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Blog : Torah-Box

Histoires et paraboles inspirantes - 'Hayé Sarah

« Et il en sera ainsi : la jeune fille à laquelle je dirai : penche ton cruchon, et je boirai — et qui répondra : bois, et j’abreuverai aussi tes chameaux — celle-là, Tu l’auras destinée à Ton serviteur Isaac. » (Genèse 24,14)

Quand Éliézer, le serviteur d’Avraham, fixe le signe qui désignera l’épouse d’Its'hak, son critère ne tient pas du miracle mais du raffinement des Middot, de la bonté de caractère. Il ne demande pas à D.ieu un prodige céleste ; il cherche une trace de bonté terrestre, une finesse du cœur et de sensibilité.
Ce qu’il attend de la jeune fille n’est pas un simple service, mais un geste gratuit, intelligent, empreint de délicatesse morale — ce que nos maîtres appellent Dérekh Érets, le fait de se comporter avec justesse, délicatesse, et élégance morale.

Et c’est précisément ce qu’il va trouver chez Rivka. Cette dernière se présente au puits, tenant sa cruche. Éliézer, épuisé par le voyage, lui demande un peu d’eau. Elle aurait pu hésiter : elle ne connaît ni cet homme, ni ses intentions, pourquoi se risquer ?

Mais elle n’hésite pas. Elle donne. Déjà, ce don la distingue. Mais la Torah ne s’arrête pas à son élan : elle scrute son intelligence morale. Car Rivka ne se satisfait pas de répondre à la demande formulée, elle va au-delà : « Bois, et j’abreuverai aussi tes chameaux. »

Et là, dit le Beth Halévi, réside sa grandeur. Elle discerne ce qu’Éliézer n’a pas dit : la soif des bêtes, la fatigue du voyage, la dignité de l’homme qui ne veut pas trop demander. Elle lit son silence. Elle agit sans qu’on le lui demande, mais d’une manière qui ne l’humilie pas. Car dans ce puits, elle affronte un dilemme moral subtil : après qu’il eut bu, elle comprend que l’eau restante, touchée par un étranger, pourrait être impure ou dangereuse pour les siens. Pourtant, la jeter devant lui l’aurait offensé — comme si elle craignait sa souillure.

Alors Rivka trouve une issue parfaite : elle verse cette eau non sur le sol, mais pour abreuver les chameaux. Ce qu’elle sauve, ce n’est pas seulement la politesse : c’est la dignité humaine. Elle écarte le risque sans offenser, agit avec prudence sans blesser, elle témoigne d’une bonté rehaussée par l’intelligence du cœur.

On mesure ici la profondeur de la Torah : elle ne loue pas Rivka pour sa générosité seulement, mais pour sa délicatesse morale. Donner, c’est bien ; donner sans froisser, c’est saint. Ce souci de ne pas heurter autrui, même dans l’acte de bien faire, révèle l’essence du Dérekh Érets : une attention si fine qu’elle devient une forme de sainteté.

Rivka, au bord de ce puits, fonde une éthique du détail : une bonté qui voit, qui prévoit, qui protège. Elle invente une morale du tact, celle qui fait du moindre geste un espace de respect.

Des siècles plus tard, un grand maître d’Orient, Rav David Bekhar, incarna la même exigence, jusqu’à l’extrême. Le Maguid de Jérusalem, Rav Chalom Schwadron zatsal, rapporte son histoire.

Le jour du mariage de son fils, Rav David voyageait en calèche vers la ville où devait se dérouler la cérémonie. Le temps pressait, les invités attendaient, et la lenteur du cocher commençait à l’exaspérer, leur retard ne faisait que s’accroitre. Dans un moment d’impatience, il laissa échapper : « Quelle maladresse ! Ne peux-tu pas essayer d’aller plus vite ? » — un mot banal, presque anodin. Ils finirent, au bout d’un long voyage, par arriver, et le Rav put célébrer le mariage.

Toutefois, lorsque la ‘Houppa fut terminée, la joie retombée, une inquiétude s’empara de lui : ce mot, lancé dans la hâte, avait peut-être blessé un homme.

Alors, sans tarder, il demanda : « Où est le cocher ? »

On lui répondit qu’il était reparti. Aussitôt, Rav David fit atteler une autre calèche et se lança à sa poursuite. Des heures de route, dans la nuit, pour un mot trop vite dit.

Lorsqu’il le retrouva, il descendit, la tête baissée, et lui dit :

« Je suis venu te demander pardon pour avoir mentionné un mot blessant tout à l’heure. »

Mais le cocher, surpris, répondit durement :

« C’est bien que tu viennes demander pardon maintenant, mais je ne te pardonne pas. »

Rav David insista, expliqua sa hâte, sa faute, sa honte. Rien n’y fit.

Alors il demanda : « Dis-moi ce que tu veux, pour que tu me pardonnes. »

Et le cocher, dans un mélange d’orgueil et de douleur, dit :

« Je veux la moitié de ton monde futur. »

Sans réfléchir, Rav David répondit :

« Qu’il en soit ainsi. » Et le cocher, bouleversé par tant d’humilité, lui pardonna sur le champ et le remercia pour sa démarche.

Ce récit dépasse l’anecdote : il expose la hiérarchie invisible du monde. Pour Rav David, un mot pouvait valoir la moitié de son éternité. Il savait que la dignité d’un homme pèse plus lourd que les plus grandes récompenses célestes. Ce qu’il sauve ici, c’est la Kédoucha de la parole : ce lien sacré entre la bouche et le cœur.

Nos Sages disaient : « Mieux vaut tomber dans une fournaise ardente que de faire pâlir le visage de son prochain. » Rav David vivait ce principe littéralement. Il avait compris que la faute la plus subtile, celle qui blesse l’âme d’autrui, est la plus difficile à réparer.

Ainsi, de Rivka au puits à Rav David sur la route, c’est la même lumière qui passe : celle d’un judaïsme attentif à l’invisible, où la sainteté se mesure à la manière d’épargner à l’autre une ombre de honte.

Nous vivons à une époque où l’honneur s’efface derrière le sarcasme, où la parole se jette comme une arme. Le récit biblique et l’histoire du Tsadik nous rappellent que la vraie grandeur consiste à peser ses mots, à prévoir leurs effets, à préserver la pureté du lien humain.

Éliézer chercha une femme capable de compassion intelligente ; Rav David incarna un homme capable de repentir absolu. L’un et l’autre nous enseignent que la morale ne réside pas dans l’intensité des émotions, mais dans la précision des gestes et la justesse des paroles.

Puissions-nous, à leur image, sanctifier nos gestes et nos mots, apprendre à comprendre les besoins d’autrui à demi-mot, à tendre la main sans humilier, à dire pardon lorsque c’est nécessaire.

Car là se trouve la vraie noblesse : dans la pudeur du bien et la beauté du respect.

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Dernière mise à jour, il y a 43 minutes