"Gang des barbares": le calvaire d'Ilan Halimi
- Publié le 23-05-2009 à 11h55
Après l'étude des personnalités et d'une série d'enlèvements ratés, les juges du "gang des barbares" abordent cette semaine le coeur du dossier
PARIS Ilan Halimi a été séquestré, torturé puis assassiné en 2006 en région parisienne. Au côté de Youssouf Fofana, leader présumé de la bande, accusé d'avoir porté les coups fatals au jeune juif de 23 ans après trois semaines de séquestration, 26 personnes -dont deux mineurs au moment des faits- répondent de leur participation à ce meurtre aggravé.
A partir de mardi doivent s'engager quatre semaines de débats pendant lesquelles la cour d'assises des mineurs, qui siège à huis clos depuis le 29 avril, tentera d'y voir clair sur les responsabilités respectives.
Cela démarrera avec la présentation de l'enquête par deux hauts responsables policiers, dont Noël Robin, chef de la brigade criminelle à l'époque des faits et depuis promu sous-directeur à la PJ.
Un témoignage que Me Emmanuel Ludot, avocat de Fofana, dit attendre "avec impatience". Car l'enquête, décriée par la mère d'Ilan Halimi dans un livre récent, recèle aussi des zones d'ombre aux yeux de la défense, qui soupçonne les services de renseignements (DGSE) d'avoir apporté leur aide aux policiers sans que cela n'ait jamais été mentionné dans le dossier.
Les conseils de Fofana, qui souhaitent l'audition au procès de Hervé Morin et Michèle Alliot-Marie, actuel et ex-ministre de la Défense (autorité de tutelle de la DGSE), pourraient renouveler dès la fin de cette "présentation" policière leur demande sur laquelle la cour a refusé de se prononcer le 18 mai.
C'est un policier, responsable d'un syndicat, qui a affirmé le 11 mai dans une émission de télévision que les services secrets étaient intervenus pour aider à localiser d'où provenaient les communications des ravisseurs avec la famille Halimi.
Cette émission, "Mots croisés" sur France 2, a provoqué la colère sur les bancs de la défense, la plupart des avocats y voyant une violation de la règle du secret des débats et une atteinte "grave" à la présomption d'innocence en plein procès.
A l'audience, les débats ont porté pendant 15 jours sur la personnalité des accusés, très jeunes le plus souvent, lycéens, chômeurs ou habitués des petits boulots. Depuis la semaine dernière et jusqu'à lundi inclus sont examinés les rapts manqués imputés au "gang", avec les témoignages de "cibles" n'ayant parfois échappé que de peu à la mort.
Dans le box des accusés, il n'y a eu à ce stade "pas d'explications, pas véritablement de prise de conscience de la gravité des faits", affirme Me Muriel Ouaknine-Melki, avocate d'une partie civile.
Mais "maintenant qu'on aborde les faits sur Ilan, les discours vont peut-être évoluer, ils seront peut-être moins détendus", ajoute l'avocate, en regrettant une audience émaillée de "diversions" de la défense.
Youssouf Fofana, coutumier des provocations, a récusé le 19 mai son avocate Me Isabelle Coutant Peyre après s'être interrogé sur sa possible origine juive et l'avoir qualifiée d'"ennemie de l'intérieur".
En marge du procès, prévu jusqu'au 10 juillet, la famille Halimi a demandé à la justice d'interdire le dernier numéro du mensuel Choc, montrant en Une Ilan aux mains de ses tortionnaires, un pistolet sur la tempe et le visage recouvert de scotch. Le dossier est à la cour d'appel, où une audience est prévue lundi.© La Dernière Heure 2009