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Blog : LudovicMonnerat.com

La dissonnance des enjeux

Un billet de Stéphane Montabert sur le site de la Revue Militaire Suisse pose une problématique aussi difficile à aborder qu'elle est importante, suite au cas de soldats israéliens refusant les ordres de leurs chefs militaires pour suivre ceux de chefs religieux :

On peut penser que ces défis sont circonscrits à Tsahal, l'armée nationale d'un Etat imprégné du parfum de la théocratie. Mais on peut aussi estimer que ces problèmes sont exacerbés, non par la piété des soldats, mais par les missions de combat auxquelles il font face. Dans d'autres pays du monde, combien de conscrits ou de volontaires accepteraient d'accomplir une mission frappée d'un interdit religieux' Tant que l'armée se cantonne à des exercices et des simulations, nul ne peut y répondre.

Il s'agit donc ici de l'obéissance des militaires dans des missions coercitives autres que le conflit symétrique de haute intensité dans un cas de défense nationale, c'est-à-dire de l'usage de la force alors que les enjeux des donneurs d'ordres entrent en dissonnance avec d'autres enjeux pour tout ou partie des soldats. Le thème n'est pas nouveau ; Napoléon savait à merveille jouer du nationalisme et de l'honneur pour entraîner ses soldats dans des campagnes dont les enjeux les dépassaient entièrement. Mais l'avènement de la guerre totale, qui culminera avec les deux conflits mondiaux du siècle dernier, a justement abouti à mélanger dans les esprits la capacité, la volonté, la légitimité et l'opportunité d'employer la force - alors que ces quatre éléments sont précisément distincts.

C'est devenu un lieu commun que de voir les armées comme des institutions tournées vers le passé, repliées sur un précarré tactique et technique, largement indifférentes à l'évolution de la société qu'ils ont pour mission de défendre, de protéger et d'aider ; dans une large mesure, c'est pourtant tout à fait exact. De nos jours, la plupart d'entre elles s'efforcent d'exploiter au maximum les nouvelles technologies de l'information et de la communication pour augmenter leur propre efficience matérielle, et des sommes phénoménales sont investies dans l'acquisition de réseaux sur lesquels seront centrées les opérations. Mais les armées n'ont toujours pas intégré le fait que les guerres modernes se gagnent dans l'esprit des populations, comme le disait déjà le colonel Roger Trinquier voici longtemps. Et encore davantage lorsque ces populations alimentent les armées en effectifs.

Ce qui nous ramène à l'obéissance de soldats confrontés à des enjeux dissonnants. En partant du principe que la volonté de défense assurait le fonctionnement des armées, on a oublié que la menace militaire classique n'est qu'une forme possible de la guerre, voire qu'une singularité, et que l'adhésion des soldats doit être obtenue autrement que par l'excitation nationaliste ou par l'esprit de corps exacerbé (lesquels aboutissent au rejet et à la haine de l'autre). En d'autres termes, une armée engagée dans des opérations coercitives autres que la guerre conventionnelle, et qu'elle seule peut effectuer, doit assurer une consonnance entre les enjeux perçus au niveau des dirigeants politiques et ceux perçus par ses soldats, développer la loyauté envers l'intérêt général du souverain (c'est-à-dire du peuple, car nous parlons ici de démocratie) et non envers les intérêts particuliers, et donc faire un effort tout particulier dans l'aptitude psychologique et éthique à servir, au lieu de se concentrer sur l'aptitude physique et cognitive.

Il existe des troupes qui intègrent cette dimension humaine, qui visent à développer l'indépendance et la maturité de l'individu ; dans l'armée suisse, c'est en particulier le cas des grenadiers, où sont inculquées des valeurs qui renforcent l'instruction militaire et permettent de former des citoyens-soldats qui, ensuite, seront les sentinelles et les gardiens d'un pays, d'un peuple, d'une histoire, et qui sauront les servir en toute circonstance. Du moins le conçoit-on ainsi, car effectivement seule la réalité du conflit et de l'opposition permet de vérifier ces facteurs psychologiques autrement impossibles ou presque à quantifier...

Membre Juif.org





Dernière mise à jour, il y a 31 minutes