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Blog : Torah-Box

Mohammed : l'élève des rabbins ?

Pourquoi tant de récits du Coran ressemblent-ils aux histoires bibliques enseignées dans les maisons d’études juives ? Ces similarités seraient-elles fortuites ou relèvent – elles justement d’un influence juive majeure ?

De nombreux passages du Coran, notamment ceux des sourates mecquoises, reprennent fidèlement des épisodes tirés du Tanakh (Bible) ou du Midrach : Abraham jeté dans la fournaise (Coran 21, 51–71), la naissance de Moïse, les dix plaies, la traversée de la mer Rouge, la manne, le veau d’or, la révolte de Kora’h, la révélation du Sinaï. Ces histoires, familières des sources juives, ne figuraient pourtant pas dans la culture orale païenne de la péninsule arabique. Comment sont-elles apparues ?

Un point central de cette énigme est la figure de Waraqa Ibn Nawfal, que plusieurs sources islamiques anciennes identifient comme un érudit ayant une connaissance approfondie des Écritures. D’après Ibn Ishaq (le premier biographe majeur de la vie de Mohammed, dont l’œuvre a été partiellement conservée via Ibn Hicham), Waraqa connaissait les textes bibliques en hébreu et en arabe et était parent par alliance de Mohammed, étant l’oncle de Khadidja sa première épouse. C’est elle qui l’aurait encouragé dans ses premières expériences spirituelles. Waraqa, son oncle, aurait recueilli Mohammed à un âge précoce et l’aurait initié aux récits et à la morale des prophètes d’Israël. Cette thèse est corroborée sous certains aspects, par des hadiths rapportés par Al-Boukhari (Sahih Boukhari, Livre 1, hadith 3), qui mentionnent explicitement que Waraqa traduisait les Prophètes et connaissait la révélation antérieure.

Ce lien est également renforcé par le témoignage coranique lui-même. Dans la sourate 10, verset 94, on peut lire : « Si tu es dans le doute sur ce que Nous t’avons révélé, interroge ceux qui lisent le Livre avant toi. » L’expression pourrait désigner les juifs ou les chrétiens, mais dans le contexte mecquois, les sources montrent que seuls les juifs formaient un groupe organisé avec une tradition scripturaire forte. De même, le Coran affirme à propos de la Torah : « Nous avons fait descendre la Torah dans laquelle il y a guide et lumière » (5,44). Et encore : « Nous avons donné à Moïse le Livre, en guide et en miséricorde » (6,154). Donc on peut sans ambiguïtés affirmer qu’il s’agissait bien des Juifs.

A noter, les lettres mystérieuses en tête de certaines sourates (Alif. Lam. Mim., Alif. Lam. Ra.) ont été interprétées par des chercheurs comme des acronymes issus de formules rabbiniques telles que "Amar Li Mori" – « Mon maître m’a dit », renforçant l’hypothèse d’un enseignement oral retranscrit. Ce phénomène stylistique trouve un parallèle frappant dans la forme du Midrach, où certains exégètes commencent souvent par une citation ou une formulation équivalente…

À La Mecque, Mohammed prêche d’ailleurs le retour à l’éthique monothéiste d’Israël, sans mentionner Jésus, ni le moindre sacrement chrétien. Le Dieu évoqué est celui d’Avraham, d’Its’hak, de Yaakov et de Moché. La prière était alors dirigée vers Jérusalem, et le jeûne se pratiquait au mois de Tichri, comme le faisait la communauté juive de Yathrib (Médine). Le texte coranique de cette période ne propose aucun dogme original : il exhorte à la crainte de Dieu, à la justice, à la foi dans les prophètes passés et à la consultation du « Livre ». À aucun moment, dans les sourates mecquoises, Mohammed ne se présente comme le fondateur d’une nouvelle religion. Il se définit comme celui qui vient confirmer les révélations précédentes : « Ce Coran n’est point une invention, mais la confirmation de ce qui était là avant lui, et un exposé détaillé du Livre » (Coran 10,37).

Cependant, un tournant radical s’opère après l’Hégire, le départ vers Médine en 622. Le changement est à la fois théologique, politique et narratif. Le style des sourates devient moins poétique et plus juridique. De nombreuses règles de vie communautaire y apparaissent, et la posture envers les juifs se durcit nettement. Trois tribus juives de Médine — les Banu Qaynuqa, les Banu Nadir et les Banu Qurayza — sont successivement expulsées ou exterminées. C’est également à cette époque que Mohammed change la direction de la prière (Qibla) de Jérusalem vers La Mecque (sourate 2, verset 144).

Selon plusieurs études[1], ce tournant pourrait être lié à l’influence d’un second maître, cette fois de tradition évangélique ou judéo-nazaréenne, qui aurait poussé Mohammed à rompre avec les Juifs, notamment après leur refus collectif de le reconnaître. Ce personnage, dont certains fragments des sources mentionnent l’existence, aurait représenté une autre orientation spirituelle — plus proche du christianisme primitif antijudaïque — et aurait contribué à forger l’image du judaïsme comme religion aveugle, figée, opposée à la nouvelle « révélation ».

A la suite de quoi, la structure du message coranique se transforme. Les invocations lyriques adressées aux idolâtres sont remplacées par des injonctions législatives et des appels au Djihad. L’image des juifs évolue de « dépositaires du Livre » à celle de « falsificateurs » (Coran 2,75), « ceux à qui un Livre a été donné mais qui ne le comprennent pas » (2,78). Ce changement d’attitude n’est pas théorique : il correspond à un moment où Mohammed échoue à rallier les tribus juives à sa mission, malgré l’intention initiale d’en faire des alliés spirituels.

Le Coran médinois accuse les juifs de rejeter la vérité malgré leurs Écritures : « Ceux à qui Nous avons donné le Livre le reconnaissent comme ils reconnaissent leurs fils. Et pourtant, une partie d’eux cachent la vérité sciemment » (2,146). Il ne s’agit plus d’un appel au dialogue, mais d’une accusation de trahison. Ce glissement semble d’autant plus lié à une frustration stratégique que les premiers espoirs de conversion massive des juifs de Médine ont été déçus. Leur attachement à la loi mosaïque, leur exigence de miracles, et leur rejet d’un prophète non issu de la lignée davidique ont précipité la rupture.

Les historiens confirment également cette césure dans le style. Régis Blachère et W. Montgomery Watt, en classant les sourates par ordre chronologique, ont démontré que les thématiques juridiques, polémiques et militaires sont absentes des révélations mecquoises et dominent les révélations médinoises[2]. La rupture est donc à la fois textuelle et contextuelle.

Enfin, selon la tradition rapportée dans les sources sunnites (notamment dans Sahih Boukhari et Sahih Muslim), le Coran tel que nous le connaissons fut compilé sous le califat d’Othman, vers 650. Ce dernier aurait unifié la version coranique en éliminant les variantes et en détruisant les documents divergents. Si une version primitive, plus proche du texte juif ou structurée selon un autre ordre, avait existé, elle aurait été effacée dans cette opération. Plusieurs traditions juives orientales conservent la mémoire d’un Mohammed instruit par un érudit juif.

Ainsi, les faits convergent. Il y a bien deux temps dans la mission de Mohammed : une première phase, profondément influencée par la Torah et les récits des prophètes juifs, marquée par l’appel au retour au monothéisme abrahamique, et une seconde phase, plus polémique, où la nouvelle religion devient indépendante, affirme son originalité, et entre en conflit avec ses sources premières.

Dès lors, ne faut-il pas poser cette hypothèse dérangeante mais historiquement fondée : que l’inimitié envers les juifs, perceptible dans la phase médinoise du Coran, est née précisément de leur refus d’adhésion — doublé de l’influence croissante d’un évangéliste ennemi des juifs ? Et si ce revirement n’avait pas été dicté par une nécessité théologique, mais bien par un échec politique et doctrinal — un rejet de la part des juifs et l’influence croissante d’un évangélisme antijuif ?

Pourtant, tout le Coran ne parle pas d’exclusion. Certains versets, comme la sourate 5 (v.20–21) ou la sourate 17 (v.104), reconnaissent explicitement que la Terre d’Israël fut donnée aux enfants d’Israël. Des figures religieuses reconnues, comme Mohammed Al-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale, ont récemment rappelé la nécessité d’un regard apaisé et respectueux envers le peuple juif. Ces versets, toujours présents dans les éditions canoniques du Coran, nous rappellent qu’un autre visage de l’islam a existé — un visage tourné non vers la confrontation, mais vers la reconnaissance du destin partagé des enfants d’Avraham. Il ne tient peut-être qu’aux hommes, et non aux textes, de décider lequel de ces visages l’histoire retiendra.

 

[1] Voir Joseph Azzi, Le Prêtre et le Prophète, ainsi que la thèse d’Hanna Zacharias

[2] Régis Blachère, Introduction au Coran, G.-P. Maisonneuve, 1947 ; W. Montgomery Watt, Muhammad at Medina, Clarendon Press, 1956.

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Dernière mise à jour, il y a 25 minutes