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Conflit Israël-Hamas : questions et inquiétude sur ces destinations stars des Français

La guerre entre Israël et le Hamas a des incidences sur les pays limitrophes, comme l’Égypte, qui a vu le nombre de réservations touristiques baisser (ici, la grande pyramide de Kheops, en mars 2023).
La guerre entre Israël et le Hamas a des incidences sur les pays limitrophes, comme l’Égypte, qui a vu le nombre de réservations touristiques baisser (ici, la grande pyramide de Kheops, en mars 2023). KHALED DESOUKI / AFP

Les professionnels du tourisme ont enregistré une baisse drastique des réservations par rapport à 2022 sur la même période pour deux pays proches de la bande de Gaza.

Véronique s'y attendait, mais c'est quand même la douche froide. Elle devait s'envoler du 20 au 25 novembre pour la Jordanie, via un voyage organisé souscrit de longue date auprès de son Comité d'Entreprise. À l’initiative de ce dernier, elle doit y renoncer. Elle ne s'imaginait pas de toute façon découvrir les splendeurs du désert de Wadi Rum alors que le conflit armé fait rage non loin de là, entre Israël et le Hamas. «J'ai demandé un remboursement du voyage plutôt qu'un report, la réponse n'a pas été immédiate mais je viens de recevoir la demande de RIB», nous indique-t-elle. Les cartes du tourisme sont en partie rebattues, car deux pays en particulier suscitent de la crainte chez les voyageurs : l'Égypte et la Jordanie, frontaliers des belligérants. Deux destinations prisées depuis la fin de la pandémie, au point que l'Égypte campait solidement dans le top 10 des destinations préférées des Français. Si, pendant ces vacances de la Toussaint, les professionnels du tourisme arguent que le Quai d'Orsay ne déconseille pas de voyager dans ces zones mais recommande «la plus grande vigilance dans les déplacements dans l’est du Sinaï », cette ligne a du mal à tenir auprès des futurs clients. C’est en tout cas ce que montrent les chiffres de réservations d'octobre, qui suivent le déclenchement du conflit.

«Ces deux destinations enregistrent un repli, mais la chute est particulièrement impressionnante pour l'Égypte, qui cartonnait littéralement jusqu'à présent», appuie Frédéric Pilloud, directeur marketing et e-commerce de MisterFly. La plateforme enregistre un repli de «60% pour l'Égypte par rapport à la même période l'an dernier, ce n'est pas totalement à l'arrêt mais le coup de frein est net, précise-t-il. Dans l'esprit des clients, ces pays se trouvent proches d'une zone de guerre et le conflit peut déraper à tout moment». Ce qui n’est pas totalement faux. La tendance est même pire chez les voyagistes. «Sur les 10 derniers jours d'octobre, nous avons noté une chute de 80% des réservations pour l'Égypte par rapport à la même période en 2022. Certains jours, nous sommes même tombés à -90%», témoigne Raouf Ben Slimane, PDG de Thalasso N°1 et Ôvoyages, spécialisé dans les destinations moyen-courrier et long-courrier ensoleillées.

Réservations de dernière minute

La cité de Petra est l’un des lieux incontournables à visiter en Jordanie. Zangrilli Andrea / Travel Wild - stock.adobe.com

Le tourisme international dans ces deux destinations chères au cœur des Français est-il pour autant condamné pour le moment ? Du côté des voyageurs individuels, seules quelques annulations ont pour l'heure été recensées sur des séjours déjà achetés et prévus de longue date. «Ces dernières sont compensées par des réservations de dernière minute», note Raouf Ben Slimane. Chez certains professionnels, la guerre entre Israël et le mouvement terroriste du Hamas n'a pas encore eu d'impact visible. «Au début des événements, nous redoutions une vague d'annulations qui aurait été catastrophique en plein démarrage de la saison touristique. Trois semaines plus tard, nous n'en avons eu aucune et continuons même à recevoir de nombreuses réservations de familles pour les vacances de Noël ou le printemps», assure Yann Wulser, directeur général de l'agence Altaï Travel, spécialiste du voyage d'aventure sur-mesure, qui propose des itinéraires en Égypte et en Jordanie (interview ci-dessous).

Même son de cloche du côté des autorités égyptiennes. «Nous n'avons noté que 7 à 10% d'annulations», affirme Amr El Kady, président de l'Autorité Égyptienne du Tourisme. «Et elles ne sont pas toutes liées au contexte actuel. Il y a aussi des voyageurs qui ont eu des empêchements personnels.» Malgré l'horreur de la guerre sur les territoires limitrophes, les vacances de la Toussaint ont battu leur plein. Le pays, comme la Jordanie, le clame : il n'y a aucun risque à voyager sur leurs territoires. «Demandez aux clients déjà sur place, ils profitent de leurs vacances. Ils reviennent sans encombre de leur voyage», enjoint Amr El Kady.

Attrait pour le Maroc et la Tunisie

Malgré ces discours qui se veulent rassurants, la proximité géographique avec le conflit continue de soulever les craintes des voyageurs français. En résulte une forme d'attentisme pour une partie d'entre eux, même si les professionnels notent aussi la présence de clients «opportunistes», certes en minorité, mais prêts à profiter du contexte pour faire des bonnes affaires et éviter les grandes foules touristiques. «Il y a toujours des partants quelles que soient les situations de crise, excepté s'il y a une interdiction au niveau du Quai d'Orsay», remarque Raouf Ben Slimane. D’ailleurs, dès que l'on s'éloigne de l'épicentre du conflit, l'appétit de voyage résiste aux chocs géopolitiques.

L'attrait pour la Tunisie reste important (2e en volume de ventes chez MisterFly en octobre), et le Maroc, qui fait preuve d'une grande résilience après le séisme dramatique du 8 septembre, attire toujours les Français. En Europe, les îles espagnoles des Canaries et la Grèce tirent leur épingle du jeu. «Les Canaries sont en très forte croissance chez nous, et la Grèce se vend déjà très bien pour 2024», poursuit Raouf Ben Slimane. En long-courrier, les États-Unis et New York performent toujours. Tout comme l'Asie, avec la Thaïlande en tête, devant le Japon, chez certains professionnels. Au global, le continent remonte en flèche. «Les pays d'Asie sont les derniers à bénéficier d'un effet franc de revenge travel», note Frédéric Pilloud, de MisterFly.


Guerre Israël-Hamas : «Aucune incidence sur nos activités touristiques»

S'offrir une croisière sur le Nil, visiter les pyramides de Gizeh, se perdre dans le désert du Wadi Rum ou la cité de Pétra... Destinations «soleil d'hiver» par excellence, l'Égypte et la Jordanie entament leur saison touristique dans un contexte marqué par le conflit armé Israël-Hamas qui secoue le Proche-Orient depuis le 7 octobre. Une situation que les deux voisins de l'État hébreu surveillent de près, tant le risque d'embrasement menacerait leur renaissance touristique. Quelles sont les incidences sur place ? L’avis de Yann Wulser, directeur général de l'agence Altaï Travel, spécialiste du voyage d'aventure sur-mesure qui compte les deux pays du croissant fertile parmi ses principales destinations.

LE FIGARO. - Peut-on voyager en toute sécurité aujourd'hui en Égypte ou en Jordanie ?

Yann WULSER. - Sur place, nous ne notons aucune incidence sur nos activités touristiques. Nos départs sont maintenus et nos clients rentrés de ces pays la semaine dernière nous ont fait des retours extrêmement positifs, sans mentionner le moindre trouble lié à l'actualité. Au début des événements, nous redoutions une vague d'annulations qui aurait été catastrophique en plein démarrage de la saison touristique. Trois semaines plus tard, nous n'en avons eu aucune et continuons même à recevoir de nombreuses réservations de familles pour les vacances de Noël ou le printemps 2024. Le ministère des Affaires étrangères n'a d'ailleurs pas changé ses recommandations de voyage ni en Égypte, ni en Jordanie (au 3 novembre, NDLR), preuve que l'on peut se rendre dans ces pays sans crainte.

Yann Wulser est le directeur général d'Altaï Travel, spécialiste du voyage d'aventure sur-mesure. Altaï Travel

Comment rassurez-vous les voyageurs qui hésiteraient encore à partir vers ces destinations ?

Ces pays sont habitués à gérer les situations de crise et le tourisme étant l'un des principaux moteurs de leur économie, les autorités s'assurent que les visiteurs passent un séjour en toute sécurité. Même si elle se fait la plus discrète possible, la présence policière est clairement visible notamment à l'entrée des sites touristiques ou des hôtels. En Égypte, par exemple, tout groupe de voyageurs est enregistré auprès des autorités de police qui sont alors tenues au courant de nos itinéraires, horaires de visite et lieux d'hébergement. C'est pourquoi, pour plus de sécurité, je recommande de se tourner vers une agence locale, surtout pour un long séjour itinérant.

Ces pays font un retour remarqué auprès des voyageurs depuis quelques années. Les troubles dans la région ne risquent-ils pas de freiner leur développement touristique ?

L'Égypte, et dans une moindre mesure la Jordanie, étaient quasiment absents de la scène touristique ces dix dernières années. En Égypte, le Covid a cassé la timide reprise consécutive au Printemps arabe (2011). Le pays a beaucoup investi pour assurer son rayonnement, notamment dans le très attendu Grand Musée égyptien qui doit ouvrir très prochainement au Caire. La création de nouvelles liaisons aériennes témoigne aussi du regain d'intérêt des Européens pour les deux destinations. Les visiter a un côté militant : c'est soutenir leurs efforts d'ouverture au monde. Le pire serait de les déserter par simple crainte d'un conflit qui, je l'espère, ne franchira pas leurs frontières.

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4 commentaires
  • Moije

    le

    Il y a bien longtemps que je ne vais plus dans les pays arabes.

  • Occitane

    le

    À éviter !

  • anonyme 13314

    le

    Je rentre tout juste d’un séjour de 10 jours en Jordanie. Pays merveilleux et nous n’avons pas du tout senti que la guerre sévissait à quelques kilomètres de là. Nous avons pu profiter des sites désertés par les touristes dans le calme et une absolue sérénité. Le climat semblait finalement beaucoup plus délétère en France…

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