Dan Arbib et Perrine Simon-Nahum : «Le 20 février, le Hamas a franchi un pas supplémentaire dans l’abjection»

FIGAROVOX/TRIBUNE - Face à la mise en scène par le Hamas de la remise des dépouilles de quatre otages israéliens présumés, même les plus farouches ennemis d’Israël sont forcés de faire profil bas, estiment le maître de conférences et la professeure de philosophie.
Passer la publicité Passer la publicitéDan Arbib est maître de conférences en philosophie à Sorbonne Université. Perrine Simon-Nahum est professeure attachée au département de philosophie à l’ENS-PSL.
Les poitrines se serrent, les yeux se mouillent, on voudrait rester muet. La mise en scène du Hamas éteint toute parole, défie tout commentaire. Elle atteint des sommets d’abjection et d’ignominie. Même les plus farouches ennemis d’Israël, même les antisémites d’hier et d’aujourd’hui sont tentés de faire profil bas. Quelque chose s’est passé ce 20 février, qui rappelle les pires heures de l’histoire.
En premier lieu, la restitution d’une mère de famille et de ses deux enfants dans des cercueils exhibés comme des trophées de même que celui d’un militant de toujours plaidant en faveur de la cause palestinienne rouvre en chacun la blessure immense du 7 octobre comme si le temps s’était retourné sur lui-même, comme s’il s’était recroquevillé pour nous replonger une nouvelle fois dans l’épouvante.
Car après l’effroi du 7 octobre, chacun avait bien essayé de se réparer à sa façon, intellectuellement, psychologiquement. Analyser, se rassembler, peut-être prier, parler, chacun avait eu à cœur d’élaborer et de symboliser mentalement et psychiquement ce qui s’était produit afin de ne pas être englouti par la mémoire du massacre. C’était aussi cela, résister : ne pas sombrer, continuer à penser. Or, voici que tout d’un coup, le 20 février, nous avons été renvoyés au 7 octobre 2023 : l’horreur, le mal pur, sous nos yeux, nous saisit à nouveau et nous précipite dans le cauchemar.
Le Hamas a franchi un pas supplémentaire dans l’abjection. Devant un tel spectacle, il n’est plus de nuance, plus de faux-fuyants.Les terroristes seraient-ils parvenus à leur but ? Imposer leur emprise sur le temps et sur l’esprit, plonger l’âme dans le cycle infernal de la terreur et de l’impuissance, faire revivre le cauchemar, en maîtriser la temporalité, agencer l’horreur mais aussi la programmer et la mettre en scène, et par là triompher de l’humanité en nous. Telle est la seconde raison du vertige qui nous saisit : l’exhibition de la mort, c’est autre chose qu’un acte de guerre pris dans une logique de combat, c’est une forme de jouissance du mal pour le mal, dépourvue de toute finalité politique ou stratégique. La mort est toujours tragique ; mais comment qualifier la danse autour de cadavres d’enfants ? Des foules ont assisté à cette parade de l’horreur, leurs enfants sur les épaules ! Entre la guerre, continuation de la politique par d’autres moyens, et l’innommable qui se donne à voir là, la différence n’est pas de degré, mais de nature.
Certains avaient commis l’ignominie de prêter des circonstances atténuantes à la barbarie du 7 octobre en invoquant une « situation coloniale » ; eh bien, que trouveront-ils à dire maintenant, devant l’exhibition joyeuse de cadavres d’enfants ? Quelles fins politiques pareille mise en scène vise-t-elle ? La différence entre Israël et les combattants palestiniens exultant devant la mort et la désolation n’est pas seulement politique ; elle est anthropologique. « Tu choisiras la vie », demande le judaïsme. Ce qui nous déchire aujourd’hui à travers la mort d’Ariel et Kfir Bibas, ce qu’ont bien compris les Palestiniens réunis hier à Khan Younès, le message qu’ils cherchent à faire passer, c’est que l’exhibition de la mort des enfants Bibas et les manifestations de joie dont elle s’accompagne abolit un avenir synonyme d’humanité.
Le 20 février 2025, le Hamas a franchi un pas supplémentaire dans l’abjection. Devant un tel spectacle, il n’est plus de nuance, plus de faux-fuyants. Quiconque chercherait à relativiser, à tempérer, à glisser un mais après le constat, s’engouffrerait avec le Hamas dans le gouffre qu’a creusé cette infamie.
Anonyme
le
La gauche partage cette barbarie qu'elle a choisi sciemment de soutenir ! Après les horreurs du communisme ceux de la collusion avec le Hamas!
Ar-Men
le
Cette barbarie est bien dans l'esprit que Kamel Daoud dénonce dans son grand livre "Houris". Le FLN n'a pas évolué.
Avitus
le
Nous avons connu cela durant la guerre d’Algérie, à bien plus grande échelle encore : le FLN ne rendait pas les corps, et lorsqu’on les retrouvait, femmes, enfants, hommes, soldats français, européens ou juifs, arabes ou kabyles, ils étaient affreusement mutilés. Les criminels du Hamas ressemblent beaucoup aux terroristes musulmans du FLN.