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« Le premier fondement est que l’homme qui sert D.ieu connaisse sa propre valeur et reconnaisse sa grandeur », écrit Rabbénou Yona (Cha’aré Techouva).

Cela signifie que la notion d'estime de soi est un besoin fondamental pour l’homme — un besoin matériel, mais surtout un besoin spirituel. Et comme il s’agit d’une chose essentielle à l’homme, le Yétser Hara' (mauvais penchant) s’y intéresse également. En plus de combattre les actes et les pensées de l’homme, il combat aussi la conscience de sa valeur. Nous expliquerons plus loin pourquoi le Yétser Hara' s’attaque à ce domaine et comment il le fait.

L'influence de l'environnement 

Lorsqu’un être humain naît et vient au monde, il est entièrement dépendant de son entourage proche — ses parents qui prennent soin de lui, puis la famille élargie et la société. À ce stade, il n’est pas indépendant, mais il dépend uniquement des autres. Sa valeur personnelle aussi, il l’apprend à travers l’environnement, par une parole bienveillante, de la reconnaissance, et le sentiment qu’on l’aime. C’est ainsi qu’il apprend à se connaître. 

Mais ici réside un paradoxe. D’un côté, c’est ainsi qu’il apprend à se construire et à évoluer dans le monde. Mais de l’autre, cette dépendance à l’environnement atteint sa confiance en lui et sa capacité à agir selon sa propre initiative. Sur ce conflit, le Rambam écrit (Hilkhoth Dé’ot 6, 1) :  « Il est dans la nature de l’homme d’être influencé par ses proches et ses amis dans ses idées et ses actions. » Cela signifie que si l’environnement de l’homme est bon, il s’identifiera naturellement au bien qui l’entoure. 

Mais si, D.ieu préserve, la société autour de lui est négative, il s’identifiera alors aux côtés négatifs de son être. L’homme se connaît en fonction de son environnement. Il s’intègre à son entourage, reçoit des compliments et est convaincu que cela reflète ses propres compétences et sa valeur personnelle. Mais en réalité, cette valeur est dérivée de l’environnement. Si cet homme vivait dans un autre cadre, il aurait une autre valeur. Si, par exemple, l’environnement était meilleur et que ses actions s’accordaient à ce nouveau cadre, sa valeur perçue serait meilleure. Et inversement. Ce qu’il pense être sa propre valeur est en réalité une valeur environnementale. Or, cette valeur-là pose deux problèmes :

Chaque personne a une mission unique dans le monde. Si ses actes dépendent de la société qui l’entoure, il accomplit la mission de cette société et non sa propre mission. Comme dit le Arizal : « Hachem ne crée jamais deux missions identiques. »

Si la personne se trouve dans un environnement qui ne lui apporte pas de soutien ou si elle subit des blessures de son entourage, sa valeur se trouve ébranlée, car elle ne reçoit pas le soutien nécessaire. Le besoin de reconnaissance 

L’importance de la valeur personnelle est aussi vitale pour l’âme que l’oxygène l’est pour le corps. Comme l’oxygène est vital pour le corps, le sentiment de sa propre valeur est vital pour l’âme. Sans cette reconnaissance de sa propre valeur, la personne se sent mal. Par exemple, si une personne se rend à un grand événement familial (comme un mariage) et que personne ne l’accueille ni ne la respecte comme elle s’y attendait, elle peut vite ressentir de la pression — et dans certains cas, même une sensation d’étouffement. Comme quelqu’un qui voudrait respirer et manque d’air. Ce besoin de reconnaissance est donc fondamental. Sans lui, l’homme se sent blessé, en colère, et cela peut engendrer des troubles dans sa vie, dans son corps comme dans son âme.

En théorie, la valeur personnelle devrait offrir à l’homme joie, paix intérieure et réussite, et l’encourager à entreprendre dans le domaine spirituel comme matériel. Mais si la personne est constamment sous le regard critique de la société, et qu’elle dépend de ce regard, il lui sera très difficile d’être une personne sereine et épanouie. Car elle ne pourra jamais savoir comment elle sera perçue la prochaine fois. Par exemple, si quelqu’un organise un événement pour le public ou lance un nouveau projet, il ne pourra pas être pleinement détendu dans ses démarches. Il suffira qu’un seul individu critique ce qu’il fait — a fortiori si plusieurs personnes sont insatisfaites — pour qu’il se sente profondément mal.

La vraie valeur personnelle

La définition répandue de la valeur personnelle n’est pas une vraie valeur personnelle. Elle n’aide pas vraiment la personne, elle la place, au contraire, en détresse permanente. Dans certains cas, cette valeur peut aider, mais elle comporte aussi de nombreux risques. Alors ne vaudrait-il pas mieux que la personne n’ait pas conscience de sa valeur ? Qu’elle n’en ait pas besoin pour vivre une vie tranquille ? 

Mais comme nous l’avons vu au début, selon Rabbénou Yona, l’homme doit connaître sa valeur et sa grandeur. Il existe donc bel et bien une notion de véritable valeur personnelle. En résumé, on nous enseigne que la valeur personnelle est bonne et nécessaire. Mais comme elle dépend souvent de l’environnement, elle expose la personne à de nombreux défis. Dans la pratique, cette valeur est bien souvent environnementale et non personnelle. 

L’ homme doit apprendre à se connaître aussi à travers son entourage, comme disent nos Sages (Pirké Avot 2:1) : « Quel est le droit chemin que l’homme doit choisir pour lui-même ? Tout ce qui l’honore à ses propres yeux et l’honore aux yeux d’autrui...  »