détails, selon Beyrouth et Tel Aviv. Sauf que l’ancien Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui espère revenir au pouvoir à la faveur des élections législatives du 1er novembre, fait activement campagne contre le processus parrainé par les États-Unis.

L'ancien Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, ici photographié le 10 août 2022 à Tel Aviv, estime qu'un accord avec le Liban pourrait renforcer le Hezbollah
L'ancien Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, ici photographié le 10 août 2022 à Tel Aviv, estime qu'un accord avec le Liban pourrait renforcer le Hezbollah © Gil Cohen-Magen, AFP (archives)
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Le gouvernement israélien et le pouvoir libanais l’assurent : les deux pays voisins, toujours techniquement en guerre depuis un armistice conclu en 1949, sont en passe de régler le contentieux autour du tracé de leur frontière maritime.

Les négociations indirectes menées depuis plus de deux ans, par l'intermédiaire du médiateur américain Amos Hochstein mandaté par la Maison Blanche, ont pris une tournure positive ces dernières semaines au point qu’un accord ne dépendrait plus que de quelques détails et amendements selon les médias locaux.

Les principaux ministres du gouvernement israélien doivent se réunir jeudi pour discuter du projet d'accord et des amendements proposés par Beyrouth.

La zone disputée entre le Liban et Israël.
La zone disputée entre le Liban et Israël. © France 24

Cet accord pourrait permettre à chaque pays l’exploitation de ses ressources gazières respectives, découvertes dans cette zone contestée de la Méditerranée orientale, et viendrait soulager l’administration Biden. Cette dernière a fait de cette question l’une de ses priorités diplomatiques alors que les pourparlers étaient au point mort depuis une décennie.

Un dossier au cœur de la campagne des législatives

Sauf que ce dossier est devenu crucial aux yeux des Occidentaux dans un contexte international marqué par les tensions sur les marchés de l’énergie et l’envolée des prix du gaz depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, principal fournisseur des alliés européens de Washington.

Alors même qu’aucune partie n'a encore officiellement dévoilé l’intégralité du texte de la médiation américaine, le sujet s’est transformé en enjeu électoral en Israël, à quelques semaines des législatives du 1er novembre.

Si le gouvernement de Yaïr Lapid entend logiquement capitaliser sur cette avancée "qui protège entièrement les intérêts sécuritaires, diplomatiques et économiques d'Israël", selon les propres termes du Premier ministre, un acteur majeur de la scène politique du pays semble, lui, bien décidé à torpiller l’éventuel accord.

"Nous gagnerons les élections et annulerons cet accord honteux !", a promis Benjamin Netanyahu dans un tweet publié le 3 octobre. En substance, il prévient qu’il ne sera pas engagé par ce qu’il qualifie de "fait accompli", selon une expression rapportée par la presse israélienne, mettant en garde contre l’adoption d’un accord aussi stratégique quelques semaines avant des élections déterminantes pour l’avenir du pays.

Et pour cause, l’ancien Premier ministre est certain, malgré ses déboires judiciaires, de revenir au pouvoir à la faveur d’une revanche dans les urnes contre ses rivaux. Ces derniers s’étaient rassemblés, en juin 2021, au sein d’une coalition hétéroclite autour de leur volonté commune de mettre fin au règne de plus de douze années consécutives de Benjamin Netanyahu à la tête de l’État hébreu.

Netanyahu et la droite accusent Lapid de faire le jeu du Hezbollah

C’est dans ce sens que le leader de la droite attaque bille en tête Yaïr Lapid et son gouvernement en l’accusant d’avoir fait d’importantes concessions sur les ressources israéliennes au profit du Liban. Et donc de faire le jeu du Hezbollah, ennemi juré de l’État hébreu.

"Lapid donne au Hezbollah un territoire souverain de l'État d'Israël comportant un énorme gisement de gaz qui vous appartient, à vous citoyens israéliens", a asséné dimanche Benjamin Netanyahu dans une vidéo postée sur ses comptes de réseaux sociaux.

Son parti, le Likoud, lui a emboité le pas, le même jour, dans un tweet accusant Yaïr Lapid "d’avoir cédé une réserve de gaz énorme au Hezbollah, quelque chose que Netanyahu n’aurait jamais accepté".

De son côté, le parti chiite libanais s’est autoproclamé défenseur des hydrocarbures libanais et a multiplié, depuis le début des négociations, les avertissements contre toute tentative de normalisation avec le voisin israélien en échange d'un éventuel accord sur la frontière maritime.

Ces dernières semaines, Hassan Nasrallah, le secrétaire général du mouvement politico-militaire pro-iranien, avait menacé à plusieurs reprises d’attaquer Israël si celui-ci se décidait à lancer l’extraction du gaz avant la conclusion d’un accord sur la zone contestée.

Le 3 octobre, Yuval Steinitz, député du Likoud et ex-ministre de l’Énergie de Benjamin Netanyahu, a évoqué sur les ondes de la radio israélienne 103FM, "une reddition" pour marquer son opposition à l’accord en négociations. "Il m'est difficile de sortir le mot reddition de ma bouche, mais c'est ainsi que cela sera présenté par Nasrallah et ce ne sera pas sans fondement", a-t-il asséné.

En réponse à l’arrivée, début juin, et à la demande du gouvernement israélien, d'une unité flottante de production, de stockage et de déchargement (FPSO) dans la zone maritime au cœur du litige frontalier, le Hezbollah avait envoyé, début juillet, "trois drones non armés en direction du champ contesté de Karish pour des missions de reconnaissance". Les engins avaient été rapidement interceptés par l'armée israélienne.

Si l’État hébreu considère que ce champ prometteur est situé dans sa zone économique exclusive et donc non concerné par le litige frontalier, le pays du Cèdre estime de son côté que Karish se trouve dans les eaux contestées.

"Si jamais un accord est conclu, et que le pays du Cèdre arrache quelques acquis, et c’est là le pari du Hezbollah, le parti pourra claironner que c’est grâce à sa force militaire que les Libanais ont pu imposer leurs conditions, et ainsi légitimer son arsenal qui fait toujours débat au Liban", avait récemment expliqué Ziad Majed, professeur de sciences politiques à l'université américaine de Paris, interrogé par France 24.

Or lors d'une émission télévisée diffusée mardi, Elias Bou Saab, le vice-président du Parlement libanais, chargé de superviser les négociations, a affirmé que le Liban avait obtenu tous les blocs maritimes qu'il considérait comme les siens.

Propagande, se défend Lapid

Cible des critiques venant du camp Netanyahu, Yaïr Lapid n’a de cesse de défendre la stratégie de son gouvernement, qu’il affirme payante. Dans un tweet publié lundi, le Premier ministre centriste a déclaré que son pays "obtient 100 % de ses besoins sécuritaires et même une partie des bénéfices du réservoir libanais" de Qana.

Une affirmation contredite par Elias Bou Saab qui a indiqué que "le Liban obtient en vertu de l’accord tous ses droits sur le champ gazier de Qana".

Carte fournie par l'armée libanaise et publiée par plusieurs médias locaux montrant la "ligne Hof" (H) et la totalité de la zone revendiquée par les négociateurs libanais, qui est située entre la ligne 1 et la ligne 29.
Carte fournie par l'armée libanaise et publiée par plusieurs médias locaux montrant la "ligne Hof" (H) et la totalité de la zone revendiquée par les négociateurs libanais, qui est située entre la ligne 1 et la ligne 29. © Armée libanaise

Toujours est-il que Yaïr Lapid a répliqué directement aux accusations de Benjamin Netanyahu. "Je comprends que cela vous chagrine de ne pas avoir réussi à conclure un accord [lorsque vous étiez au pouvoir] mais ce n’est pas une raison pour vous joindre à la campagne de propagande de [Hassan] Nasrallah", a-t-il lancé.

Le ministre de la Défense Benny Gantz, qui ambitionne de succéder à Yaïr Lapid dans moins d'un mois, a lui aussi reproché à Benjamin Netanyahu "d'attiser la propagande de Hassan Nasrallah".

Selon un sondage commandé par la chaîne publique israélienne Kan, diffusé ce weekend et relayé par l’AFP, 43 % des Israéliens sont favorables à un accord gazier avec le Liban, 16 % défavorables et 41 % n'ont pas d'avis sur la question.

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