Dans un premier temps épargné par les retombées de la crise financière internationale, Israël est à son tour touché sérieusement par la dégradation de la situation économique. Accoutumé à un taux de croissance supérieur à 5 % au cours des quatre dernières années, l'Etat juif devra se contenter d'un petit 2 % pour 2009 dans l'état actuel des choses. Le budget prévisionnel est complètement dépassé. Tous les analystes s'attendent à une importante hausse du chômage, à des fermetures d'entreprises. Le gouvernement a d'ores et déjà prévu un plan de relance de 25 milliards de shekels (5 milliards d'euros). La Bourse de Tel-Aviv, florissante au cours des dernières années, a retrouvé son niveau d'il y a quatre ans.
Mais ce qui préoccupe surtout les Israéliens est la chute des fonds de pension indexés sur les cours du marché. "Les bruits circulant dans l'opinion publique selon lesquels la baisse est de l'ordre de 50 % à 60 % sont totalement exagérés. Le chiffre depuis le début de l'année jusqu'à la fin octobre est de 9,5 % pour les fonds de pension et de 16 % pour les fonds de prévoyance", rectifie Yadin Antebi, haut responsable au ministère des finances. Ce qui n'a pas empêché la grogne de la fédération syndicale Histadrout qui réclame des mesures urgentes de protection.
"Depuis des mois, nous demandons au ministère des garanties pour le revenu des retraités sans être entendus. Aujourd'hui, le conflit est ouvert", a déploré Ofer Eini, secrétaire de la fédération, qui menace de déclarer une grève. Le gouvernement a mis sur pied un plan pour que les retraités ne soient pas lésés mais il n'est pas encore en application, et les Israéliens s'inquiètent de plus en plus. Les retraits dans les banques se sont multipliés par deux, voire par trois, depuis la mi-septembre.
"HÉSITATIONS DE KADIMA"
La campagne pour les élections législatives du 10 février 2009 a à peine commencé, mais les préoccupations économiques sont déjà au centre des débats. "Le plan gouvernemental est insuffisant et trop tardif. Nous ne pouvons pas laisser les gens perdre leurs retraites et leurs économies", s'insurge Ehoud Barak, chef des travaillistes, qui s'en prend aux "hésitations de Kadima" et attaque Benyamin Nétanyahou, leader du Likoud. "Nous nous souvenons tous de sa politique irresponsable qui a consisté à transférer les fonds de pension sur les marchés financiers."
Selon un sondage, 57 % des personnes interrogées sont convaincues qu'elles ne pourront pas "vivre leur retraite avec dignité" et 41 % craignent de perdre leur travail. "Bibi (le surnom de M. Nétanyahou) a pris votre retraite. Est-ce que vous croyez que Tzipi Livni (leader de Kadima) va vous la rendre ?", a lancé Ehoud Barak, lors d'un meeting à Tel-Aviv, dimanche 23 novembre.
Benyamin Nétanyahou, ministre des finances dans le gouvernement d'Ariel Sharon de 2003 à 2005, a laissé un souvenir douloureux dans la classe moyenne israélienne en raison des coupes drastiques qu'il a opérées dans les avantages sociaux. Ce qui, aujourd'hui, ne l'empêche pas d'être en tête dans les sondages. Mais avec la crise économique, son passé de libéral forcené et de "faiseur de pauvres", comme certains l'ont appelé, remonte à la surface. "Il est temps de retirer son costume à Nétanyahou" va être un thème phare de la campagne de Kadima qui souhaite axer la bataille sur le renouveau que représente Mme Livni, l'actuelle ministre des affaires étrangères. Le slogan sera donc "Kadima : ce qui est bon pour le pays".
Lors d'une réunion des instances travaillistes, dimanche, le patron du Likoud a été qualifié de "populiste transpirant". Pour le moment, il n'est pas question de lancer des attaques personnelles mais de rappeler que le favori de l'opinion publique, premier ministre de 1996 à 1999, a un passé politique qui ne plaide pas toujours en sa faveur.
Aujourd'hui, la crise économique le rattrape. Il se retrouve en porte-à-faux par rapport à ce qu'il a toujours prôné. Et ses adversaires ne vont pas se gêner pour le faire savoir.
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