Le blocus de Gaza aide les islamistes
Cela fait plus d’un mois qu’Israël tient Gaza à nouveau sous un sévère blocus économique. Y compris monétaire. Depuis jeudi, toutes les banques de Gaza sont fermées, manquant de cash. Samedi, la Banque mondiale et le FMI ont mis Israël en garde: s’il ne réalimente pas Gaza en liquidités, le système bancaire palestinien s’y effondrera.
- Publié le 07-12-2008 à 00h00
Cela fait plus d’un mois qu’Israël tient Gaza à nouveau sous un sévère blocus économique. Y compris monétaire. Depuis jeudi, toutes les banques de Gaza sont fermées, manquant de cash. Samedi, la Banque mondiale et le FMI ont mis Israël en garde: s’il ne réalimente pas Gaza en liquidités, le système bancaire palestinien s’y effondrera.
Cette nouvelle pénurie a privé 77000 fonctionnaires de l’Autorité palestinienne de leur salaire de décembre. Car bien que le Hamas ait pris le pouvoir à Gaza, le président Mahmoud Abbas continue à y rémunérer une grande partie de la fonction publique via les banques locales. Or, dimanche, celles-ci ne disposaient plus de quoi payer les 250millions de chekels requis. Notons que le chekel (5 pour un euro) demeure la devise officielle dans les territoires. Le manque de cash a aussi forcé les agences onusiennes de Gaza à stopper leur aide à des milliers de familles pauvres. Et cela, à la veille des festivités de l’Id el Adha.
Selon les experts palestiniens, la disparition du billet israélien à Gaza est due aux entreprises israéliennes qui exportent vers Gaza. Par crainte de l’instabilité locale, elles exigent que leurs clients paient rubis sur l’ongle, même avant qu’elles n’aient livré la marchandise. Et comme ces marchandises restent ensuite bloquées aux postes de passage israéliens, l’importateur palestinien doit s’acquitter de surcroît de frais de stockage dans les terminaux israéliens. La circulation du chekel est donc à sens unique - vers Israël.
Aide aux islamistes
Israël invoque la sécurité. Le blocus est une riposte aux tirs palestiniens qui ont repris depuis début novembre sur le sud du pays, et l’embargo sur les liquidités doit empêcher le financement terroriste du Hamas. Mais les observateurs palestiniens et étrangers sont unanimes: les restrictions israéliennes aident précisément le gouvernement islamiste et les activistes à s’enrichir. Car elles ont mené les Gazaouis à instaurer une "industrie de contrebande" sous la frontière avec l’Egypte. Industrie réglementée et supervisée aujourd’hui en grande partie par le gouvernement Hamas. Défiant la traque égyptienne, quelque 200 tunnels sont actuellement opérationnels sous la frontière de Rafah, permettant l’entrée à Gaza non seulement d’armes, explosifs et métaux pour la fabrication de roquettes, mais aussi de médicaments, cigarettes, vêtements, articles ménagers, bétail et autres biens domestiques, y compris des animaux sauvages pour le zoo de Gaza. Récemment, le gouvernement Hamas y aurait même aménagé un pipeline pour amener du fuel d’Egypte.
Parallèlement, ces tunnels permettent la sortie de Gazaouis privés de permis de circulation israélien - activistes, étudiants, malades. Aux tunnels, tout se paie en dollars: les passeurs, les marchandises, les taxes que le gouvernement Hamas prélève sur tout ce qui y transite et les impôts qu’il impose aux propriétaires des tunnels. Ceux-ci appartiennent aux grands clans de la région de Rafah. L’on estime que le creusement et l’exploitation des tunnels donnent de l’emploi à 4000 personnes. L’ensemble du trafic rapporterait au Hamas 20millions de dollars par mois. C’est grâce à ces fonds que 20000 fonctionnaires du gouvernement Hamas ont bien reçu leur salaire de décembre, contrairement à leurs collègues liés au régime Abbas.
Entre-temps, ce dimanche, la police israélienne a barré la route à un bateau chargé de vivres et médicaments que des Arabes israéliens voulaient envoyer du port de Jaffa, près de Tel-Aviv, à Gaza. La semaine dernière, la marine israélienne a refoulé un bateau libyen qui transportait 3000 tonnes d’assistance humanitaire à destination de Gaza. Précédemment, trois bateaux de militants internationaux, partis de Chypre avec une aide symbolique, ont bien été autorisés à accoster à Gaza.