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Conflit Israël-Hamas : qu’est-ce que le Djihad islamique palestinien ?

Des membres du Djihad islamique palestinien défilent à Gaza, le 6 octobre 2023.
Des membres du Djihad islamique palestinien défilent à Gaza, le 6 octobre 2023. MOHAMMED ABED / AFP

L’organisation terroriste, suspectée d'avoir frappé un hôpital à Gaza, est moins puissante que le Hamas avec qui elle partage des objectifs, mais diverge sur les moyens de les atteindre.

L’ombre du Djihad islamique palestinien refait surface après qu’une roquette a frappé, mardi soir, l’hôpital Ahli Arab, dans la ville de Gaza. «Quelques dizaines de morts» sont à déplorer, selon un responsable du renseignement européen qui s'est confié à l'agence France-Presse, contrairement aux centaines annoncées par de nombreuses voix palestiniennes. Le Hamas, qui contrôle la bande de Gaza, accuse Israël. L’État hébreu, lui, dément et attribue le bombardement au Djihad islamique. «Après une enquête complète et approfondie (...) nous pouvons confirmer que l'organisation du Djihad islamique est responsable du ciblage de l'hôpital», a affirmé le porte-parole de l'armée israélienne, Avichay Adraee. «Mensonge» de «l'ennemi sioniste», répond le mouvement islamiste.

Depuis le début du conflit entre le Hamas et Israël, déclenché par l’organisation terroriste islamiste samedi 7 octobre, les brigades al-Qods, la branche armée du Djihad islamiste palestinien (DIP), prennent part aux combats. Mais qu’est-ce que cette organisation, désignée comme groupe terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël ? Et comment se positionne-t-elle par rapport au Hamas ?

Hybridité idéologique

Le Djihad islamique palestinien voit le jour au Caire, en Égypte, entre 1979 et 1981. Ses fondateurs, Fathi Shaqaqi et Abd al-Aziz Awda, sont des étudiants palestiniens membres des Frères musulmans égyptiens. Jugeant la confrérie trop modérée et insuffisamment engagée dans la cause palestinienne, ils fondent le Djihad islamique palestinien en opposition à ce mouvement.

Ziyad al-Nakhalah, le chef du Djihad islamique palestinien, et Ebrahim Raïssi, le président de la République islamique d’Iran, à Téhéran le 19 juin 2023. IRANIAN PRESIDENCY / AFP

Aujourd’hui dirigé par Ziyad al-Nakhalah, le DIP se démarque d’abord du Hamas et du Fatah par son hybridité idéologique. «C'est un mouvement islamo-nationaliste d’obédience sunnite, originellement issu de la mouvance des Frères musulmans avec un marqueur qui est aujourd’hui très iranisé», explique au Figaro David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (Iris), spécialiste du Moyen-Orient. Ses fondateurs reprennent effectivement à leur compte «les idéaux révolutionnaires et théocratiques chiites adoptés lors de la révolution iranienne de 1979 qui a établi un régime islamique», analyse de son côté le Council on foreign relations.

Le principal allié - idéologique, politique et financier - du groupe terroriste est donc l'Iran, l'ennemi numéro un d'Israël. Au Liban où ils s’installent dans les années 80, les dirigeants du Djihad islamique palestinien reçoivent d'ailleurs une formation du Hezbollah, un mouvement chiite pro-iranien. Les membres du DIP peuvent également compter sur la Syrie où est installé son siège depuis 1989.

Pour autant, bien que financé par le géant iranien, la capacité de nuisance du Djihad islamique palestinien est moins forte que celle du Hamas. Si le DIP revendique plus de 8000 soldats - là où les forces des brigades Ezzedin al-Qassam du Hamas sont estimées à 20.000 combattants-, il est impossible de quantifier ce qu’il représente concrètement.

Les armes, uniquement les armes

Comme le Hamas, le Djihad islamique palestinien veut anéantir Israël. Le DIP ne reconnaît pas l'existence de l'État hébreu et rejette de facto les accords d'Oslo, signés en 1993 entre l'Autorité palestinienne et l'État hébreu. Mais les stratégies des deux organisations terroristes diffèrent. La création d’un régime islamique voulu par le DIP, qui s’étendrait dans «toute la Palestine historique» telle qu'elle l'était sous mandat britannique jusqu'en 1948, ne passe que par les armes.

Car contrairement au Hamas, qui administre seul depuis 2007 la bande de Gaza, le Djihad islamique palestinien ne participe pas aux processus démocratiques, n’a aucune ambition de gouvernement et n’engage pas de dialogue diplomatique avec Israël. En 2006, le DIP reprochait par exemple au Hamas de participer aux élections législatives palestiniennes. La lutte par les armes, donc, et uniquement les armes.

Depuis 1992 et la création des brigades al-Qods, le DIP mène régulièrement des attentats suicides visant des civils et des militaires, «bien que la fréquence des attaques à l'intérieur du territoire israélien ait diminué depuis la construction de barrières de sécurité autour de Gaza», note le Council on foreign relations. En mars 1996, par exemple, un attentat suicide dans un centre commercial de Tel-Aviv tue 20 personnes et en blesse 75 autres. En octobre 2003, une bombe tue 22 personnes et fait 60 blessés dans un restaurant à Haïfa.

«Convergence des luttes contre Israël»

Si, sur bien des aspects, le DIP se distingue du Hamas, il demeure toutefois «comme d’autres groupes, toléré par ce dernier, car il y a une forme de convergence des luttes contre Israël», observe David Rigoulet-Roze. Mais, «ces deux organisations demeurent autonomes même si le DIP, quand il ne suit pas son propre agenda, en réfère à Téhéran», poursuit le chercheur. Qui ajoute : «Le Djihad islamique ne peut pas non plus faire tout ce qu'il veut à Gaza, car le Hamas a une hégémonie sur l'enclave.»

S’il est déjà arrivé que le Hamas calme, voire fasse arrêter, les saillies du DIP, les deux groupes mènent parfois, au gré des contextes, des attaques coordonnées. En 2011, les brigades al-Qods et les brigades al-Qassam - la branche armée du Hamas qui a lancé l’offensive contre l’État hébreu début octobre - bombardaient ensemble la colonie d’Ofakim, au sud d’Israël. Aujourd’hui, alors qu’Israël prépare sa riposte, la synergie des groupes terroristes est de mise.


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46 commentaires
  • cohelet

    le

    Ofakim est une ville du district sud d'Israël. Ce n'est pas une colonie ! le choix de ce terme pour désigner une localité de l'Etat hébreu participe de la désinfomation sur ce conflit. Le Figaro devrait le reconnaître...

  • Daniel

    le

    Jusqu'à quand la presse va relayer la propagande du Hamas ?

  • Manu Warschawsky

    le

    Il y a quelques mois, on se gaussait des Russes qui parlaient "d'opération militaire spéciale" pour désigner a guerre en Ukraine. Maintenant, c'est à notre tour d'utiliser systématiquement le mot "conflit" pour désigner la guerre en cours autour de Gaza. Sic transit verbum mundi.

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