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Blog : Torah-Box

La Torah, antidote de l'âme

 

Soyons honnêtes : qui ne s’est jamais plaint, après quelques heures d’étude de Talmud, que la Torah est “trop compliquée” ? Des discussions qui n’en finissent pas, des pages entières à débattre si tel bœuf a encorné dans telle circonstance ou si tel objet est apte à la pureté rituelle…

À première vue, cela ressemble à une avalanche de détails sans fin, un labyrinthe conçu pour nous perdre.

Mais si, au contraire, ce labyrinthe était le cœur même du dispositif divin pensé pour le bien-être de l’homme ? Si la Torah avait été intentionnellement façonnée dans sa complexité pour nous investir totalement, et nous sauver d’un danger qui guette l’ensemble du genre humain : l’oisiveté, la rumination, la dérive morale, et même la dépression ?

Le Talmud[1] affirme sans détour : “J’ai créé le mauvais penchant et j’ai créé la Torah comme son antidote”. Voilà qui change la perspective : la Torah n’est pas une matière sèche à ingurgiter par devoir, c’est un remède universel, un élixir de vie pour l’être malade…

La Torah comme antidote à l’oisiveté

La Guemara[2] explique que l’oisiveté mène à l’ennui, et que cet ennui conduit, selon les versions, soit à la débauche, soit à la folie. Avouez que c’est une progression inquiétante : d’un vide dans la tête, on arrive à un désastre dans l’âme. Et si je vous disais que les moralistes européens n’ont fait que répéter cette vérité universelle'

Le Rambam (Maïmonide) explique d’ailleurs que la Torah a pour rôle d’équilibrer les traits de caractère, de dompter les excès et de façonner un homme droit[3]. En d’autres termes, elle est une gymnastique de l’âme, aussi nécessaire que l’entraînement quotidien pour un sportif. Mais là où les poids et haltères façonnent le corps, la Guemara façonne l’esprit et les émotions.

Le traité Avot Dérabbi Natan résume cela avec sans détours : “Celui qui a des paroles de Torah dans son cœur n’est pas atteint par des pensées perverses et erronées”[4]. On dirait presque une prescription médicale : prenez une dose quotidienne de Torah, et vous serez immunisé contre les obsessions malsaines.

En outre, la Torah déclare qu’elle s’associe concrètement à l’activité professionnelle dans ce but précis. Rabban Gamliel, fils de Rabbi Yehouda Hanassi, enseigne en effet[5] : “Belle est l’étude de la Torah quand elle s’accompagne d’un gagne-pain, car l’effort consacré aux deux fait oublier la faute”. Autrement dit, la Torah ne se présente pas comme une idéologie totalisante qui absorberait l’homme au point de le couper de la réalité, mais elle reconnaît avec une étonnante lucidité que l’activité, jointe à l’étude, remplit l’homme et l’équilibre.

Investir dans ce qu’on aime : la Torah n’est pas une tyrannie

On pourrait cependant objecter : très bien, mais si la Torah est si complexe et si exigeante, ne risque-t-elle pas de devenir transformer l’étude en tyrannie fastidieuse ? Là encore, la sagesse talmudique devance l’objection.

Dans le traité Avoda Zara[6], il est dit : “L’homme doit toujours étudier dans le sujet que son cœur désire”. La Guemara[7] raconte qu’un élève de Rabbi Yehouda Hanassi s’est un jour soustrait à son cours, parce que le thème étudié ne lui plaisait pas. Et la Guemara ne le condamne pas ! Elle en tire la règle qu’un homme doit se diriger vers l’étude qui le stimule et l’attire.

Ce détail, souvent négligé, est fondamental. La Torah n’est pas une dictature qui écrase la volonté, mais une discipline qui doit être vécue dans l’amour. L’exigence ne s’oppose pas au plaisir : c’est même ce plaisir qui rend l’exigence durable dans le temps et garantie l’adhésion.

La joie comme fruit de l’étude

Le roi David l’avait chanté[8] : “Les préceptes de l’Eternel sont droits, ils réjouissent le cœur”. C’est peut-être l’indicateur de réussite selon la Torah : si ton étude ne t’apporte aucune joie, c’est qu’il manque surement quelque chose…

La Torah n’est pas seulement une discipline, elle est une source de bonheur intérieur. Preuve en est : dans les jours de deuil national (comme le 9 Av), il est interdit d’étudier la Torah, car son étude provoque de la joie. Si la Torah n’était qu’un exercice intellectuel, il n’y aurait aucune raison de l’interdire lors des jours de tristesse. Mais la Halakha[9] en a tranché autrement : étudier procure une joie telle qu’elle contredit l’esprit du deuil.

En clair : la Torah est une sorte de drogue euphorisante, une drogue dont on se souhaite tous l’addiction.

La Torah mémorisée : bonheur et douceur

Mais la Torah n’est pas seulement agréable à étudier, elle est encore plus douce quand elle est retenue. Le Talmud dans Sanhédrin affirme : “Quand la Torah est gardée dans la mémoire de l’homme, elle devient heureuse et agréable pour lui[10]”.

On le sait : le bonheur n’est pas seulement dans l’acquisition, mais dans l’intégration. Lire une fois un texte est intéressant. L’avoir en mémoire, le ruminer, l’avoir disponible dans le cœur, c’est une autre dimension. La Torah n’est pas un savoir extérieur qu’on consulte de temps en temps : elle devient une présence vivante, une compagne de route. Comme l’affirme le verset : « Car elle sera une compagne de grâce pour ta tête et des colliers pour ton cou »[11]. Elle accompagne l’homme, lui évite les écueils de la vie, plaides en sa faveur comme le rapporte le Talmud[12].

C’est là le secret : rester connecté à D.ieu non pas une fois de temps en temps, mais en permanence, par ce lien intérieur qui nous accompagne même loin du livre. C’est d’ailleurs sans doute pour cela qu’à l’origine il était interdit de la retranscrire sur parchemin, elle devait être gravée dans les cœurs.

La Torah comme éducation morale permanente

Elle n’est pas non plus seulement un refuge contre les mauvaises pensées ou une source de joie : elle façonne l’homme en profondeur l’éduquant à la vérité et à la morale. Comme l’écrit le Ramhal dans le Messilat Yesharim[13], celui qui contemple sans cesse les voies de la Torah et médite sur ses préceptes finit par s’imprégner de leur esprit et par se modeler à leur image. C’est en se confrontant jour après jour à cette logique divine que l’homme devient progressivement sensible au vrai et au juste.

Le Ramhal, dans son Messilat Yesharim, explique que l’étude constante de la Torah, et en particulier du Talmud, sensibilise l’homme à la recherche de la vérité et de l’éthique ([S1]). En affrontant sans cesse des raisonnements, des distinctions, des cas limites, l’homme apprend à juger avec justesse. La Torah l’éduque à penser droit.

Et cela a un effet cumulatif : à force de manier la logique de la Torah, on en vient à aborder la vie réelle avec ces catégories. Comme un boxeur qui, après des années de combat, ne sait plus marcher dans la rue sans sentir son corps prêt à réagir, l’homme de Torah ne peut plus voir le monde qu’avec les yeux de la justice et de la vérité.

L’ère numérique : l’homme désarmé

Et c’est ici que notre époque entre en scène. Car le diagnostic est brutal : nous vivons dans une ère numérique qui vide l’homme de ses facultés les plus nobles. La concentration ? Fragmentée par les notifications. La mémoire ? Externalisée à Google. L’effort intellectuel ? Supplanté par des raccourcis artificiels. Résultat : un homme dispersé, fragile, émotionnellement saturé et rationnellement atrophié.

C’est là que la Torah, dans sa complexité, apparaît comme un antidote providentiel. Car elle exige tout le contraire :

Mémoire : répéter, réviser, retenir. Concentration : se plonger des heures dans une Souguia (sujet talmudique). Rigueur logique : démonter, réfuter, reconstruire.

Elle rend l’homme rationnel. Mais mieux encore : elle l’oblige à sortir des jugements émotionnels aveugles pour entrer dans une logique divine obtenu par une analyse logique et rigoureuse.

Dans un monde où l’émotion brute domine (likes, colères, indignations instantanées etc.), la Torah est une école de lucidité. Elle apprend à penser avant de réagir, à analyser avant de juger, à construire au lieu de se laisser balloter.

Une connexion vitale

Alors oui, la Torah est complexe. Oui, elle est exigeante, parfois déroutante. Mais cette complexité est justement son génie : elle occupe l’homme, l’éduque, le réjouit, le relie.

Dans un monde où les bureaux de psychologues se multiplient et où les sociétés se noient dans les dérives de mœurs, la Torah reste l’antidote suprême. Elle soigne l’âme de l’oisiveté, elle discipline l’esprit, elle rend heureux le cœur, elle structure la raison.

Et surtout, elle accomplit ce but ultime : nous connecter en permanence à D.ieu. Car l’étude de la Torah n’est pas une activité parmi d’autres. C’est une ligne directe, une conversation sans fin avec le divin.

Il y a quelque chose de bouleversant à imaginer que chaque fois qu’un juif se penche sur une page de Talmud, dans un petit coin du monde, il échappe à l’absurde, il se libère du néant, il se relie à l’infini. Et même si le monde entier l’oubli, lui sait qu’il tient dans ses mains un trésor qui le garde vivant.

En définitive, la Torah n’était pas seulement notre loi, également notre thérapie, notre joie et le cordon ombilical qui nous maintient rattaché à D.ieu.

 

[1] Traité Kiddouchin 30b

[2] Traité Kétoubot 59b

[3] Les huit chapitres

[4] Chap. 21

[5] Avot 2:2

[6] P. 19a

[7] Ibid.

[8] Psaumes 19:9

[9] Moëd Katan 15a

[10] Traité Sanhédrin 87

[11] Proverbes 1:9

[12] Sanhédrin, Ibid.

[13] Chapitre 7

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Dernière mise à jour, il y a 40 minutes