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"Beaufort" : forteresse au coeur de l'absurdité

Ce huis clos, situé lors du retrait d'Israël du Liban sud, est un grand film de guerre.

Par Jacques Mandelbaum

Publié le 25 mars 2008 à 16h21, modifié le 01 avril 2008 à 11h00

Temps de Lecture 2 min.

Le 6 juin 1982, alors que les troupes israéliennes pénètrent au Liban pour y chasser les troupes de l'OLP, commence la guerre la plus controversée jamais menée par l'Etat d'Israël sous l'intitulé opération "Paix en Galilée". Conquise à l'OLP au début des hostilités, la forteresse médiévale de Beaufort, qui surplombe la plaine de la Bekaa, reste aux mains des Israéliens jusqu'en 2000, date à laquelle ils abandonnent la bande de sécurité créée au Liban sud.

Le film de l'Israélien Joseph Cedar nous fait vivre, depuis l'intérieur de la garnison de Beaufort, les semaines qui précèdent l'évacuation jusqu'à la destruction par Tsahal des fortifications autour de Beaufort.

Le huis clos de deux heures fait partie des meilleurs films de guerre, de ceux qui, loin de se repaître de son spectacle, la montrent comme une chose haïssable et inepte. La réussite tient au principe du film : raconter l'histoire du point de vue israélien, le seul que le réalisateur, soldat de Tsahal durant la guerre du Liban, connaisse de l'intérieur.

Mais elle s'explique plus par la mise en scène : lumière d'aquarium, ciel laiteux, réseau de boyaux pour décor, description du comportement des soldats terrés dans leur trou comme des rats, inquiétant et omniprésent nappage musical, absence de figuration de l'ennemi, dont les coups, redoutables tant ils semblent venir de nulle part, pleuvent à intervalles réguliers et déciment une garnison qui a ordre de tenir mais pas d'attaquer. Tout concourt à instiller un climat de peur diffuse, de sacrifice gratuit et absurde qui confine à l'abstraction.

Beaufort, conquise apparemment sans ordre explicite en 1982, devenue depuis l'avant-poste symbolique et inefficace de la présence israélienne au Liban, finit par devenir le monstrueux personnage principal de ce film, bourreau de ceux qu'il est censé protéger. Beaufort représente ni plus ni moins l'Etat d'Israël tout entier.

COLÈRE ET CULPABILITÉ

Une scène forte en témoigne, lorsque le père d'un jeune soldat mort à Beaufort témoigne à la télévision de sa colère et de sa culpabilité de n'avoir pas su protéger son fils d'un Etat qui a cessé de considérer la vie de ses citoyens comme sa priorité.

Ce beau film associe deux talents. Le journaliste et écrivain Ron Leshem, qui a rapporté dans la presse en 2001 le récit d'un officier israélien qui a inspiré à la fois le livre qu'il en a tiré (Beaufort, Seuil) et le film dont il est le scénariste. Et le réalisateur Joseph Cedar, né à New York en 1968, installé en Israël avec sa famille depuis l'âge de 6 ans. Son troisième long métrage a été primé en Israël et a obtenu l'Ours d'argent au Festival de Berlin 2007. Au moment où il le tournait, l'armée israélienne rentrait à nouveaux frais au Liban.


Film israélien de Joseph Cedar avec Oshri Cohen, Itay Tiran, Eli Eltonyo, Ohad Kneller. (2 heures.)

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