Blog : Torah-Box

Question : “J’ai grandi dans un foyer qui m’empêche aujourd’hui d’avancer dans la vie. Mon père était une personne très peu fiable : il empruntait de l’argent sans jamais le rembourser et il ne tenait presque jamais parole — ni envers les autres, ni même envers nous. Devenu adulte, je ressens aujourd’hui une profonde colère et une grave crise de confiance : je n’arrive plus à croire en qui que ce soit.” 

“Si l’on regarde en profondeur, le lien premier qu’un être humain développe avec le Saint béni soit-Il se construit à travers ses parents. Et si, dans son enfance, la confiance envers les parents a été brisée, comment cet enfant pourra-t-il avoir confiance en D.ieu ? Quelle est donc la voie à suivre pour une telle personne ? Comment peut-elle surmonter à la fois la colère qui l’habite et la perte de confiance générale qu’elle ressent envers les autres — et, par extension, envers le Créateur ?”

Nous trouvons la réponse à cette question dans la Paracha Vayétsé, selon l’enseignement de notre sainte Torah. Ya'akov Avinou possédait la Middat Haémet, la qualité de vérité, comme le dit le prophète : “Tu donneras la vérité à Ya'akov” (Mikha 7, 20). Et pourtant, du Ciel, on l’envoie vivre dans un endroit qui représente l’opposé absolu de la vérité. Lavan et ses fils étaient des trompeurs et même des meurtriers — des gens dépourvus de loyauté qui l’ont trompé cent fois. Ra’hel et Léa elles-mêmes avaient grandi dans une maison de mensonge absolu. Ra’hel dit d’ailleurs à Ya'akov : “Mon père est un fourbe” (Méguila 13b) et elle lui demande : “que faire contre un tel homme ?” Ya'akov lui répond : “Je suis son frère en ruse” — c’est-à-dire : je peux moi aussi user de ruse comme lui. Mais les écrits saints expliquent qu’à ce moment-là, Ya'akov ne mesurait pas encore pleinement l’ampleur du mensonge auquel il allait être confronté.

Alors une question se pose : Comment peut-on rester intègre dans un tel environnement ? Comment Ra’hel et Léa ont-elles pu, après avoir grandi dans une telle maison, s’attacher au Saint béni soit-Il et fonder le foyer d’Israël ?

La réponse révèle un principe fondamental du service divin : lorsque l’on veut qu’une qualité spirituelle se construise et se renforce, elle doit d’abord se dresser face à son contraire. Comme le dit le roi Salomon :“D.ieu a créé l’un en opposition à l’autre” (Kohélet 7, 14). Ainsi, le Saint béni soit-Il a placé Ya'akov Avinou — sommet de la vérité — dans le foyer du mensonge absolu, afin que, face au mensonge, il apprenne à ne pas se briser et à ne pas se laisser entraîner par lui. Mais le rôle de Ya'akov n’était pas de se laisser briser par le mensonge, ni de se laisser entraîner par lui — il devait se tenir face à lui et révéler dans le monde le point de vérité. De cette confrontation, naît une création nouvelle, quelque chose qui n’existait pas auparavant. Plus un homme est vrai, plus il sera confronté à des mensonges puissants, car c’est précisément cela qui lui donne l’occasion de comprendre la profondeur de la vérité et de façonner une œuvre authentique.

C’est pourquoi Ya'akov Avinou, Ra’hel et Léa, tout comme Avraham Avinou et Rivka, sont tous issus de milieux empreints d’impureté morale et spirituelle, et c’est justement de là qu’ils se sont élevés et construits. Ils ne se sont pas laissés happer par le mal et n’ont pas perdu leur foi en disant : “Puisqu’il y a du mal, c’est qu’il n’y a pas de vérité dans le monde.” Au contraire — en voyant le mensonge et la corruption, ils ont compris qu’il leur revenait de renforcer la lumière du bien, de se tenir face à l’obscurité, selon le principe : “L’un est créé en opposition à l’autre” (Kohélet 7, 14) et : “Plus un homme est grand, plus son penchant le sera également” (Soukka 52a).

Ainsi, la leçon pour celui qui a grandi dans une maison où la confiance faisait défaut, est de ne pas se briser, mais de comprendre que le Saint béni soit-Il l’a placé là pour une raison précise. C’est sa mission dans ce monde. Il ne doit donc ni se mettre en colère, ni perdre confiance en autrui, mais au contraire se construire à partir de cette épreuve. 

C’est à lui de découvrir la beauté de la vérité, de l’incarner et de transmettre à ses enfants une sincérité absolue. Alors, avec l’aide du Ciel, il méritera d’être uni à la mesure de la Vérité elle-même…