O n ne dévoilera pas le début de MurMure, le spectacle créé à l'Espace Confluences, à Paris, autour des dialogues de la journaliste israélienne Amira Haas et de l'ancien prisonnier palestinien, Mahmoud Al-Safadi,condamné à vingt-sept ans de prison pour avoir jeté des cocktails Molotov pendant la première Intifada et qui en a purgé dix-huit (Le Monde du 27 juin 2007).
Disons simplement qu'il s'agit d'une sorte de mise en condition du spectateur avant de plonger dans l'univers carcéral des prisons israéliennes et son absurdité, plus frappante que sa cruauté.
Pas de torture, mais un règlement intérieur dont les prisonniers ne peuvent obtenir un exemplaire. Pas de brutalités, mais des punitions : la suppression du parloir, de la promenade, des livres ou de la "fourchette électrique", une résistance qui permet de faire chauffer de l'eau. Pas d'insultes, mais un titre générique de "terroriste" ou une absence de nom, remplacé par une initiale. Pas de travaux forcés, mais une inertie forcée, meublée par des exercices dérisoires de "décoloration"...
LE GRAIN DE SABLE
Ce n'est pas simple de porter sur une scène de théâtre les échanges par téléphone portable (interdits) ou par courrier entre ce prisonnier et cette journaliste.
Gaël Chaillat et Ariel Cypel ont choisi de ne pas mettre en scène un seul prisonnier, mais quatre : quatre individus différents, dont les espoirs sont différents, dont les comportements sont différents. Face à eux, une gardienne fanatique et le directeur de la prison, plus malin, représentent l'autorité. Le grain de sable de cette machine à tourner en rond, c'est la journaliste, dite "le Dragon".
Mesquineries, vexations, souffrances, résistance, acceptation, fatalisme, sont autant de situations, mises en scène autour de portes coulissantes grillagées et d'un mirador ou de cordes tendues comme une toile d'araignée.
C'est simple, rythmé, percutant, mais ça pèche parfois par exagération : on crie trop, trop fort, on caricature à outrance certains textes qui auraient gagné en force s'ils avaient été dits plus subtilement. Le grotesque prend alors le pas sur l'humour.
Au-delà des murs de la prison, l'autre mur et les check-points semblent encore plus solides, plus impénétrables, laissant les deux communautés séparées, sans espoir de rencontre ni de réflexion commune, affermies dans l'ignorance de l'autre.
"MurMure", écrit et mis en scène par Gaël Chaillat et Ariel Cypel, d'après les récits et dialogues d'Amira Hass et de Mahmoud Al-Safadi. Espace Confluences. 190, bd de Charonne. Paris-20e. Mo Philippe-Auguste, Alexandre-Dumas.
Tél. : 01-40-24-16-46. Du mercredi au samedi à 20 h 30, dimanche à 17 heures. De 7 € à 10 €. Jusqu'au 10 février.
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